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Cultures Les maladies compromettent le potentiel

La pression septoriose et fusariose est d’une telle ampleur cette année que les rendements et la qualité devraient en pâtir.

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En avril dernier, la moisson s’annonçait plus que correcte. C’était sans compter les pluies incessantes en mai et juin, au moment des floraisons, qui ont fait exploser les maladies. Tout le monde attend maintenant que les moissonneuses-batteuses sortent pour voir l’étendue réelle des dégâts. Seuls quelques orges d’hiver et pois ont été récoltés dans la moitié sud (lire encadré) et la collecte s’annonce assez tardive.

La situation est déjà jugée « catastrophique » par bon nombre d’opérateurs sur le terrain, notamment pour les blés tendres. La septoriose s’est « régalée », desséchant parfois complètement les feuilles et masquant les symptômes de JNO (jaunisse nanisante de l’orge) apparus ce printemps. Beaucoup d’épis sont touchés par la fusariose. « On trouve difficilement d’épis sains », relate un conseiller en Champagne-Ardenne.

Toutes les variétés sont touchées, à des degrés divers selon leur sensibilité. La protection fongicide a été très complexe à gérer, le renouvellement des traitements n’ayant pas toujours été fait dans les temps à cause des problèmes météo. Les parcelles ont été traitées au moins trois fois au lieu de une à deux habituellement. Cela n’aura pas suffi, surtout lorsque les doses étaient réduites. Bien souvent, « la couverture fongicide a craqué ». Du piétin échaudage est parfois observé, comme en Poitou-Charentes, Pays de la Loire, Midi-Pyrénées et Est-Audois. Certaines parcelles ont versé. Pour compléter le tableau, beaucoup sont encore très sales, en raison de résistances des herbicides et des relevées d’adventices avec les pluies.

« Les maladies auront un impact élevé sur le rendement », prédisent les opérateurs. Jusqu’à - 20 q/ha dans les régions du nord de la France, comparé à l’année dernière, qui était certes exceptionnelle. Ce sera donc une collecte juste dans la moyenne, voire inférieure, malgré un potentiel très élevé en sortie d’hiver. Sur les épillets atteints par la fusariose, beaucoup de grains manquent. Des problèmes de fertilité sont observés à cause du manque de luminosité ce printemps et des températures basses. Certains sont aussi inquiets pour le poids de mille grains et le poids spécifique.

Plus au sud, la situation semble moins problématique, les cultures ayant été plus épargnées par le complexe parasitaire de fin de cycle. « On est confiant », relate un collecteur dans le Lot-et-Garonne. Même optimisme en Isère.

Qualité sanitaire dégradée

 

Au-delà du rendement, la qualité sanitaire des grains inquiète beaucoup, en raison des nombreux épis fusariés. Parmi le cocktail de champignons présents, il est difficile de connaître la proportion entre les genres Fusarium et Microdochium. « Il a fait froid au moment de la floraison, ce qui devrait avantager Microdochium », pronostique un technicien. Or, Microdochium nivale ne produit pas de mycotoxines, à l’inverse de certains Fusarium tel F. graminearum, espèce connue pour produire du désoxynivalénol (Don). Les organismes stockeurs réalisent des analyses au champ pour anticiper leur plan de stockage et l’allotement.

 

En blé dur, la situation est contrastée. Dans le Sud-Ouest, le potentiel de rendement devrait être satisfaisant. La rouille et la septoriose ont été maîtrisées avec trois passages de fongicides. Même s’il existe quelques craintes sur la qualité, les blés ont été plus épargnés par la fusariose qu’au nord. Les pronostics sont effectivement plus alarmistes en Poitou-Charentes et en Centre-Val de Loire. « Quelle que soit la protection fongicide contre la fusariose, on va perdre 20 % du rendement, indique un opérateur de la Vienne. Si on obtient 45 à 50 q/ha, ce sera le bout du monde car tous les épis sont touchés. » La qualité devrait aussi être affectée. Si, dans les Pays de la Loire, la moucheture inquiète compte tenu de la verse, un agronome en région Centre ajoute : « Je ne me fais pas trop d’illusions sur la teneur en protéines. » Une partie pourrait donc partir en fourrager.

Incertitudes en colza

 

En orge d’hiver, les maladies s’en sont aussi donné à cœur joie. Ramulariose, rynchosporiose, grillure pollinique, alternaria, fusariose, piétin échaudage et, plus rarement, botrytis : tout est là pour que cela ne soit pas une grande année, même si certaines orges ont été bien contrôlées. Le calibrage devrait être impacté tout comme la qualité sanitaire. Certaines parcelles ont versé sous le poids de la pluie et quelques cas de germination sur pied sont observés.

 

Du côté du colza, c’est plutôt l’incertitude. La cylindrosporiose est très présente dans le Nord-Est, tout comme le sclérotinia un peu partout en France, même sur siliques. Il y a eu plus de doubles passages de fongicides que d’habitude. Les ravageurs, tout particulièrement ceux d’automne, altise et charançon du bourgeon terminal, vont être aussi source de baisses de rendement plus ou moins marquées. « L’aspect visuel de certaines parcelles paraît prometteur à ce jour mais il ne faut pas s’attendre à des rendements exceptionnels, même sur les plus belles », juge Terres Inovia dans le Nord-Est. De gros écarts sont à prévoir, même au sein des parcelles. Les sols superficiels filtrants pourraient créer la bonne surprise, comparé aux parcelles localisées sur des sols exposés au risque d’hydromorphie où les pieds pourrissent.

 

Quant aux pois d’hiver, leur sort va être vite réglé : certains ne vont même pas être récoltés. La faute à la bactériose qui a décimé les parcelles. Les féveroles ne devraient pas mieux s’en sortir, cette fois à cause du botrytis majoritairement.

 

Cette somme de potentiels décevants arrive dans un contexte économique compliqué, avec des trésoreries sérées et des prix qui, pour l’instant, ne subissent pas la tendance inverse.

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