République tchèque Foncier sous contrôle
Alors que les fermes coopératives essayent de garder le contrôle des terres agricoles morcelées, certains font le pari de se lancer seuls.
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Comme l’ensemble des anciens pays de l’URSS, la République tchèque a connu une véritable révolution foncière, en 1993, à la chute du communisme. L’État a offert la possibilité à toute personne qui avait un titre de propriété datant d’avant la période du collectivisme, de récupérer ses droits, avec toute la difficulté du cadastre obsolète. La majorité des propriétaires ayant des activités éloignées de l’agriculture a vendu ou loué des terres. Des fermes coopératives se sont créées, ressemblant fortement à des kolkhozes mais avec une différence fondamentale : la terre appartenait aux individus connus et non à la collectivité.
De 100 à 140 € par hectare
Les propriétaires qui ont conservé leurs terres, détiennent un bail d’un an avec une structure, à laquelle ils louent leur foncier de 100 à 140 €/ha. Ils peuvent aussi prendre des parts dans l’entreprise et toucher une partie du bénéfice, reversé en totalité aux actionnaires chaque année.
Dans la ferme coopérative Agra, proche de Brno, la part vaut 230 €. Il y a 200 actionnaires. 50 % sont des propriétaires terriens, mais la majorité du capital est détenu par 5 personnes : les membres du comité de direction. Les actionnaires ont reçu un dividende global en 2018 de 1,2 M€.
Quelques privés ont essayé de s’installer seuls. Cenek Novak était zootechnicien dans un kolkhoze. Aujourd’hui, ses deux fils cultivent plus de 500 ha, dont 30 % en propriété, et développent un troupeau de 220 holsteins qui produisent plus de 10 000 l de moyenne, avec des diversifications dans le bois et la pisciculture de carpes. « Mon père a une forte personnalité. À la privatisation, les fermes coopératives voisines ont tout fait pour le bloquer dans son projet en faisant pression sur les propriétaires. Il a commencé par 37 ha et 70 génisses achetées en Allemagne », se rappelle Peter Novak. Des réussites fulgurantes comme celle-ci, il en existe de nombreuses, grâce aux primes européennes, notamment à l’investissement. Les bâtiments et le matériel de la ferme n’ont pas coûté très cher.
La république tchèque est l’un des pays où la réussite a été également possible pour des investisseurs étrangers. Le Français Noël Neyrinck est l’un d’eux. Il exploite aujourd’hui 495 ha dont 70 en propriété, via sa société Agro Neyrinck s.r.o. « J’ai pu m’installer car j’ai la chance d’être soutenu par les malteries Soufflet, leader incontesté du malt en République tchèque. Ils m’ont aidé dans mon projet. » À 48 ans, après treize ans sur place, Noël est marié à une Tchèque et papa d’une petite fille. « La vie reste difficile, les pressions sont de toute part, notamment sur le foncier. De 22 €/ha en 2006, le prix des locations a augmenté à 120 €/ha en 2019. Et les terres sont passées d’un prix référent de moins de 2 000 €/ha à 8 000 à 10 000 €/ha en 2018, dans une zone qui peut être comparée à la Sologne, en termes de qualité de terres. »
Christophe Dequidt
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