Pousse de l’herbe S’adapter sans cesse
La production des prairies a démarré tôt ce printemps. Ralentie par le gel en avril, elle a repris fin mai mais reste conditionnée par la pluviométrie.
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Le thermomètre fait le Yo-Yo depuis le début de l’année, parfois au sein d’une même journée. Cela a rendu la gestion de l’herbe délicate. Actuellement, les dernières pluies maintiennent la pousse.
Dans le nord du Massif central, « les situations sont hétérogènes, constate Pascale Pelletier, consultante en prairies et fourrages. Ceux qui pratiquent le pâturage tournant ont conservé suffisamment de jours de pâturage d’avance pour ne pas distribuer de fourrages ou entamer les parcelles initialement prévues pour réaliser des stocks. »
Ce n’est pas le cas du Ciirpo (Centre interrégional d’information et de recherche en production ovine), au Mourier, près de Limoges (Haute-Vienne). La pluviométrie au cours des cinq premiers mois de l’année a été catastrophique, avec 328 mm. En 2016, elle était presque deux fois plus élevée, avec 618 mm. « Les relevés du mois d’avril ont été particulièrement déficitaires, souligne Laurence Sagot, du Ciirpo-Institut de l’élevage. Nous n’avons enregistré que 42 mm de pluie pour le mois, contre 120 mm l’année dernière. » Autre phénomène perturbateur, la chute des températures. « Les 20 et 21 avril, le thermomètre est descendu à -7 °C, ajoute-t-elle. Sur le mois d’avril, la moyenne des températures minimum affiche 0°C. »
Sevrage précoce
La ferme expérimentale Arvalis de Saint-Hilaire-en-Woëvre, dans la Meuse, a connu les mêmes problèmes. « Nous enregistrons 60 % de rendement en moins pour les fauches précoces », constate Didier Deleau, de la ferme expérimentale. Le manque d’eau est en cause. Tous les mois sont déficitaires par rapport à la moyenne. « En mai, il a plu 30 mm, contre 55 mm en moyenne, indique-t-il. La quantité est tombée en dix fois, les fortes chaleurs sont apparues dès le 17 mai (29 °C) et se poursuivent. Des stratégies d’adaptation sont en cours de réflexion. Elles passent par la mise en place de dérobées : mélanges céréales × protéagineux ou RGI × trèfle incarnat. « Nous allons vraisemblablement sevrer les broutards plus tôt, dès le début du mois de juillet, pour limiter les besoins des mères, comme nous l’avions déjà fait en 2015 », ajoute-t-il. Le recours à la paille pourrait s’avérer compliqué cette année car les céréales semblent courtes.
La ferme expérimentale Arvalis des Bordes, à Jeu-les-Bois (Indre), a également procédé à de nombreux ajustements. Dès le printemps, la sortie a été précoce : quinze jours avant la date habituelle, aussi bien pour le troupeau conduit en conventionnel que celui en bio. « Les sols de l’exploitation sont plutôt hydromorphes mais, en raison de l’hiver sec, le déprimage a débuté dès la mi-mars, explique Rémi Brochier, ingénieur régional fourrages de la ferme. Fin avril, les conditions atypiques, combinant sécheresse, froid et fortes amplitudes thermiques, ont fait peur. L’impact sur les prairies a été très limité. La résistance des graminées est importante face au froid, même lorsque la végétation est déjà active, comme ce fut le cas fin avril. Le retour des pluies a permis de lever les carences induites en azote et en phosphore pour les plantes fourragères. » Les récoltes d’enrubannées ont bénéficié de quelques fenêtres de beau temps. Les foins aussi. Les tonnages sont un peu faibles mais, si les pluies sont au rendez-vous, les deuxièmes coupes rattraperont éventuellement la situation.
A la ferme expérimentale de La Jaillère, en Loire-Atlantique, comme sur les autres sites Arvalis, « la pousse a eu lieu par à-coups, indique Anthony Uijttewaal, ingénieur fourrages. L’avance enregistrée en mars a rapidement été gommée par les gelées de la fin du mois d’avril. Néanmoins, les premiers foins réalisés le 26 mai sont de bonne qualité. » Le rendement atteint 4,3 t de MS/ha.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, les premiers foins ont été récoltés dès la mi-avril. « Nous n’avions jamais connu une telle précocité, souligne Maryvonne Lagaronne, présidente de la commission herbe et fourrages du département. La qualité est au rendez-vous mais pas la quantité. Il manque au moins la moitié de matière sèche. » Il y a peu de chance que le déficit se reconstitue avant la fin de l’hiver car les réserves du sol en eau sont très peu pourvues. « Des dérobées comme le moha, le millet ou le sorgho peuvent encore être mises en place », souligne-t-elle.
La pousse a été précoce dans le Rhône. « Certains ont récolté deux coupes d’ensilage, l’une au 10 avril et l’autre un mois plus tard, indique Mickaël Coquard, conseiller fourrages au contrôle laitier. Au final, les rendements atteignent 4, voire 5 t de MS/ha. Tout le monde n’a pas adopté cette stratégie. Certains exploitants n’ont pas risqué une deuxième coupe, pour ne pas pénaliser l’implantation du maïs. » Le démarrage de celui-ci semble, avec les dernières pluies, assez satisfaisant.
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