En Algérie, une récolte céréalière entourée de flou
Le pays tente de rattraper son important retard sur les statistiques agricoles.
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En Algérie, les pouvoirs publics viennent d’annoncer des récoltes céréalières en forte hausse pour la saison en cours, devant dépasser le niveau de 3 millions de tonnes de l’an dernier. Néanmoins, ces prévisions, établies à la fin de mai, sont sujettes à discussion, compte tenu de la défaillance du système des statistiques économiques du pays, notamment dans le secteur agricole.
C’est pourquoi le 19 mai dernier, le ministère de l’Agriculture a lancé le troisième recensement général de l’agriculture (RGA), considéré comme étant « un mécanisme essentiel pour connaître les capacités nationales et identifier les besoins afin de prendre les bonnes décisions sur la base de données scientifiques exactes ».
Un dernier recensement vieux de 23 ans
En attendant les résultats de ce nouvel inventaire, que les autorités souhaitent exhaustif, les politiques de développement des filières, l’analyse des capacités de production et des besoins ou les bilans prévisionnels sont établis sur la base des données issues du deuxième RGA, réalisé en 2001. Cela représente un inconvénient compte tenu du décalage entre ces données et l’état des lieux réel d’un secteur qui a subi d’importants changements durant cette période de 23 ans.
Le chef de l’État algérien, lui-même, a soulevé cette problématique lors des Assises de l’agriculture organisées en février 2023, en déclarant que « l’État qui veut s’ériger en puissance économique, voire agricole, doit disposer de chiffres précis ». Or, citant le cas de la céréaliculture, il a fait remarquer que « la superficie des terres cultivées à travers le pays était évaluée, alors, à 3 millions d’hectares, mais les enquêtes menées sur le terrain ont démontré que ce chiffre ne dépassait pas 1,8 million d’hectares ».
Rendements de 1,6 à 2 t/ha dans le Nord
Le rapport intitulé « Qualité des statistiques agricoles dans les pays du sud et de l’est de la Méditerranée », élaboré par l’Adetef (assistance au développement des échanges en technologies économiques et financières) pour la coopération statistique euroméditerranéenne Medstat III, souligne à juste titre que « les données sur les stocks des cultures principales sont disponibles pour tous les pays méditerranéens, sauf l’Algérie, le Liban et la Palestine ».
C’est donc dans un tel flou que s’effectue la campagne de récolte en cours, qui va se poursuivre jusqu’à la mi-juillet. Sur le terrain, les rendements obtenus dans les périmètres céréaliers du Sahara, exclusivement irrigués, ont atteint en moyenne 5 t/ha. Dans le Nord, où se concentrent 85 à 90 % de la sole céréalière et où les cultures sont pluviales dans leur quasi-totalité, des témoignages d’agriculteurs sont en revanche moins optimistes, avec des rendements de 1,6 à 2 t/ha seulement.
Paradoxalement, en pleine campagne de récolte, des traders sur le marché international ont révélé au début de juin un nouvel appel d’offres lancé par l’Algérie pour l’acquisition de 800 000 tonnes de blé tendre pour une livraison le 15 août prochain. Cela traduit les incertitudes qui planent sur la production locale malgré les prévisions enthousiastes des autorités.
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