Affourragement "Je nourris mes brebis avec du frêne"
Dans l’Indre, François Pailler utilise les arbres pour compléter l’apport de foin à la fin de l’été. Une pratique qui lui permet de rester automne, même en cas de sécheresse.
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A la mi-septembre, François Pailler tire quelques branches de frêne, au milieu de la prairie jaunie. Les brebis accourent et se jettent sur les feuilles. Elles en raffolent. « En période de sécheresse, les feuilles de ligneux sont une ressource encore disponible, qui conserve relativement bien ses propriétés nutritives. Je distribue aux brebis du foin le matin, et le soir, elles ont droit à quelques branches de frêne, la cerise sur le gâteau », sourit l’éleveur. Après une carrière à l’Inrae, François Pailler s’est installé il y a quatre ans sur la ferme de ses grands-parents, à Sauzelles (Indre). Avec 9,5 ha pour 70 brebis, il a tout de suite adopté l’agroforesterie fourragère. « Dans la famille, nous avons la tradition de planter des arbres à Noël et j’en ai replanté plus de 700. Cela laisse de quoi expérimenter ! », s’exclame François.
Branches fraîches à pâturer
L’éleveur a d’abord réfléchi à tronçonner des branches de frênes très hautes (15 m). « Je n’étais pas du tout à l’aise avec cette idée, alors j’ai décidé de faire une coupe drastique à la scie, à la hauteur de mon échelle, soit 2,5 à 3 m. Je ne savais pas comment les arbres allaient réagir ». Finalement, les végétaux reprennent de la vigueur et poussent en forme de têtard. Bernadette Vallée, conseillère en agroforesterie fourragère, recommande d’effectuer cette opération radicale lors de la dormance des arbres, en hiver. Il est ensuite possible de tailler des nouvelles pousses à la fin de l’été ou quand les ruminants en ont besoin. « J’ai essayé de leur donner en bergerie, mais il faut ressortir les branches, c’est trop contraignant ». Une fois les feuilles mangées, les branches peuvent être broyées et servir de litière.
Qu’en est-il de la valeur alimentaire ? « En 3 semaines de distribution, je ne peux pas juger de l’impact, c’est trop anecdotique », répond François. Néanmoins, il a choisi le frêne parmi les 35 essences qu’il répertorie sur son exploitation. C'est un arbre très appétant, riche en matière azotée. Selon l’Inrae de Lusignan (Vienne), sa valeur alimentaire est comparable à celle d’un ray-grass ou d’une chicorée, et supérieure à celle du foin. Sa dégradabilité dans le rumen est également un point fort. « Les qualités nutritionnelles du frêne ressemblent à celle du mûrier blanc, présent dans le sud de la France, indique Bernadette Vallée. Le problème, c’est qu’avec le changement climatique, en région Centre, les frênes sont de plus en plus malades, avec la chalarose ». D’autres espèces possèdent de bonnes valeurs alimentaires comme le figuier, le saule marsault, ou le prunellier.
Table d'affourragement
Pour ses berrichonnes de l'Indre et ses rouges de l'ouest, François a également planté un bosquet intraparcellaire, aussi nommé « table d’affourragement ». C'est un rectangle de la largeur du tracteur, délimité par une clôture (lire aussi l'encadré). Il y a planté 16 frênes et merisiers. « Je ne pense pas les faire brouter directement, mais plutôt couper des branches. Cette table est également un îlot d’ombre et un refuge à insectes, avec une flore différente de celle de la prairie », souligne l’éleveur. Il envisage de planter un corridor entre la table et la haie qui borde la parcelle.
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