Artificialisation des sols La loi biodiversité, une promesse sans effet
Votée en 2016, la loi biodiversité peine à remplir ses objectifs selon le Cese. Elle ne réussit pas à freiner l’urbanisation des espaces naturels et agricoles.
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Promulguée il y a 4 ans, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages fait un flop selon .l’avis du Conseil économique social et environnemental (Cese) rendu le 23 septembre 2020. Le Cese constate, « que non seulement la « reconquête » n’est pas amorcée mais qu’au contraire le déclin se poursuit ». Les outils créés par la loi demeurant « largement virtuels » mis à part la mise en place de l’Agence française pour la biodiversité, devenue l’Office français de la biodiversité au 1er janvier 2020.
« Variable d’ajustement »
Identifiée comme l’une des causes de l’érosion de la biodiversité, l’artificialisation des sols reste « mal maîtrisée ». Selon les derniers chiffres de la FNSafer 30 900 hectares ont été urbanisés en 2019, le niveau le plus bas des quatre dernières années. « Dans tous les cas, les espaces naturels, agricoles et forestiers apparaissent souvent comme une variable d’ajustement de l’extension urbaine et non comme des espaces à protéger et valoriser », interpelle le rapport du Cese signé par Allain Bougrain Dubourg, le président de la LPO et Pascal Ferey, agriculteur dans la Manche et secrétaire adjoint de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA).
Des réglementations en faveur du bétonnage
Pire, les outils réglementaires mobilisés par les pouvoirs publics tendraient même à amplifier l’artificialisation des sols. Le Cese pointe notamment du doigt les outils de planification de l’urbanisme à la disposition des collectivités territoriales comme les Sraddet » (1). Ces documents « ne comportent aucune disposition chiffrée et contraignante en matière d’artificialisation ».
« Ils sont en effets négociés par les élus, qui souvent ne souhaitent pas être contraints pour leurs documents d’urbanisme », explique le rapport. « Dans la mesure où les maires ou les présidents d’intercommunalité sont seuls compétents pour déterminer l’utilisation des sols à la parcelle [NDLR : en élaborant leurs Plan locaux d’urbanisme communaux ou intercommunaux], ils se font souvent concurrence pour attirer les entreprises (par des zones d’activités économiques) sur leur territoire, ce qui augmente l’artificialisation des sols », constate le Cese.
Les deux rapporteurs observent également des effets pervers de certains outils économiques et fiscaux. L’impôt applicable au foncier non bâti établi par rapport au rendement des terrains inciterait leurs propriétaires « à les vendre comme terrains à bâtir au lieu de les maintenir naturels ou agricoles ». Les mesures de soutien au logement, comme le prêt à taux zéro, contribueraient également à accentuer l’artificialisation des sols en soutenant la construction de l’habitat neuf.
« Alléger l’impôt sur le foncier non bâti »
Pour remédier à ces écueils, la Cese recommande que l’objectif « zéro artificialisation nette » du Plan biodiversité de 2018 puisse être atteint en le réorientant vers la massification du tissu urbain par la réutilisation en priorité du foncier déjà artificialisé et en densifiant le bâti.
Pour y arriver, le rapport propose que les documents d’urbanisme intègrent des objectifs chiffrés d’artificialisation contrôlés par le préfet et le juge administratif. L’autre piste mise sur la table est d’augmenter le coût de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers par une note fiscale plus salée et d’alléger l’impôt sur le foncier non bâti.
Alexis Marcotte(1) Schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires
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