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C’est son avis « Avant de produire plus,mettre un terme au gaspillage »

Moez El Shohdi (1) est le cofondateur et le président d’Egyptian Food Bank. Il a développé un nouveau modèle de banque alimentaire, destiné à lutter contre la malnutrition, reconnu par la FAO et implanté dans dix-sept pays.

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Le caritatif géré comme une entreprise

Il est possible de nourrir toute la planète et d’éradiquer la malnutrition d’ici à 2020 en mettant un terme au gaspillage. À l’échelle mondiale, 43 % de la production de céréales et 64 % des fruits et légumes sont perdus, alors que la faim frappe 14 % de la population.

En Égypte, les guerres et les accidents climatiques nous ont amenés à réfléchir à un nouveau concept pour lutter contre la malnutrition. Avec un groupe d’hommes d’affaires, nous avons créé une fondation à but non lucratif, pour soutenir un nouveau modèle de banque alimentaire. Pas question de distribuer des gâteaux secs dans les écoles. Nous avons pensé le projet comme une entreprise et nous avons cherché des solutions qui sortent du cadre traditionnel, en tissant des partenariats avec tous les acteurs de la société.

Les mères travaillent

Nous sommes partis du principe que les personnes qui ont faim sont capables de travailler. Nous avons construit des cuisines intégrées aux écoles et nous avons organisé un concours de cuisine entre les mamans. Ce système permet aux élèves de bénéficier d’un repas chaud et diversifié, et à leurs mères, de travailler.

Nous avons noué des partenariats, à travers le monde, avec de nombreux hôtels qui proposent des buffets à volonté. En diminuant le diamètre des assiettes de 33 à 27 cm, le gaspillage a été réduit de 32 % ! Les restes de nourriture sont transformés pour l’alimentation animale.

Pas besoin de foncier

Pour ce qui est de l’agriculture, nous travaillons en direct avec les paysans. Grâce à la suppression des intermédiaires, leur revenu a augmenté de 80 %. Nous avons développé des moyens de production pour les familles. Avec un support vertical, qui permet de cultiver 600 plantes, chacun peut produire de la nourriture, pas besoin de foncier pour faire pousser des plantes. Un millier de familles en bénéficient en Égypte. Pour pérenniser le système, nous avons investi dans trois fermes d’élevage et des usines de transformation de viande et de légumes. Nous ne nous contentons pas de nourrir les plus nécessiteux. Leur environnement, leur éducation comptent également. Aujourd’hui, les manuels scolaires égyptiens incluent une leçon sur le gaspillage.

240 000 familles nourries

Notre initiative égyptienne, débutée en 2005, a trouvé un écho planétaire grâce à l’appui de l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en 2010. C’est une expertise qui peut s’appliquer à tous les pays, y compris à la France.

En 2006, nous avons nourri 10 000 familles. Neuf ans plus tard, nous en sommes à 240 000. 16 millions de restaurants et d’hôtels appliquent nos recommandations. Nous avons ainsi levé et investi plus d’un milliard de dollars en 2014. Fin 2016, nous devrions compter 30 banques alimentaires dans le monde. La preuve que tout est possible.

Aude Richard

(1) Rencontré en marge de l’Open agri-food. Sandrine Rigaud en a assuré la traduction

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