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Chine Lutter contre l’exode rural

La campagne chinoise n’arrive plus à retenir ses habitants. Le parti a décidé d’agir, mais la tentation de partir en ville est forte.

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Le phénomène est massif : plus de onze millions de Chinois quittent les campagnes chaque année. Des hordes de pauvres qui viennent grossir les deux cent vingt et une villes de plus d’un million d’habitants, en créant des ghettos et de l’insécurité.

Après des décennies de lutte contre cet exode rural, le président Xi Jinping a pris personnellement les choses en main. Il a validé un plan pour réduire la pauvreté des agriculteurs, revitaliser les campagnes et réduire l’écart entre les zones urbaines et rurales. Il souhaite accélérer la construction d’infrastructures, innover dans les technologies agricoles et créer des filières de production.

Un plan gouvernemental

Au cœur de cette action d’envergure se trouve la sécurité alimentaire, mais aussi une volonté ferme de stabiliser les habitants ruraux. Les dirigeants ne se cachent plus pour évoquer le problème de la pauvreté dans les campagnes. Début avril, le ministre de l’Agriculture et des Affaires rurales, Tang Renjian, déclarait : « De la réduction de la pauvreté à la revitalisation rurale, ce sera un changement important de l’orientation actuelle. »

Et Xu Lin, vice-ministre de la Publicité au Comité central du Parti communiste chinois et chef du bureau d’information du gouvernement, de renchérir : « La Chine est toujours le plus grand pays en développement du monde. Il nous reste encore beaucoup à faire pour remédier au développement déséquilibré et inadéquat à l’intérieur du pays, afin de réduire l’écart entre les zones urbaines et rurales et entre les différentes régions. » Pékin a d’ailleurs annoncé récemment que 100 millions de ruraux chinois étaient sortis de la pauvreté depuis 2013. Un succès certes remarquable, mais encore trop limité.

Des fermes de 2 ha en moyenne

Et pourtant, les moyens et soutiens mis en place sont considérables : prix du blé deux à trois fois supérieurs à ceux du marché mondial, éducation gratuite, arrêt des impôts, accès facilité au foncier agricole. Rien n’y fait. Les habitants les plus pauvres de la Chine restent les paysans, sur des fermes dont la superficie moyenne nationale est de moins de 2 hectares.

Sous-jacente à cette lutte contre la précarité et la sécurité alimentaire, il y aussi la notion démographique. La politique de l’enfant unique, décrétée par Den Xiaoping à la mort de Mao, est aujourd’hui une catastrophe. Elle a cependant toléré des familles nombreuses dans les campagnes, pour faciliter les travaux des champs. Le pouvoir espère qu’une stabilisation des paysans, voire un retour à la campagne, pourrait favoriser les naissances.

« C’est un vieux serpent de mer, explique Alain Bonjean (1), sinologue reconnu. Comment voulez-vous que les jeunes et moins jeunes restent à la campagne, alors que les salaires sont de trois à dix fois supérieurs en ville ? Sans compter l’obsolescence de tout ce qui entoure les infrastructures dans les milieux ruraux. Ils n’y ont aucune perspective positive, sinon celle de vivre pauvres et sans épanouissement. »

Christophe Dequidt

(1) Auteur de Nourrir 1,5 milliard de Chinois, éd. De Boeck.

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