Le billetnicolas-jean brehon Le billetnicolas-jean brehon
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Voilà cinquante ans que je vais au Salon de l’agriculture. J’apprécie l’ambiance joyeuse, la fierté des éleveurs qui présentent leurs animaux dont les meilleurs seront parés du ruban tricolore qui leur passe entre les fesses. Un moment de bonheur, ancré dans ma culture. C’est une des rares occasions, avec le 14 juillet et le Tour de France, de rassembler les Français de tous les milieux. Depuis une dizaine d’années, je suis aussi juré produits. Juré huîtres, fromages et, cette année, juré confitures. Table E 26, celle des mirabelles et 8 pots à départager. Nous sommes quatre à cette table : un fabricant et trois amateurs.
On élimine les fantaisies du genre mirabelle et vanille, les banales, et, à la fin, on passe aux médailles. Trois sont dans un mouchoir de poche mais, hélas, ma préférée, la 99 153 est troisième. Et donc, pas de médaille. Pas possible ! Je fais regoûter à mes voisins. Le pot se vide. « Notez cette longueur en bouche ! » Elle passe deuxième. Argent.
Mais j’en veux plus. On appelle deux autres pots et je fais goûter une nouvelle fois, complètement à l’aveugle, sans même voir les pots, pour les départager. Le hall du concours se vide. Les jeunes préposés débarrassent les tables. Il n’y a plus que la nôtre, car je tiens bon. Verdict : trois voix pour la concurrente. Et moi, qui défends toujours bec et ongles la 99 153. « Certes, celle-ci a un petit goût acidulé qui lui donne de la légèreté, mais celle-là, voyez-vous, c’est une vraie confiture. » Et elle passe première. À la photo-finish. Une médaille d’or, c’est un supplément de 20 % de chiffre d’affaires. Voilà, Je me suis battu pour quelqu’un que je ne connais pas mais qui s’est donné du mal pour faire le mieux qu’il pouvait. Les autres aussi sans doute, mais celui-là m’a paru être un orfèvre qui s’inscrit dans la tradition, dans le vrai. La confiture qui entre dans le palais du bonheur.
Avec la terre, on ne triche pas. Les paysans et les éleveurs savent cela. Est-ce que les acheteurs de la grande distribution, au lieu de presser les prix, le savent aussi ?
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