Climat Le marché du carbone, une manne financière qui inquiète
La compensation carbone « appâte industriels et paysans » au risque de « détourner le monde agricole de sa raison première », prévient le Comité européen des Régions, dans un avis à la Commission européenne publié le 8 février 2023.
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Le Comité européen des Régions est le porte-parole des collectivités locales et régionales de l’Union européenne (UE). Il est consulté en amont des débats législatifs communautaires. C’est dans ce cadre qu’il a émis, le 8 février 2023, un avis sur la question des crédits carbone. Il alerte ainsi des risques de financiarisation de l’agriculture.
Sous des attraits séduisants, des menaces pour la production
La certification carbone est une source de revenus potentielle pour les agriculteurs, admet le Comité européen des Régions. Il s’inquiète cependant des risques d’un tel système financier, craignant de la spéculation. Il estime qu’un marché non régulé, favorable à l’instabilité des prix, serait une porte d’entrée pour des acteurs financiers peu scrupuleux.
Le Comité demande à la Commission européenne de veillerà coordonner les crédits carbone aux aides de la Pac, qui doit rester l’outil principal de financement des pratiques durables en agriculture. Les experts mettent en garde contre un marché privé indépendant des aides de la Pac, qui pourrait se substituer aux financements publics. Ils suggèrent ainsi d’encadrer les prix des crédits carbone, en mettant en place un tarif plafonné pour éviter toute compétition avec la production agricole et un prix minimum pour rester attractif auprès des agriculteurs et dissuader les entreprises de faire du « greenwashing ». Pour garantir la bonne réalisation des projets, le Comité suggère un paiement fractionné sur 5 à 10 ans.
Un risque d’accaparement des terres
Pour limiter la spéculation, le Comité européen des Régions souhaite favoriser l’achat de crédits pour les entreprises vertueuses, c’est-à-dire celles ayant fait preuve en amont d’une réduction des émissions de carbone. Il conseille également de prioriser le secteur agroalimentaire, connu pour être gros émetteur de carbone.
En filigrane transparaît un enjeu foncier de taille. Un marché trop favorable pourrait permettre l’accaparement des terres agricoles au profit de projets non alimentaires comme le boisement. « Afin d’adapter les projets aux territoires, les Régions et les collectivités doivent être au cœur des projets liant agriculteurs et entreprises », requiert le Comité.
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