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Loi Duplomb : la bataille tactique s’ouvre à l’Assemblée nationale

La loi dite Duplomb arrive ce lundi 26 mai 2025 dans l’hémicycle de l'Assemblée nationale.

La loi dite Duplomb, qui divise les députés notamment sur la réintroduction de l'acétamipride, arrive ce lundi 26 mai 2025 dans l’Hémicycle pour une première séance qui pourrait être la dernière. Le bloc central espère contourner la masse d’amendements écologistes et insoumis par une motion de rejet tactique.

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Les députés vont-ils passer des jours à examiner les près de 3 500 amendements (certains seront irrecevables ou retirés) déposés pour la loi Duplomp ou régler son cas en moins de deux heures ? C’est le scénario singulier que pourrait écrire en fin d’après-midi l’Assemblée nationale après le dépôt d'une motion de rejet.

Une avalanche d’amendements

« Vital » pour la FNSEA, premier syndicat agricole, le texte est « d’inspiration trumpienne », rétorque la députée écologiste Delphine Batho. Aurélie Trouvé (LFI) dénonce dans Le Monde « une capitulation politique, celle de la bifurcation écologique ». Leurs deux groupes ont déposé une large majorité des amendements, près 1 500 pour les écologistes et 800 pour LFI, tout en réfutant toute « obstruction ».

« C’est un blocage en bonne et due forme » contre un texte « essentiel » pour les agriculteurs, réplique Julien Dive (LR), estimant que le calendrier parlementaire ne permettra pas d’aller au vote. Le député rapporteur de ce texte visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a lui-même déposé une motion de rejet, qu’il pourrait défendre à la tribune pour contourner le « mur d’amendements ».

Les députés favorables à l’essentiel de cette loi, soutenue par la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard (LR), se mobiliseront pour la rejeter. Ses contempteurs espéreront que la motion échoue, et que le texte soit modifié dans l’Hémicycle. Car si elle est adoptée, la navette parlementaire sautera en quelque sorte la case Assemblée, une commission mixte paritaire (CMP) réunissant à huis clos sept députés et sept sénateurs devant alors s’accorder sur une mouture commune.

« Aucune majorité certaine »

Le RN va « plutôt dans le sens » de voter cette motion, a expliqué dimanche sur France 3 son vice-président Sébastien Chenu. Une bonne partie du bloc central pourrait également la voter, les seules incertitudes portant sur l’affluence dans l’Hémicycle et le nombre de centristes allant jusqu’à voter contre, alors que le volet sur les néonicotinoïdes divise leurs groupes.

La stratégie aura toutefois un effet indésirable pour les députés : la CMP repartirait de la version sénatoriale, favorisant les parlementaires de la chambre haute dans la négociation. Un scénario déjà vu lors de l’examen de la loi sur l'immigration à la fin de 2023, et qui avait laissé un goût amer aux macronistes.

Si la CMP trouve un accord, le texte devra encore être adopté par un dernier vote dans chaque chambre. « S’il sort dans une version proche de celle du Sénat, il ne sera pas voté à l’Assemblée », prédit Pascal Lecamp (MoDem), opposé à la réintroduction de néonicotinoïdes. En l’état, le texte « ne dispose d’aucune majorité certaine » et contient « plusieurs dispositions inconstitutionnelles », a prévenu son président de groupe Marc Fesneau dans une lettre aux chambres d’agriculture.

Plusieurs sujets clivants parmi les députés

La version, adoptée au Sénat à l’initiative du sénateur Laurent Duplomb (LR), ne manque pas de sujets clivants parmi les députés. À commencer par la réintroduction, à titre dérogatoire, de l’acétamipride, interdit en France depuis 2018. Ses effets chez l’humain font l’objet d’inquiétudes, même si ces risques restent incertains, par manque d’études d’ampleur.

Autorisé ailleurs en Europe, la réintroduction de cet insecticide de la famille des néonicotinoïdes, est notamment souhaitée par les filières de la betterave ou de la noisette, qui estiment n’avoir aucune autre solution contre les ravageurs. A contrario, les apiculteurs mettent en garde contre « un tueur d’abeilles ».

Autres irritants : le degré d’influence du gouvernement dans le travail de l’agence sanitaire Anses sur les autorisations de pesticides, un article ouvrant la voie à des dérogations pour certains projets de prélèvements et stockage d’eau, et des dispositions pour favoriser la construction de bâtiments d’élevage (installations classées pour la protection de l’environnement).

Les députés ont réécrit, et parfois supprimé, les articles concernés en commission. Cela constitue autant de points sur lesquels la rédaction du texte sera scrutée de très près par les parlementaires, sous pression à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Hémicycle. Plusieurs permanences de députés ont été dégradées en marge de l’examen de la loi. Des « pressions » et « actes d’intimidation » dénoncés par la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet.

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