Les décisions stratégiques qui ont marqué le marché du maïs
Dans plusieurs pays, certains choix concernant le maïs ont entraîné des répercussions sur le marché mondial.
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De 400 millions de tonnes dans les années 1980 à 1 200 millions de tonnes aujourd’hui, la production mondiale de maïs a connu une nette progression. Celle-ci est liée à des développements scientifiques, mais est également portée par la hausse de la consommation. « Les utilisations du maïs sont pléthoriques : alimentation humaine, animale ou énergie. Ces trois secteurs favorisent la production et font du maïs la céréale la plus produite au monde », expose Arthur Portier, d’Argus Media, le 15 mai 2024 lors du congrès européen du maïs.
L’arrivée des OGM aux États-Unis a stabilisé la production
Avec 390 millions de tonnes de maïs récoltées, les États-Unis sont le principal producteur mondial de la céréale. « L’instauration des OGM en 1996 a changé la face de ce pays, retrace Arthur Portier. Avant cette période, on observait de fortes variations de rendements. À partir de 1996, on constate une progression significative et linéaire des rendements, jusqu’à leur stabilisation depuis 2014, autour de 10 à 11 t/ha en moyenne, sans grande variation. » S’il ne constitue pas la seule cause de volatilité du marché, l’équilibre entre l’offre et la demande reste toutefois un facteur essentiel. « Stabiliser la production permet de stabiliser les prix », ajoute Arthur Portier.
Ce dernier fait le parallèle avec la France, qui, loin de cette constante linéaire, voit ses rendements de maïs varier de façon importante d’une année sur l’autre. « En tant qu’analyste, il est impossible de dresser une ligne droite de tendances. Ces rendements volatils ne facilitent pas les investissements de la filière du maïs, pour les producteurs comme pour la recherche. Ces variations, liées notamment au climat, sont la conséquence de la décision stratégique de l’Europe de ne pas considérer les OGM comme une possibilité. »
La Chine paye une décision court-termiste de 2015
« Certains pays payent au contraire leurs mauvaises décisions », poursuit Arthur Portier, donnant l’exemple de la Chine. En 2004, le gouvernement chinois fait le choix de subventionner la production de maïs. Très inférieure à la consommation, elle rendait en effet le pays dépendant des importations. De 125 millions de tonnes produites en 2005, la Chine est passée à 250 millions de tonnes en 2015.
« Cette décision a tellement bien fonctionné que la production est devenue largement supérieure à la consommation, en lien notamment avec des problématiques de consommation de viande, explique Arthur Portier. Les stocks étant suffisants, le gouvernement chinois a pris une décision court-termiste en arrêtant les subventions en 2015. » La production chinoise de maïs a stagné, voire légèrement décliné. Dans le même temps, avec la reprise de l’économie post-Covid, la consommation est devenue largement supérieure à la production. « La Chine se retrouve face à ses contradictions, relève Arthur Portier. Après une décision salutaire en 2004, abrogée en 2015, le pays est devenu extrêmement dépendant des importations : de 4 millions de tonnes en 2018, elles sont passées à 29 millions de tonnes en 2020, et stagnent autour de 20 millions de tonnes actuellement. »
Pour pallier cela, la Chine se tourne vers les OGM. La progression attendue des surfaces, couplée à une tendance haussière des rendements liée aux OGM, permettrait au pays de produire de 25 à 30 millions de tonnes de maïs supplémentaires. « La Chine reprend les clés de sa souveraineté alimentaire », commente Arthur Portier.
Les États-Unis ont mis l’accent sur les débouchés industriels
Malgré une production de 390 millions de tonnes, les États-Unis sont challengés sur la scène de l’exportation par le Brésil et ses 122 millions de tonnes de récolte. C’est la conséquence d’une décision qui touche non pas sur la production, mais la consommation. « Les États-Unis ont mis l’accent sur l’industrie de l’éthanol, qui représente un débouché très important pour le maïs, explique Arthur Portier. C’est un lobby très écouté. La consommation est ainsi assez forte sur le territoire américain. »
« Actuellement aux États-Unis, se pose la question de l’incorporation d’éthanol dans le secteur de l’aviation. Si demain l’administration Biden prend la décision d’intégrer de l’éthanol de maïs dans l’aviation, la consommation va exploser aux États-Unis et déséquilibrer de façon significative le marché du maïs », prédit Arthur Portier.
Les décisions des producteurs influencent aussi le marché
Les décisions des producteurs peuvent aussi influencer le marché. Récemment, elles ont notamment été liées au prix des engrais, dans le contexte de guerre en Ukraine et de flambée des prix. « Pour réduire les charges, les producteurs se sont tournés vers des cultures moins gourmandes en engrais, ce qui a eu un impact direct sur la sole de maïs », rappelle Arthur Portier.
Les « farmers » américains regardent quant à eux les prix du soja et du maïs avant de semer. « Le marché du soja a aussi un impact sur le marché du maïs », conclut Arthur Portier.
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