Aléas climatiques Comment les pays se sécurisent
Australie, Argentine, Chine, États-Unis… Chacun répond aux aléas dus au réchauffement climatique à sa manière. Les assurances, la gestion de la production ou encore des exportations sont autant de solutions mises en œuvres.
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Avec le réchauffement climatique, les accidents de production sont de plus en plus fréquents dans le monde. Les gouvernements font face à leur manière à l’accroissement de ces incidents, ont indiqué les intervenants à un débat organisé par l’Afja (association française des journalistes agricoles) mercredi au Sima.
Placer son argent les bonnes années
En Australie, pays à 75 % désertique, deux récoltes sur trois ne sont pas rémunératrices. En cause, la hausse des températures. « Le gouvernement a mis en place un soutien à l’écrêtement. Il permet de placer son argent les années où les rendements sont très bons (comme cette année) de façon entièrement défiscalisée durant sept ans », explique Christophe Dequit, auteur du tour du monde des moissons. Ainsi, cet argent peut être réutilisé durant les années plus difficiles. « En France, on a le système des DPA, limité à 27 000 €. Chez eux, c’est 750 000 € qu’ils peuvent placer », précise l’auteur. Au bout de 7 ans, l’argent sera considéré et fiscalisé comme un revenu normal.
Gérer ses exportations
En Argentine, le gouvernement gère ses aléas climatiques par le biais des quotas d’exportation. « La politique populiste instaurée ambitionne de fournir au peuple un blé à bas prix à l’intérieur du pays », poursuit Christophe Dequit. Après l’accident de production de 2014, l’État a diminué drastiquement ses quotas d’exportation pour la campagne 2014-2015.
Subventionner l’assurance
Aux États-Unis, malgré les quelques accidents de récoltes, l’étendue de la « wheat belt » est telle que le pays parvient toujours à inonder le marché. Là-bas, 14 % des exploitations représentent 80 % de la production américaine. Ces énormes fermes alimentent à elles seules les marchés mondiaux. Ce sont elles qui s’assurent abondamment. Le système assurantiel américain est soutenu par le gouvernement. « Ce n’est pas l’assureur qui porte le risque, il est simplement distributeur du service, précise Stéphane Gin, directeur marché de Groupama. Ce système accompagne l’agriculteur dans son risque ».
Inciter à la production intérieure
En Chine, la priorité est la sécurité alimentaire du pays. Elle concentre 19 % de la population et ne dispose que de 6 % des terres arables mondiales. Le gouvernement a focalisé sa production intérieure sur le blé en le subventionnant au maximum. Le prix du blé chinois est totalement déconnecté du prix mondial à 400 $/t. « Il incite les producteurs à en semer chaque année, même durant les accidents climatiques », explique Pierre Becoq, directeur international chez Agritel. L’État sécurise son approvisionnement en investissant dans d’autres pays. Dans le Centre de la France, la Chine est déjà propriétaire de 3 500 ha. « Les années d’accidents climatiques, le pays puise dans son stock – gardé secret – et peut également importer plus », poursuit l’expert d’Agritel.
Maximiser ses coûts de production
Dans les pays de la mer Noire, les accidents climatiques sont monnaie courante. « Les agriculteurs ont la peau dure. Ils ne sont pas subventionnés par l’État et les hivers rudes peuvent terrasser leur culture en un clin d’œil », précise le directeur international d’Agritel. Cela peut paraître étonnant aux vues des belles récoltes de la Russie, de l’Ukraine et du Kazakhstan des trois dernières années. « Mais cela est exceptionnel. Souvenons-nous des années 2010 à 2013 qui furent catastrophiques chez eux », rappelle Christophe Dequidt. « Le seul revenu des agriculteurs de la mer Noire est issu du marché. Leur seul levier en tant que chef d’entreprise est de minimiser leur coût de production à outrance. Et ils y arrivent parfaitement », raconte Pierre Becoq.
Deux systèmes d’assurance
L’Australie et les pays de la mer Noire ont une agriculture totalement libérale. « Là-bas des entreprises agricoles de plusieurs milliers d’hectares font faillite lorsque les accidents s’accumulent », rappelle Stéphane Gin. Il sépare deux systèmes assurantiels différents dans le monde. Celui des États-Unis, du Canada ou même de l’Espagne où les assureurs sont distributeurs d’un service de couverture subventionné par l’État. « L’intervention des pouvoirs publics est maximisée. Il s’agit là-bas d’une réelle volonté politique de ne pas laisser porter le risque aux seuls assureurs privé », explique le directeur de Groupama. À l’inverse, en France notamment, le gouvernement subventionne les primes d’assurances et laisse les assureurs porter le risque. La question du modèle idéal reste entière. Chez Groupama on remarque une émulation de nouveaux projets assurantiels. « Les choses bougent », d’après lui.
« Réchauffement climatique oblige, les accidents de récoltes devraient se faire plus nombreux et les agriculteurs auront d’autant plus besoin de couvrir leur qualité et leur quantité, conclut Jean Luc Billard, directeur de la coopérative Ynovae en Bourgogne. Les marchés à terme permettent de couvrir les prix, mais quand il n’y a pas de rendement, il n’y a rien à vendre. »
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