Chanteur, danseur et comédien

Bronzé, soixante ans mais en paraissant dix de moins, Jean-Claude Dezès rentre de l’île Rodrigues. C’est la seconde fois que cet éleveur de bovins et ovins de Condat-sur-Ganaveix, en Corrèze, s’y rend avec une vingtaine de membres de l’association de danses et musiques traditionnelles qu’il préside. Il a commencé par intégrer une chorale, il y a quinze ans. « Je passais aussi des soirées à chanter avec des voisins qui jouent de la cabrette, de la guitare et de l’accordéon », raconte Jean-Claude. De fil en aiguille, le groupe d’amis comprend qu’il ne leur manque que la danse et décide de monter une association pour agrandir le cercle. Et, depuis onze ans, tous les mardis soir, les adhérents de Las chambas finas enchaînent valses, polkas, bourrées ou mazurkas au son des neuf musiciens. « Nous cherchons à recréer l’ambiance des bals folk ou traditionnels », explique l’éleveur.

Un jour, l’un de ses acolytes entend à la radio des Rodriguais déplorer que ces danses se perdent sur leur île par manque d’accordéons diatoniques (1). Grâce à l’enthousiasme de la petite bande, un premier voyage est organisé. « À l’aéroport, on nous attendait avec les instruments et nous nous sommes mis à danser ! » Les Corréziens collaborent ensuite à l’ouverture d’un atelier de réparation d’accordéons, puis de deux écoles de musique sur l’île.

Se libérer

« Avant, j’étais timide : danser ou parler en public me paraissait surhumain… », avoue Jean-Claude. Élevé par des parents qui ne recevaient personne et se consacraient uniquement à leur travail, il n’était pas habitué à communiquer et se sentait bloqué. « Il était beaucoup plus renfermé quand je l’ai connu, il a complètement changé au contact des autres ! » se réjouit son épouse Annie. La transformation s’est opérée progressivement.

Jean-Claude a désormais plaisir à prendre la parole en public. D’ailleurs, après l’avoir entendu présenter les morceaux de ses amis musiciens lors d’un concert, une comédienne lui a proposé de participer au spectacle Uzerche se met en scène. Depuis cinq ans, tous les jeudis d’août, l’agriculteur déambule dans les ruelles de la cité médiévale pour donner une pièce historique et comique. « Il y a un phénomène d’entraînement avec les autres comédiens, j’ai fini par me lâcher et être plus extravagant. La danse et le théâtre me permettent de débrancher, d’enlever tous les freins », confie Jean-Claude.

(1) Dont les claviers sont construits sur la gamme diatonique, l’échelle musicale composée de cinq tons et deux demi-tons.