C’est son avis « Nous visons l’autarcie énergétique pour 2030 »
Thierry Lagoda est le bourgmestre (1) de Beckerich, commune de 2 200 habitants au Luxembourg, située à 30 km de la capitale et typiquement rurale. Il prône le développement des énergies renouvelables.
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Énergie verte
C’est sous l’impulsion du bourgmestre précédent, Camille Gira, aujourd’hui secrétaire d’État au développement durable, que notre commune s’est lancée au début des années 2000 dans un programme « Énergie verte ». Avec pour objectif principal de réduire la consommation en électricité et en chaleur des bâtiments communaux et des maisons individuelles. Notre ambition : être autonomes du point de vue énergétique d’ici une quinzaine d’années.
Avec 19 agriculteurs
La méthanisation est le premier pilier de cette démarche. Dix-neuf agriculteurs de la commune ont fondé une coopérative, « Biogas Biekerich », qui a construit et gère une installation d’une puissance de 250 kWh, produisant électricité et eau chaude. L’électricité est vendue au réseau électrique national. Nous achetons la chaleur produite et la redistribuons grâce à notre réseau de chauffage urbain. Sur les six derniers mois, nous avons acheté cette chaleur 0,023 € du kilowatt pour la revendre en moyenne 0,07 €. Un tarif variable, indexé sur les prix à la consommation et les cours du pétrole.
Pour faire face à la demande de raccordement, nous avons ensuite investi dans une chaudière à copeaux de bois. Son coût est de 2,3 millions d’euros (M€), financé pour un tiers par le ministère de l’Environnement. Le taux de raccordement des foyers pour notre chauffage urbain avoisine les 90 %. Ceux-ci n’ont pas besoin de s’équiper d’une chaudière spécifique. La commune possède un parc de stations de transfert (un échangeur pour l’eau sanitaire et un autre pour l’eau de chauffage) que nous louons aux habitants.
Une démarche idéaliste
Nous avons également mis en place un système novateur pour le photovoltaïque : les habitants ne possédant pas une toiture adaptée peuvent acheter des parts, calculées en termes de puissance, dans une installation dite en copropriété. Les toits des bâtiments communaux sont aussi mis gratuitement à la disposition des personnes intéressées.
Nous ne nions pas un certain idéalisme dans la démarche, l’objectif étant de démontrer qu’on peut tendre vers une réelle autonomie énergétique. Le modèle est transposable (2), même partiellement, à d’autres communes rurales de taille moyenne, sous réserve qu’il fonctionne en « circuit court » avec des exploitations agricoles proches, etc. Avec bien sûr une vraie volonté politique et beaucoup de communication. Nous sommes reconnus nationalement, et chez nos voisins (2) pour notre initiative. La diminution des émissions de CO2 a été estimée à 40 % entre 2009 et 2013. Mais le budget de notre commune est serré. Et il n’y a pas eu d’augmentation des impôts locaux. Nous devons faire des choix : d’autres projets ont été reportés. « Biogas Biekerich », a bénéficié d’une subvention de l’État de 47 %, pour un coût total de 4 M€, sans quoi le projet n’était pas tenable économiquement. Son temps de retour sur investissement est de 14 ans. Pour la commune, la durée d’amortissement de nos équipements liés à l’autarcie énergétique est de 40 ans.
(1) L’équivalent d’un maire français
(2) Beckerich organise des visites de ses installations, possibles en français. Une dizaine de communes ou intercommunalités françaises le font chaque année : www.dmillen.lu, contact : Isabelle Bernard.
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