Du lait de brebis bio en contre-saison Du lait de brebis bio en contre-saison
Isabelle et Yannick Choisit produisent du lait de brebis bio désaisonné à La Selve, en Aveyron, pour la laiterie Le Petit Basque.
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En 2014, lorsque Yannick Choisit a suivi, « un peu à reculons », une formation sur la production bio proposée par la chambre d’agriculture de l’Aveyron, il savait qu’il changerait de laiterie pour « sortir du système Société », la filiale du groupe Lactalis spécialisée dans le roquefort. Depuis trois générations, la famille Choisit lui livrait son lait de brebis et était même sélectionneur officiel de brebis lacaune pour la filière. « Mais il était impossible d’aller de l’avant avec cette entreprise, confie Yannick. Nous avions peu d’interlocuteurs. Pour savoir ce que proposait la concurrence, j’ai appelé plusieurs laiteries du Sud-Ouest. Il me semblait important de vérifier leur façon de travailler et le niveau de qualité proposé. Je jouais notre exploitation familiale. »
Conversion bio accélérée
C’est finalement pour l’entreprise Le Petit Basque, à Saint-Médard-d’Eyrans (Gironde), que Yannick a opté. « Lionel Vasselle, responsable des relations avec les producteurs, est passé nous voir, poursuit l’éleveur. Il nous a expliqué que l’entreprise avait besoin de peu de lait conventionnel, mais qu’elle recrutait en bio. Du coup, la formation à laquelle je m’étais inscrit s’est avérée utile ! »
Dès la première journée, Yannick est sorti convaincu. « J’ai visualisé ce que je devais faire, comment revenir aux fondamentaux de l’élevage. Le soir même, j’étais décidé à franchir le pas. » Une conversion accélérée, avec une première récolte de foin bio en mai 2016, lui a permis d’être certifié pour sa production de lait six mois plus tard, puis pour ses cultures en 2017. Le passage en bio s’est concrétisé par une meilleure valorisation du lait, ce qui a facilité l’installation d’Isabelle, l’épouse de Yannick, en mars 2018, juste après que sa mère Paulette a pris sa retraite. Alors technicienne ovine à la Confédération générale de roquefort, à Millau, Isabelle a choisi de travailler sur la ferme et de consacrer plus de temps à sa famille.
Pour répondre aux attentes du Petit Basque, qui ne travaille que du lait frais tout au long de l’année, Isabelle et Yannick ont désaisonné leur production. Dès le 15 mars, leurs 17 béliers sont installés à proximité des 500 brebis, afin de déclencher les chaleurs. La monte naturelle débute en avril et réussit dans 80 % des cas. Les mères agnellent début septembre, puis produisent d’octobre à mai, fournissant des volumes précoces à la laiterie, bien avant le pic de lait de la filière qui arrive en hiver. La production de l’exploitation, près de 1 500 hectolitres par an, n’a pas baissé avec le passage au bio. Et le prix net payé par la laiterie, environ 1,50 €/l, analyses comprises, au lieu de 0,93 €/l en conventionnel, est nettement plus intéressant, notamment parce que le lait est désaisonné. « Dans l’ancien système de la filière roquefort, on finissait une campagne laitière sans savoir combien on allait être payé, précisent Isabelle et Yannick. Aujourd’hui, Le Petit Basque nous fournit ses grilles de prix en juin pour l’année à venir, on peut se projeter. »
Du foin séché en grange
Les Choisit produisent également 850 à 950 agneaux par an, et gardent 160 agnelles pour le renouvellement. « En 2018, nous avons vendu 900 agneaux à l’organisation de producteurs OVI Plateau central. C’était une très bonne année », se félicitent-ils.
Le troupeau est maintenu à 500 brebis en production. Quand les jeunes arrivent, autant de réformes sont vendues à la criée sur le marché voisin de Réquista. Depuis quatre ans, les éleveurs pratiquent le pâturage tournant sur une vingtaine d’hectares, dès le mois d’avril. Les brebis mangent davantage qu’en bergerie. Ainsi, la lactation est maintenue jusqu’à mi-mai, et l’herbe est bien valorisée.
Le passage en bio a, par ailleurs, permis de construire une grange avec récupérateur de chaleur pour le séchage du foin, un vieux rêve de Gilbert, le père de Yannick. « Nous avons perdu en rendement sur les cultures de céréales bio, mais gagné en foin. Nous n’avions plus assez de place pour le rentrer, reconnaît Yannick. Finalement, quand j’ai démarré ma conversion, je n’étais pas sûr à 100 %. Mais, aujourd’hui, nous n’avons aucun regret. Et plusieurs fermes du voisinage ont elles aussi décidé de se lancer. »
Florence Jacquemoud
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