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Elle n’était plus enclavée, même avec un impayé

L’exercice du droit de passage n’est pas subordonné au paiement préalable de l’indemnité de désenclavement.

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L’histoire

Adèle exploitait trois parcelles d’herbage destinées au pacage de ses chevaux, dont l’une était enclavée. Elle avait saisi le tribunal judiciaire en vue d’obtenir la reconnaissance d’un droit de passage sur la parcelle de son voisin, Yvon. Le tribunal avait accordé au profit de la parcelle enclavée une servitude de passage sur celle d’Yvon et fixé le montant de l’indemnité de désenclavement. Adèle avait commencé à réaliser des travaux pour aménager le chemin d’accès à sa parcelle, et avait versé une partie de l’indemnité.

Le contentieux

Se prévalant de l’absence du paiement intégral de cette indemnité, le voisin avait assigné Adèle devant le tribunal judiciaire en cessation des travaux et l’interdiction de pénétrer sur sa proprié­té. Pour apprécier le bien-fondé de la demande d’Yvon, il faut rappeler l’article 682 du code civil. Selon ce texte, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue, ou qu’une issue insuffisante pour l’exploitation agricole, est fondée à réclamer sur les parcelles de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner.

Ainsi, le bénéficiaire d’une servitude légale de passage en cas d’enclave peut être condamné à payer au propriétaire du fonds servant d’assiette au passage, une indemnité dont le montant est fixé par le juge. Pour Yvon, le propriétaire du fonds dominant ne peut entreprendre des travaux sur l’assiette de la servitude de passage, dont il s’est vu reconnaître le bénéfice par une décision de justice, sans s’acquitter préalablement de l’indemnité de désenclavement corrélativement mise à sa charge par le juge.

Mais Adèle avait invoqué un argument juridique imparable. Yvon disposait d’un titre exécutoire qui lui permettait d’obtenir le paiement de la totalité de l’indemnité. Aussi, ce dernier ne pouvait prétendre à la démolition de l’accès qui lui avait été consenti et qui consacrait son droit réel de désenclavement.

Le tribunal et la cour d’appel lui avaient donné raison. L’exercice du droit de passage n’est pas subordonné au paiement préalable de l’indemnité de désenclavement.

Yvon ne pouvait prétendre à la démolition de l’accès à sa parcelle, consenti à Adèle ni, davantage, obtenir qu’il lui soit fait interdiction de pénétrer sur sa propriété. Cette solution a été confirmée par la Cour de cassation, qui a rejeté le pourvoi d’Yvon.

L’épilogue

Si le droit de passage n’existe qu’à compter du jour où il est décidé de la fixation judiciaire du montant de l’indemnité, son exercice n’est pas dépendant du paiement de cette indemnité. Et il appartient au propriétaire du fonds servant d’exercer l’action nécessaire à son recouvrement si le paiement n’intervient pas volontairement. Adèle pourra donc poursuivre les travaux d’aménagement de l’accès à sa parcelle, mais elle devra veiller à procéder au plus vite au règlement du solde de l’indemnité de désenclavement.

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