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La récolte en mer Noire fait pression sur les cours du blé

La Russie et l’Ukraine ont récemment rattrapé leur retard dans les récoltes. Les prix russes commencent désormais à chuter, entraînant le blé dans une spirale baissière.

Après une longue période de consolidation sur le marché du blé, les volumes importants récoltés en mer Noire pèsent sur les prix internationaux.

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Le retard de récolte en Russie aura assuré un bref soutien au marché durant la période estivale, mais les prix russes commencent à chuter, entraînant le blé dans une spirale baissière. L’abondance de l’offre de céréales au niveau mondial fait face à une demande toujours morose, dans un contexte macroéconomique très incertain, et une parité entre l’euro et le dollar défavorable pour l’Europe.

Les prix russes chutent et tirent le marché à la baisse

Les estimations de récoltes s’affinent dans l’hémisphère Nord, avec l’accélération des travaux des champs, en particulier en mer Noire. La Russie et l’Ukraine ont récemment rattrapé leur retard, en passant à respectivement 62 % et 97 % de surfaces récoltées. Le Kremlin a donc presque rejoint l’avancée de l’an passé, à 64 % à date, pour une récolte désormais estimée par Argus à 86,1 millions de tonnes. Les prix russes chutent de presque 10 $/t en une semaine, entraînant les prix ukrainiens, roumains, mais également français. Le prix du blé rendu Rouen s’affiche ainsi à 191,50 €/t.

Cette pression vient s’ajouter à un contexte déjà morose en Europe, avec la perte de certains débouchés majeurs à l’exportation tels que l’Algérie. La hausse de la parité entre l’euro et le dollar à 1,168 pénalise les céréales européennes, qui doivent retrouver de la compétitivité pour ne pas davantage accentuer un bilan attendu excédentaire pour la prochaine campagne.

Lors de sa conférence de presse annuelle jeudi dernier, Argus Media a pu confirmer son estimation de production française à 33,4 millions de tonnes. Si les producteurs voient d’un bon œil ce rebond de production après l’année 2024 catastrophique, les enjeux n’en demeurent pas moindres. Les capacités d’exportation sont en effet revues en hausse à 8 millions de tonnes sur les destinations des pays tiers, ce qui restera insuffisant pour équilibrer le bilan hexagonal. Le stock de fin de campagne serait de 4 millions de tonnes selon Argus, soit le plus haut niveau depuis 2004, et loin des 2,6 millions de tonnes de la moyenne quinquennale.

Ailleurs dans le monde, l’amélioration des conditions climatiques confirme un bon potentiel au Canada, estimé à 35,5 millions de tonnes par StatCan ajoutant davantage de lourdeur, dans un contexte particulièrement incertain au niveau macroéconomique, entre incertitudes concernant les droits de douane et regain de tensions en mer Noire.

Un potentiel européen revu à la baisse pour le maïs, dans un bilan mondial très confortable

Après avoir touché un plus bas à 184 €/t base juillet rendu Bordeaux il y a une semaine, les cours du maïs se consolident maintenant autour des 186 €/t. En France, l'état des cultures se stabilise cette semaine avec 62 % des surfaces jugées dans un état « bon à très bon » au 23 août, à comparer à 78 % l’an passé, selon Céré’Obs.

Les pics de températures globalement en Europe lors des dernières semaines entraînent une baisse de la production sur le Vieux Continent, aujourd’hui estimée à 55 millions de tonnes par Argus. La Commission européenne a également révisé sa propre estimation de 60,1 millions de tonnes à 57,6 millions de tonnes. La divergence est maintenant flagrante entre les conditions climatiques outre-Atlantique et européennes. Si l’offre du Vieux Continent est réduite, les productions sud-américaine et américaine sont en revanche annoncées records.

Aux États-Unis, le rapport ProFarmer Tour publié la semaine passée confirme un potentiel de production record à 413 millions de tonnes, en ligne avec les estimations d’Argus Media. Ce chiffre est toutefois en baisse par rapport à l’estimation record du dernier rapport de l'USDA à 425,2 millions de tonnes, ce qui redonne du soutien aux cours américains. De plus, le maïs américain continue d’engranger de nouvelles et très bonnes ventes à l’exportation.

Enfin la pression de la récolte brésilienne bat son plein avec une chute de 12 $/t pour le maïs brésilien, devenant ainsi le plus compétitif au monde. Après avoir perdu quelques parts de marché sur ce début de campagne, les exportateurs brésiliens cherchent de nouveaux courants d’affaires en l’absence de la Chine.

La fermeté des huiles végétales compense la chute des prix de la graine au Canada

Les prix du colza Fob Moselle se stabilisent autour des 470 €/t depuis le début d'août, pour finalement chuter le 28 août 2025 à 466 €/t, dans le sillage du colza sur Euronext. Les cours sont partagés entre une tension au niveau des huiles et la chute des cours du canola sur le marché de Winnipeg au Canada. Les récoltes commencent au Canada et la journée du 29 août a été marquée par la publication du rapport StatCan qui affiche une hausse de 700 000 tonnes, à 19,9 millions de tonnes, soit le plus haut niveau de production depuis 2019. Le marché est, de plus, pénalisé par l’instauration de la part de la Chine d’une taxe à l’importation contre la graine canadienne à 78,8 %. Le Canada se voit ainsi coupé de son premier acheteur et devra trouver des solutions alternatives.

En Europe, les opérateurs se concentrent sur la tension au niveau des huiles végétales, avec les huiles de palme et de soja en moteur. L’huile de palme bénéficie du soutien de la demande indienne, et l’huile de soja des annonces concernant les mandats d’incorporation de biocarburant aux États-Unis.

Le très faible niveau de trituration en Europe entraîne une baisse des utilisations. En juillet, seulement 1,34 million de tonnes de colza ont été triturées dans les usines européennes, loin des 1,59 million de tonnes de l’an passé à la même date. L’huile de colza est pour l’instant la plus compétitive du marché, mais sa production pour le moment limitée, pourrait entraîner un raffermissement des prix.

Soutien des cours du soja grâce aux annonces sur le biodiesel

Dans un bilan qui semble confortable pour la prochaine campagne, les cours du soja trouvent du soutien dans la réglementation américaine sur les biocarburants. Une vague de demandes d’exemption déposées par des petites raffineries a été partiellement rejetée par l’EPA, l’agence fédérale en charge de l’environnement, avec de possibles réallocations de mandat sur des raffineries de plus grosse taille. Ces refus et possibles réallocations ont été interprétés comme un signal de soutien de la part du gouvernement au marché du biodiesel, faisant rebondir les cours de l’huile de soja en début de semaine, avant qu'« ils rechutent sur les niveaux de la semaine passée.

La semaine fut également marquée par la parution du rapport du ProFarmer Tour, avec une estimation de la récolte américaine de soja qui pourrait se replier sous les 116 millions de tonnes, selon l’organisme, inférieure à l’estimation d’Argus Media et de l’USDA à 116,8 millions de tonnes.

La reprise des discussions entre la Chine et les États-Unis sera un des éléments majeurs à surveiller dans l’évolution des cours du soja des prochains mois.

(1) Société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.

À suivre : négociations tarifaires entre les États-Unis et la Chine ; évolution de la parité euro/dollar ; évolution des prix en mer Noire ; conditions climatiques en Europe pour les cultures de printemps ; retour de la demande et positionnement du blé français.

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