Agriculteur inventeur « J’ai modifié mon tracteur pour l’adapter au binage et à la manutention »

Fabriquer un capot plongeant à partir d’un capot droit, c’est l’idée que Joël Llorens a concrétisée en 2012. « Quand on constate une pénibilité, il faut savoir s’adapter », explique l’agriculteur d’Astaffort, dans le Lot-et-Garonne. Dans une optique de binage et de manutention, il a réorganisé certains éléments du moteur de son vieux Same Explorer 80 et modifié le capot pour gagner en visibilité. Il a aussi ajouté un attelage frontal sur ce tracteur de 80 ch qui n’en possédait pas.

Moteur refroidi à l’air

« J’ai pu le faire assez facilement parce que c’est un moteur refroidi à l’air, souligne Joël. Sur un modèle refroidi à l’eau, cela n’aurait pas été impossible mais plus compliqué. » Avec un peu d’ingéniosité, il a changé l’emplacement de certains éléments situés sous le capot. Le filtre à gasoil a ainsi été baissé, et le filtre à huile légèrement modifié et déplacé également vers le bas. « Pour le filtre à air, je l’ai directement sorti de dessous le capot, explique l’agriculteur. J’ai ajouté un coude pour le placer latéralement. » Tout le reste a été surbaissé au maximum. « Pour finir, je me suis improvisé tôlier », sourit Joël. Il a ainsi fabriqué lui-même de nouvelles parties latérales et avant en tôle grillagée pour avoir un capot plongeant­.

Aucune casse en dix ans

L’évolution qui allait de pair avec ces modifications était l’ajout d’un relevage avant. Pour ce faire, Joël a récupéré cette pièce dans une casse de tracteurs de la région. « La partie la plus compliquée a été de façonner les longerons en acier », glisse-t-il. Ces pièces assurent la répartition des contraintes sur le châssis. « Si j’avais simplement installé le relevage sans réfléchir à cela, j’aurais pu briser la partie avant du tracteur. » Joël a découpé à la disqueuse de grandes pièces d’acier pour cette réalisation. « Ça aurait été plus facile si j’avais eu un chalumeau, précise-t-il. Mais j’ai réussi à m’en sortir et, depuis dix ans, il n’y a eu aucune casse. »

Ces deux longerons sont fixés sur l’emplacement prévu pour les supports de chargeurs frontaux. « Ainsi, je n’ai pas eu à modifier le châssis du tracteur, ni même à le percer, souligne Joël. Une fois ces renforts installés, il ne restait plus qu’à s’occuper de l’hydraulique, la partie la plus facile. » Il a couplé les deux vérins du relevage à un flexible. Celui-ci passe sous la cabine et se branche directement sur une prise hydraulique à l’arrière du tracteur. « Pour l’usage que j’en ai, du simple effet suffit, indique l’exploitant. J’aurais pu pousser plus loin et mettre un troisième point hydraulique pour le bennage et le cavage, mais je n’en avais pas l’utilité. »

Environ 500 euros

Ces modifications trouvent une utilité quotidienne dans l’exploitation du Sud-Ouest. « Je suis en bio depuis 2000. Il y a quelques années, les matériels de pointe pour le désherbage mécanique étaient peu développés ou inaccessibles. J’ai donc réfléchi à une autre solution pour le désherbage des céréales. Je me suis alors tourné vers une bineuse frontale », explique Joël. En dehors du temps qu’il y a consacré, les modifications lui ont coûté environ 500 euros.

Il en a aussi fait un outil de manutention grâce à une fourche à palettes, très utile pour les palox de melons notamment. Maintenant, le Same sert principalement à cet usage. En effet, il ne bine plus que les betteraves porte-graines. L’ancienne bineuse a été remplacée par une nouvelle, trop lourde pour l’Explorer de 80 ch. Un tracteur de 105 ch plus récent s’occupe de cette tâche. Il est équipé de série d’un relevage avant, « mais la visibilité est nettement moins bonne », remarque l’agriculteur, qui transmet aujourd’hui l’exploitation à son fils.

Gildas Baron

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