Login

La société devait restituer les terres m La société devait restituer les terres mises à sa disposition

La mise à disposition des terres louées ne modifie pas les droits et obligations que le preneur tient du bail. Aussi, la résiliation de la convention a pour effet de réintégrer le fermier dans la jouissance exclusive des terres.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

L’HISTOIRE. Jean, viticulteur en Provence, peinait à travailler seul. Ainsi, avait-il mis les parcelles louées à la disposition de l’EARL constituée avec ses deux cousins.

Cependant, à la suite d’un différend sur certaines pratiques culturales, le gérant de l’EARL avait convoqué les associés en assemblée générale : celle-ci avait alors décidé de révoquer Jean de ses fonctions, de résilier la convention de mise à disposition et de restituer les vignes à l’issue d’un délai de trois ans. Cette situation n’était pas acceptable pour Jean, qui se trouvait dans l’impossibilité de poursuivre leur mise en valeur.

 

LE CONTENTIEUX. Jean avait donc demandé au tribunal paritaire de condamner la société à lui restituer les parcelles et à l’indemniser. Après tout, n’était-il pas dans son bon droit ? En effet, l’article L. 411-37 du code rural précise « qu’en cas de mise à disposition des biens loués au profit d’une société, le preneur qui reste seul titulaire du bail doit continuer à se consacrer à l’exploitation de ces biens en participant personnellement aux travaux. » En refusant de lui restituer les vignes affermées malgré son départ, pour le moins forcé, la société avait ainsi commis une faute et devait l’indemniser pour avoir ainsi été privé de la possibilité de les exploiter.

Pour sa défense, la société avait d’abord invoqué l’incompétence du tribunal paritaire, car le litige ne portait pas sur l’application d’une convention soumise au statut du fermage. L’EARL avait, en outre, invoqué une clause de la convention l’autorisant, en cas de reprise des biens mis à disposition compromettant gravement la poursuite de l’activité, à fixer un délai pour la restitution des terres.

Les juges devaient trancher. D’abord, ils se sont déclarés compétents pour statuer sur la demande de Jean. La jurisprudence n’avait-elle pas reconnu à la juridiction paritaire une compétence générale pour connaître les contestations dont le bail rural est l’objet, la cause ou l’occasion* ? Ensuite, les juges ont fait droit à la demande de Jean : la mise à disposition des terres louées ne modifiait pas les droits et obligations que le preneur tenait du bail, dont l’exécution s’imposait à la société.

Aussi, la résiliation de la convention de mise à disposition avait bien eu pour effet de réintégrer Jean dans la jouissance exclusive des vignes jusqu’au terme du bail dont il était titulaire.

L’EARL a été condamnée à restituer les parcelles louées, ainsi qu’à indemniser Jean de sa privation de jouissance. Et son pourvoi a été rejeté : pour la Cour de cassation, la convention de mise à disposition, accessoire du bail, ne pouvait survivre au départ de Jean.

 

L’ÉPILOGUE. Jean pourra retrouver la jouissance de ses vignes. On peut donc avancer qu’en cas de départ volontaire ou forcé de l’associé, auteur de la mise à disposition réalisée dans le cadre de l’article L. 411-37 du code rural, celle-ci doit prendre fin rapidement, et tout retard dans la restitution des parcelles justifie une indemnisation du préjudice résulté de sa privation de jouissance.

*Cour de cassation, 10 juillet 2002, n° 01-02048

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement