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Pratiquer l’agriculture de conservation des sols en bio

Pour lutter contre le ray-grass et le chardon, un mélange de trèfle/luzerne/lotier a été semé l'an passé sous sarrasin. Du petit épeautre a été semé en direct cet automne.

Mélanie Petit et son mari sèment des céréales, des lentilles et du sarrasin sous un couvert permanent composé de légumineuses.

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Dès son installation en 2008 sur 150 ha conduits en conventionnel, Mélanie Petit a eu à cœur de réduire le travail du sol et de diversifier l’assolement. « Je connaissais l’agriculture de conservation et ses bienfaits sur la vie biologique du sol notamment, et je voulais l’expérimenter », raconte-t-elle. Par ailleurs, les nombreux silex présents sur ses terres hétérogènes (en majorité argiles ou terres blanches) sont très usants pour le matériel. Seule la surface du sol est donc, parfois, travaillée.

Le sainfoin entre dans l'assolement

En 2011, la production de semences de sainfoin fait son entrée dans l’assolement. « C’était un gros chamboulement d’intégrer une légumineuse pluriannuelle dans une rotation colza/blé/orge classique dans la région », se souvient-elle. Les féveroles, le sarrasin et les pois viennent également allonger la rotation. En parallèle, elle suit plusieurs formations dont une sur les plantes bio indicatrices.

« Dans deux parcelles, il y avait des ronds d’éthuses qui m’inquiétaient. Quand j’ai appris qu’elles détoxifient les sols et dégradent notamment les matières actives phytosanitaires, j’ai pris conscience des limites du système conventionnel. À la naissance de ma fille en 2013, je me suis aussi intéressée de près à la qualité de notre alimentation. Je ne voulais plus manger ce que je produisais et me suis tournée vers le bio. La conversion a débuté en 2015 et des cultures destinées à l’alimentation humaine pour plus de rémunération (lentilles, diverses céréales…) ont intégré l’assolement. Mais maintenant que j’étais fâchée avec le travail du sol et les produits phytos, il fallait trouver des solutions, d’autant que j’avais de gros problèmes de ray-grass. »

Par ailleurs, l’agricultrice visait l’autonomie et souhaitait éviter le recours aux engrais extérieurs sur les 325 ha que compte désormais l’exploitation après la reprise de terres voisines et celles de la ferme familiale.

L'écimeuse de 12 m de largeur permet de calmer le couvert et éviter la montée à graines des adventices. ( © Florence Melix)

Trèfle et luzerne

Les légumineuses, semées en couvert, répondent à ces défis. En installant du trèfle au printemps sous tournesol, cela étouffe le ray-grass. La luzerne, aux racines plus profondes que le trèfle, semée seulement à 8 kg/ha en 2015, étouffe les chardons apparus lors de la conversion, sans trop concurrencer les céréales. « Au départ, pour éviter que la luzerne ne prenne le dessus sur la céréale, on la scalpait avec un Treffler mais cela, au contraire, la boostait, se souvient Mélanie qui travaille avec son mari sur l’exploitation.

Avant, on en avait peur, maintenant on a appris à la connaître, à vivre ensemble. » À la moisson, le couvert et la céréale sont avalés en même temps et ventilés à froid sur d’anciens séchoirs à maïs « pour éviter que le mélange ne chauffe s’il y a trop de vert. Mais les capacités des séchoirs étant réduites, on envisage de récolter en andain pour que le mélange sèche au champ avant de le moissonner. »

Pas de recette

Sur l’exploitation, il n’y a pas de rotation type. Cette année, après du sarrasin, le petit épeautre a été semé en direct sur un couvert trèfle/luzerne/lotier. Avant que la céréale n’épie, un écimage du couvert a été réalisé. « L’objectif sur cette parcelle est de ne plus travailler le sol et de laisser le couvert se resemer pour densifier la couverture afin de concurrencer les adventices », précise Mélanie. Sur une autre parcelle, de la lentille a été semée en avril sur un couvert de luzerne. « Avant le semis, on a réalisé un déchaumage à disque puis un scalpage avec le Treffler. On voudrait arrêter de scalper mais le couvert était trop clair et les adventices risquaient de se développer. »

« Avant, on avait peur de la luzerne, maintenant on a appris à vivre ensemble. »

Les itinéraires techniques sont en perpétuelle évolution. La préparation présemis, la densité des espèces au sein des mélanges de couvert et sa gestion pendant la culture restent à caler. « Nous allons aussi tester le semis de switchgrass sous culture d’hiver », précise l’agricultrice.

Si les rendements sont encore assez faibles (25 q/ha en avoine blanche, 20 q/ha en grand épeautre, 15 q/ha en blé ancien, 10 q/ha en petit épeautre, 7 q/ha en sarrasin, 2 q/ha en lentilles triées…), ils devraient progresser avec le temps. Économiquement, les charges étant réduites (semis direct ou un passage de scalpeur puis un à deux passages d’écimeuse si nécessaire, semences de ferme privilégiées), le couple parvient à se rémunérer convenablement. « On a encore beaucoup à apprendre et à faire pour améliorer la fertilité des sols, mais on y travaille ! »

Des itinéraires techniques au cas par cas

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