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Aricle Se faire entendre à Bruxelles

Entre un Copa-Cogeca trop mou et des actions chocs d’organisations minoritaires n’ébranlant pas les vitres de la Commission européenne, la bataille d’influence des paysans est en quête d’efficacité.

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Les pieds sur terre et la tête dans les étoiles du drapeau européen. Voilà l’exercice imposé aux syndicats agricoles pour défendre les intérêts de leurs adhérents au-delà des frontières nationales. Chacun peut bien œuvrer auprès du ministre de l’Agriculture depuis Paris, ou bien des députés européens siégeant à Strasbourg, mais comment faire entendre la voix des paysans jusqu’à la Commission européenne, temple de la technocratie communautaire ?

Au fur et à mesure des années, les organisations représentatives ou proches du monde agricole se sont organisées comme elles l’ont pu pour peser. En s’appuyant notamment sur le Bureau européen de l’agriculture française (BEAF), qui assure pour ses vingt-sept membres (APCA, FNSEA, AGPB, AGPM, Cniel, FNPL…) une veille technique sur le suivi des institutions, les questions budgétaires, la Pac… Une aide indispensable, tant la vie bruxelloise exige d’être compétent sur tous les dossiers dont on a la charge. « Cela représente un travail énorme, d’autant que la DG Agri n’est plus la seule interlocutrice, comme il y a vingt ans, commente un habitué des lieux. Le nombre de sujets à maîtriser, au-delà des thématiques purement agricoles, a explosé (climat, environnement, santé, consommation…). Ce qui explique que les gros syndicats y soient beaucoup plus présents que les petits, qui ont moins de moyens. »

Mais à Bruxelles, la véritable ambassade du monde agricole, c’est le Copa-Cogeca. La FNSEA est le seul syndicat français à y siéger (*), alors que la Pologne y compte cinq organisations politiquement opposées, en guerre permanente. De même en Italie et en Espagne (trois organisations membres chacune).

 

« Bateau ingérable »

Le Copa regroupe en tout plus de soixante-dix organisations extrêmement différentes, qui recherchent le consensus à tout prix. D’où la mollesse de ses prises de positions…« C’est un bateau ingérable, commente Patrick Ferrère, délégué général du think tank Agridées.La Commission européenne a du mal à trouver dans cette représentation des agriculteurs un partenaire qui fait de vraies propositions. »Pour lui, si le Copa était capable de « donner de vraies perspectives » et de traduire concrètement ses objectifs de « Pac ambitieuse », la Commission serait sensible à ses arguments. « Mais on reste dans de grandes thématiques, avec de beaux adjectifs. Ça ne donne pas d’espérance… » Surtout face à des ONG, notamment environnementales, qui savent aborder la Commission avec des demandes précises.

à l’opposé du Copa-cogeca, Via Campesina (la « voie paysanne » en espagnol) rassemble des organisations de défense des « petits producteurs » de près de quatre-vingts pays dans le monde, dont, pour la France, la Confédération paysanne et le Modef. « Ce mouvement privilégie la mobilisation syndicale pour des actions chocs, plutôt que le lobbying européen », résume un observateur. La Coordination rurale (CR) suit plus ou moins la même démarche, notamment au sein de l’European milk board (EMB), qui regroupe des producteurs de lait d’une quinzaine de pays.

Pour ce qui est du lobbying, la CR préfère tenter sa chance auprès des députés européens et groupes parlementaires à Strasbourg, plutôt que dans les bureaux bruxellois. Dommage, car pour Patrick Ferrère, « travailler en amont auprès de la Commission européenne est le plus sûr moyen d’arriver à ses fins ». à condition de trouver un juste milieu entre la tiédeur du Copa et les manifestations enflammées de paysans en colère...

(*) Aux côté de l’APCA et du CNMCCA(mutualité, coopération et Crédit agricole).

 

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