Les abricots ne comptaient pas pour des prunes
La reconnaissance d’un bail rural peut nécessiter de comparer deux productions.
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L’histoire
Germain mettait en valeur une belle exploitation consacrée pour une large part à la production d’abricots, et pour une petite partie à la production de raisin de cuve. Pour agrandir la partie viticole de l’exploitation, il avait pris à bail, en 1996, une petite parcelle en nature de vigne appartenant à Agnès. Le raisin produit sur les parcelles viticoles était apporté à la coopérative.
Après plusieurs années de mise en valeur, Agnès avait décidé de reprendre la parcelle en vue de la mettre en vente.
Le contentieux
Germain avait saisi le tribunal paritaire en reconnaissance d’un bail rural de droit commun le liant à Agnès. Il s’était fondé sur l’article L. 411-3 du code rural qui soumet au statut du fermage les petites parcelles dont la superficie est inférieure au seuil d’application fixé par le Préfet, mais qui présentent un caractère essentiel pour l’exploitation. Est donc soumis au statut du fermage, bien que de faible superficie, un bien dont la présence au sein d’une exploitation apparaît comme économiquement indissociable. Et le caractère indissociable du bien considéré s’apprécie au regard de l’ensemble des terres exploitées par le preneur, même en présence de bailleurs différents.
Germain avait démontré devant les juges que la parcelle de vigne louée à Agnès, et dont la superficie était inférieure au seuil d’application du fermage fixé dans le département, constituait une partie essentielle de la partie viticole de son exploitation, ce qui justifiait la reconnaissance d’un bail de droit commun. Et il avait produit aux débats une attestation du président de la cave coopérative démontrant que la parcelle litigieuse représentait entre 2019 et 2021 une moyenne de 25 % du chiffre d’affaires de Germain sur la partie viticole de son exploitation.
Les juges avaient été convaincus mais pour apprécier le caractère essentiel de la parcelle n’auraient-ils pas dû prendre en considération l’ensemble des terres exploitées par Germain, et non pas seulement les parcelles de même nature sur la base de l’attestation de la coopérative ?
La haute juridiction a censuré la décision des juges d’appel. En se déterminant comme ils l’avaient fait, les juges s’étaient fondés sur des éléments impropres à établir si à la date de la conclusion du bail, la parcelle litigieuse constituait une partie essentielle de l’exploitation de Germain, prise dans son ensemble, c’est-à-dire en tenant compte non seulement des terres en nature de vigne mais également de celles en nature de production d’arbres fruitiers.
L’épilogue
Germain ne pourra donc pas revendiquer l’existence d’un bail soumis au statut du fermage sur la parcelle de vigne. Cette dernière pourra la reprendre pour la mettre en vente sans que ce dernier puisse s’y opposer, car le droit de préemption ne concerne que les baux soumis au statut.
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