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Soubresaut des cours du blé et du maïs

Les prix du blé et du maïs repartent à la hausse, portés par la dégradation des conditions climatiques.

Après une période calme, le marché du blé et du maïs reprend un peu de vigueur, porté par les inquiétudes liées à la météo qui incitent pays importateurs et fonds d’investissement à revenir aux achats.

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Après un marché atone depuis plusieurs semaines en céréales, avec des prix proches des plus bas de campagne, les premiers doutes face à l’impact des conditions météorologiques sur l’état des cultures animent un peu le marché. Certains gros pays importateurs mais aussi des fonds d’investissement se positionnent aux achats.

Frémissement des prix du blé

Le marché du blé tant en ancienne qu’en nouvelle récolte connaît une légère reprise après une longue période de stagnation. Le mouvement observé pousse ainsi les prix à venir tester la configuration baissière en place depuis février. Le prix du blé de la récolte de 2025 revient en cours de semaine à 210 €/t à Rouen, son plus haut niveau depuis la mi-avril. Cette dynamique haussière reste fragile d’autant que la parité de l'euro face au dollar a marqué un nouveau mouvement de hausse sur la semaine, repassant au-dessus de 1,1360 en cours de semaine.

Sur le plan de l’activité internationale à l'exportation, les premiers appels d’offres pour la nouvelle récolte ont été négociés avec des achats massifs de l’Algérie et de l’Arabie Saoudite cette semaine. Les prix négociés laissent envisager une forte présence des origines de la zone de la mer Noire dès ce début de campagne céréalière et ne profitent pas aux origines d’Europe de l’Ouest. Les conditions climatiques dans l’hémisphère Nord évoluent avec désormais quelques doutes qui s’installent en Russie (sécheresse au sud et gelées dans la région de Rostov) ainsi que sur la zone nord de l’Europe (déficit hydrique).

En Chine, les fortes chaleurs et les vents secs inquiètent sur la région de production de blé du Henan. Aux États-Unis, la situation sur les blés d’hiver se dégrade également avec un état des cultures noté « bon à excellent », à hauteur de 52 % désormais. En France aussi, les notations des cultures se dégradent d’après FranceAgriMer avec 71 % des surfaces annoncées dans un état « bon à excellent », repassant sous la moyenne quinquennale.

Les investisseurs financiers, en position nette vendeuse depuis plusieurs semaines, participent dans ce contexte au rebond en rachetant leurs positions avant le long week-end à venir en raison du Memorial Day aux États-Unis. La tendance reste incertaine à l’approche des récoltes où la météo pourrait encore réserver des surprises.

Finalisation des semis de maïs en France

Le prix du maïs en Europe connaît un rebond technique, principalement soutenu par les rachats de positions vendeuses de la part des fonds. Le cours en ancienne récolte s’affichait, durant la semaine, autour de 190 €/t base juillet 2024 en rendu portuaire façade atlantique, au plus haut depuis près d’un mois.

Ce mouvement haussier intervient malgré un contexte fondamental peu porteur : les perspectives de production mondiale en maïs sont globalement favorables en nouvelle récolte, notamment aux États-Unis où les semis progressent bien (78 % réalisés, au-dessus de la moyenne quinquennale) avec un potentiel de production d’ores et déjà annoncé record par le département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) et au-delà de 400 millions de tonnes.

En Amérique du Sud, les récoltes avancent, avec des prévisions de production également revues à la hausse au Brésil et des rendements rassurants en Argentine, malgré des inondations localisées qui ont temporairement perturbé les exportations.

À l’échelle mondiale, les disponibilités restent donc confortables sur la fin de campagne, ce qui limite les tensions sur les prix face à l’optimisme en nouvelle récolte. En Europe, la situation est toutefois plus contrastée. Les surfaces de maïs sont attendues en baisse en Roumanie, Bulgarie et Hongrie, conséquence directe de rendements décevants de la saison passée.

En France, 95 % des semis sont réalisés d’après les derniers chiffres Céré’Obs, mais les opérateurs restent prudents face aux risques climatiques à venir. En effet, en ce début de cycle de production, le maïs reste évidemment sensible aux moindres risques climatiques dans un contexte de transition entre les deux campagnes céréalières.

Fermeté des prix du colza

La fermeté se confirme sur les prix du colza où les graines retrouvent le niveau de 490 €/t sur un équivalent en nouvelle récolte en Fob Moselle, reflet d’une tension fondamentale sur la graine, contrebalancée par la détente du prix des huiles et des tourteaux. Les stocks de report sont faibles en Europe et au Canada, conséquence d’une demande dynamique et d’une trituration en hausse. Toutefois les marges restent dégradées, freinant par conséquent la demande immédiate.

À l’échelle mondiale, les incertitudes s’accumulent. En Ukraine, les conditions climatiques difficiles depuis avril face à un temps sec et des dégâts de gel suscitent des doutes sur le potentiel de production. En Australie, les semis sont impactés par la sécheresse actuelle dans l’ouest du pays. En revanche, au Canada, près d’un quart des surfaces sont déjà semées dans des conditions pour l’instant favorables, mais aucun incident climatique ne sera permis, alors que les cours du canola dépassent les 700 CAD$/t à Winnipeg.

Le marché du colza reste également influencé par les facteurs extérieurs dont la baisse du pétrole et de l’huile de soja. Les incertitudes sur la politique américaine en matière de biocarburants ont ainsi conduit à de fortes variations. La tension sur les graines de colza persiste, et tout incident climatique chez les grands producteurs pourrait conduire à revenir tester la zone de résistance de 490 €/t récemment touchée. En attendant les récoltes de l’hémisphère Nord, le marché reste volatil, suspendu aux évolutions météorologiques.

Les cours des tourteaux de soja aux plus bas niveaux depuis août 2020

La pression baissière en tourteau de soja est toujours visible, avec des prix au plus bas depuis août 2020, repassant sous le niveau de 330 €/t à Montoir sur l’échéance rapprochée. Cette tendance s’explique par une offre mondiale abondante, alimentée par la fin des récoltes en Amérique du Sud où les conditions de culture ont permis des productions solides estimées respectivement à 49 millions de tonnes en Argentine et 169 millions de tonnes au Brésil.

Ces volumes se traduisent par une production de tourteaux de 33,2 millions de tonnes pour l’Argentine renforçant la place de cette origine comme acteur central dans l’équilibre mondial. Malgré des pluies abondantes ayant ralenti temporairement les récoltes, l’activité de trituration reste soutenue. Cette dynamique accentue la pression sur les prix, d’autant plus que la parité élevée de l'euro par rapport au dollar, au-dessus de 1,13, accentue la compétitivité des marchandises importées en Europe.

Aux États-Unis, pour la nouvelle récolte, les travaux de semis ont fortement progressé avec plus des deux tiers des surfaces désormais en place. Le marché reste également influencé par les incertitudes autour de la politique énergétique américaine et des relations sino-américaines. Malgré une volatilité quotidienne marquée, les cours peinent à sortir de leur canal baissier, faute de signaux haussiers clairs. Dans ce contexte, la surabondance de l’offre mondiale des tourteaux, couplée à une demande qui ne parvient pas à absorber les volumes disponibles, laisse peu de place à un redressement à court terme.

À suivre : négociations sur le prochain accord sur les importations de céréales ukrainiennes en Europe, mouvement de la parité de l'euro par rapport au dollar, finalisation des semis de maïs, évolution des conditions sèches sur le nord de l’Europe et en Chine, développement des cultures dans la zone de la mer Noire en Europe et en Amérique du Nord, confirmation du retour des fonds d’investissement aux achats

(1) Argus Media, société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières, nous livre son analyse agricole hebdomadaire.

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