Allonger la rotation pour un système bio durable
Pour Bertrand Bacle, réussir et pérenniser l’agriculture biologique sur l’exploitation familiale passait obligatoirement par l’allongement de la rotation.
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Installé en janvier 2022 sur l’exploitation familiale, Bertrand Bacle dispose d’un parcellaire groupé incluant un tiers de limon de plateaux, et deux tiers de terres argilo-calcaires dont la moitié est en pente. Il explique « après 25 ans de conduite sans labour et une rotation colza-blé-orge sur trois à quatre ans, j’avais le sentiment que le système était à bout. Nous avions notamment des problèmes de ray grass et vulpins résistants. »
Dans ce contexte, la conversion de l’exploitation est engagée sur deux tiers de la surface par son père en 2018. Le reste de l’exploitation suit en 2020. « Avec un salissement important, l’allongement de la rotation était incontournable » souligne l’agriculteur. Le cycle dure à présent sept ans dont deux années de luzerne, un blé puis une céréale avant un mélange protéagineux/céréales. Il se termine sur un deuxième blé et une dernière céréale. Dans son système, les pailles sont broyées ou reviennent sous forme de fumier de son élevage de porc.
La luzerne socle de la rotation
« Je recherche une qualité et une valorisation maximale pour mes blés et à commercialiser en direct auprès de moulins », indique Bertrand Bacle. Il vend ses autres productions à une usine d’aliment située à cinq kilomètres de l’exploitation où il s’approvisionne également pour son atelier d’engraissement de 750 porcs en bio par an.
La luzerne constitue le socle de sa rotation. Il précise : « je la considère comme une culture à part entière même si c’est celle qui rapporte le moins ». Il mise en effet sur ses effets structurants, nettoyants et de captation de l’azote. Elle est semée au plus tôt après un labour. 100 kg de kiesérite (50 % SO3 et 25 % MgO) sont apportés chaque année. La luzerne est désherbée au vibroculteur ou à la herse plate pendant l’hiver puis fauchée ou enrubannée pour être distribuée aux porcs voire vendue. Bertrand Bacle annonce « en 2024, je vais ensiler avec notre Cuma pour réduire les coûts. Le produit sera distribué aux animaux ou épandu sur les cultures pour la fertilisation. »
Après plusieurs passages de cover crop et déchaumeurs à ailettes pour la détruire, le semis de variétés de blé productives suit le labour autour du 20 octobre. Suite à leur récolte, il implante le plus souvent un triticale après un déchaumage. « Mais après sa moisson, je dois le plus souvent labourer à nouveau » note l’agriculteur. Il implante ensuite environ 10 hectares en mélange féverole blé et autant en pois et orge d’hiver. Le percheron ajoute : « assez déçu par les 25 quintaux obtenus avec les pois d’hiver dont l’effet étouffant me semble insuffisant, je tente cette année un mélange pois de printemps et orge de printemps. Cela me permet de couper le cycle de cultures d’hiver ».
Sur le blé suivant, il mise cette fois sur des variétés typées qualité et retarde au maximum leur semis afin de maximiser les repousses de protéagineux avant leur destruction. Après un apport de 20 à 30 t de fumier de porc, la rotation se termine sur une orge d’hiver ou de printemps autant que possible brassicole. Dans le cas d’un semis au printemps, il implante une interculture de trèfle incarnat. Insatisfait de la valorisation des orges, Bertrand Bacle annonce « je tente en 2024 un blé de printemps ».
Une volonté d’autonomie
Lors de la conversion, l’exploitation a investi 30 000 euros dans du matériel d’occasion : un trieur à céréales, une houe rotative (ou écroûteuse), une herse étrille, une écimeuse, une bineuse. Equipée d’un guidage caméra, cette dernière est notamment utilisée pour le blé. L’exploitant évalue la consommation de fuel à 80-90 l/ha. Il considère qu’elle n’a pas explosé car la luzerne est en place deux ans, et que le désherbage mécanique consomme peu. Par ailleurs, il estime que « ce changement représente 20 % de temps de travail en plus mais celui-ci est plus étalé »
Du côté des adventices, une nouvelle flore apparaît sur l’exploitation. Bertrand Bacle conclut « la folle avoine pourrait me contraindre à implanter des cultures d’été. Le coquelicot est aussi à surveiller ».
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