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Malgré son retrait de la société, elle put sauver son bail

Si le bailleur souhaitait obtenir la résiliation du bail, c’était sans compter sur les arguments juridiques des preneurs.

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L’histoire

Par acte du 24 mai 1994, Luc avait donné à bail à Rémi et à son épouse, Lucile, de belles parcelles d’herbage que ces derniers avaient mis à la disposition de l’exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) créée entre eux. Le 16 mai 2011, Lucile, qui, parallèlement à son travail d’exploitante, exerçait la profession de comptable, s’était retirée de la société et son fils, Gilles, avait été admis le 17 juin 2013 en qualité de nouvel associé et de gérant. Enfin, le 6 janvier 2020 les preneurs avaient informé les bailleurs du départ en retraite de Rémi et de l’entrée de leur fille en qualité d’associée de l’EARL.

Le contentieux

Pour Luc, bailleur, ces modifications apportées au bail et dans la structure de l’EARL étaient de nature à lui causer un grave préjudice de nature à justifier la résiliation du contrat. Aussi Luc avait-il saisi le tribunal paritaire des baux ruraux. Le statut des baux ruraux ne contenait-il pas des exigences strictes que les preneurs auraient dû respecter ?

D’une part, le défaut d’accomplissement de l’information du propriétaire, en cas de cessation d’activité de l’un des copreneurs, constitue un manquement aux obligations nées du bail. D’autre part, la faculté de mettre les biens loués à la disposition d’une société à objet principalement agricole impose, en cas de pluralité de preneurs, que ceux-ci en soient tous associés. Luc avait fondé sa demande de résiliation sur ces principes.

Le retrait de Lucile de l’EARL devait être regardé comme un abandon de la mise en valeur, à titre personnel, des biens pris à bail et partant comme une cession prohibée du bail. En outre, Rémi, qui avait continué à exploiter les parcelles avant de faire valoir ses droits à la retraite n’avait pas sollicité la poursuite du bail en son seul nom. Autant de motifs qui justifiaient la résiliation du bail.

Rémi et Lucile s’étaient défendus. En présence de copreneurs, le législateur ne précise pas si la qualité d’associé doit être remplie par chacun d’eux. En outre, le manquement du copreneur à son obligation d’information du bailleur en cas de cessation d’activité ne peut justifier une quelconque sanction en l’absence de préjudice. Or en l’espèce, Luc n’avait pas démontré que les parcelles louées étaient mal entretenues. Les juges paritaires et d’appel leur avaient confirmé cette analyse. La demande de résiliation ne pouvait qu’être rejetée, ce qu’a confirmé la haute juridiction en écartant le pourvoi de Luc.

L’épilogue

Lucile a pu sauver son bail en conservant sa qualité de preneuse, seule, puisque Rémi a fait valoir ses droits à la retraite. Mais la mise en valeur des parcelles louées se fera dans des conditions particulières, dans le cadre de l’EARL dont Lucile, n’est plus associée et qui reste constituée entre son fils et sa fille. Lucile aura intérêt à demander à Luc l’autorisation d’associer au bail son fils en qualité de copreneur.

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