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Uruguay « J’ai abandonné le soja pour revenir à l’élevage »

Luis Rodriguez nourrit ses 250 bovins avec ses 300 hectares de prairies dans le sud de l’Uruguay. © DR

Luis Rodriguez, exploitant près de Colonia dans le sud de l’Uruguay a converti ses champs de soja, devenus trop peu rentables, en prairies permanentes.

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Selon les critères locaux, il est un petit exploitant, mais Luis Rodriguez cultive près 500 hectares. Son exploitation se trouve près de Miguelete, au bord du fleuve San Juan, dans le sud de l’Urguay. Le blé occupe 200 hectares et le reste est constitué de prairies.

Luis possède également un troupeau de 250 bovins, vendus en taurillons à destination de l’Union européenne. « En ce moment, j’ai 170 bêtes de 450 kg environ, qui vont partir cette année, et le reste sont des animaux encore petits. » Il privilégie les races nordiques, comme les angus et les herefords.

Luis au milieu de son troupeau. © DR

À la différence de ses voisins argentins, Luis réalise tous les travaux sur son exploitation avec l’aide de deux salariés, sans faire appel à des prestataires de services agricoles.

Une conversion récente à l’élevage

Auparavant, le soja occupait toute la surface de l’exploitation. Mais à l’été de 2015, lorsque la graine passe sous la barre des 400 $/t (345 €), Luis décide d’abandonner définitivement cette production. Avec un coût d’implantation estimé à 600 $ (517 €), et des rendements moyens entre 2 et 2,5 t/ha, la culture était devenue trop risquée. « Ici, les coûts sont très élevés, et nous sommes dépendants des cours. » En Uruguay, les terres sont plutôt pauvres, et elles ne permettent pas d’atteindre les rendements des champions argentins.

Or, comme le soja le conduisait à semer des dérobées afin de protéger les sols des orages, Luis avait déjà l’habitude des prairies temporaires. Il décide alors de remplacer le soja par du ray-grass et du trèfle, et d’acheter plusieurs centaines de têtes de bétail.

Dans ses prairies, en plus des espèces semées les premières années, Luis ajoute aujourd’hui du lotier, qui, selon lui, « dure plus longtemps ». Durable et résistant à la sécheresse, Luis considère par ailleurs le lotier plus adapté à son exploitation, puisqu’il limite le risque de météorisation. Avec une telle surface, impossible en effet pour l’exploitant de surveiller le bétail et de détecter les premiers signes de gonflement.

Un système étendu et simplifié

Pour l’engraissement, l’exploitant mise désormais sur le tout herbe. « On ne complémente plus, explique-t-il, parce que les bénéfices sont absorbés par le coût du gasoil. Sur 500 hectares, le transport des céréales demande beaucoup de manutentions. » Les animaux restent par ailleurs dehors toute l’année : aucun bâtiment n’a été construit.

« J’essaye de garder les prairies le plus longtemps possible », explique Luis. Au-delà de leur valeur pour l’engraissement du bétail, les prairies conservées six, voire dix ans, représentent pour lui un important poste d’économie. « Avec la hausse des prix du carburant, rappelle-t-il, semer un hectare de prairie tous les deux ou trois ans est devenu trop cher pour moi ».

Les Uruguayens se détournent des grandes cultures

Comme le soja, le blé semble lui aussi en baisse de toutes parts dans le pays. « Le coût d’implantation d’un hectare est d’environ 500 $ dollar (431 €) », estime Luis. Avec une tonne de blé payée aux alentours de 160 € aux exploitants, les rendements doivent demeurer, selon lui, supérieurs à 3,5 t/ha pour que la culture soit rentable.

Luis dans son champ de blé. © DR

« De plus en plus de mes voisins sèment le colza au lieu du blé », explique l’agriculteur. Mais la culture est complexe, et beaucoup se tournent alors comme lui vers le bétail. « Il y a un risque plus faible, et le capital ne fait qu’augmenter. »

Avec un kilo de carcasse payé aux alentours de 3,15 $/kg (2,6 €), « un animal me rapporte 900 $ (777 €) environ », confie l’exploitant. En Argentine, la tendance est la même. « Chez eux, toutes les zones de sols de moyenne qualité sont en train de se convertir à l’élevage aussi. »

Une campagne de 2018 au beau fixe pour le blé

C’est encore le printemps en Uruguay, et le blé, semé en avril, ne sera récolté qu’en décembre. Pour Luis, les perspectives actuellement sont plutôt bonnes. « L’hiver a été très froid, mais les pluies n’ont pas été trop importantes, et nous n’avons pas fait trop de traitements ».

Il s’agit, cependant, de rester vigilant. Les dernières pluies, notamment, ont été plus fortes que prévues. « Chez nous, le grand problème, ce sont les tornades. S’il y a une saison de Niño, la campagne peut devenir très difficile ». Avec des excès de vents et de pluie, les cultures pourraient alors devenir vulnérables aux maladies.

Toutefois, si les conditions se maintiennent, le bilan économique devrait être positif pour l’exploitant. « On sera à au moins à 4 t/ha, ce qui nous fait revenu de 800 $ (690 €)/ha. » Avec, au total, un bénéfice qui devrait s’élever à près de 45 000 € sur les 200 hectares semés.

Ivan Logvenoff

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