1. Une petite ferme à l'épreuve de la Pa 1. Une petite ferme à l'épreuve de la Pac
La réforme de la Pac ne remplira pas forcément sa promesse de compenser les handicaps naturels. Au Pays basque, Peio Bereterbide va devoir s'adapter.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
« L'ICHN, indemnité compensatoire de handicap naturel, représente aujourd'hui la moitié de mes aides Pac. Après la réforme, malgré une revalorisation, elle risque de ne pas compenser la baisse des autres soutiens », craint Peio Bereterbide. A Uhart-Cize, sur les hauteurs de Saint-Jean-Pied-de-Port au Pays basque, l'éleveur et sa fille, Sandrine, 31 ans, installée en 2006, devront adapter leur exploitation de 20 ha aux nouvelles règles de la Pac.
- Avec un troupeau de 321 têtes, l'élevage ovin-lait est leur principale activité. Mais pas de marge de manoeuvre de ce côté-là : augmenter le cheptel pour « gagner » des aides (majoration de 1,90 €/tête du paiement de base de 17 €, jusqu'à 500 brebis) ou changer de race pour améliorer la productivité est inenvisageable. D'abord parce qu'ils sont convaincus de l'utilité d'une petite agriculture familiale (1) en Pays basque : dans la région, la SAU moyenne est de 28 ha, quand elle atteint au niveau national 48 ha en montagne et 56 ha hors montagne. Et parce qu'ils travaillent sous le cahier des charges de l'AOP fromage Ossau-Iraty : race locale, 240 jours de pâture (transhumance de mai à octobre), fourrages « grossiers » (pâture, foin, regain, luzerne brins long), traite de décembre et août... Peu productive avec un système d'agnelage à deux ans (18 000 litres avec 165 brebis à la traite), la race manech tête noire est aussi la mieux adaptée aux pluies abondantes et aux fortes pentes de ce coin des Pyrénées. Chez Peio, les parcelles ont en moyenne 30 à 45 % de pente.
PRÉSERVER L'ÉQUILIBRE D'UN SYSTÈME VERTUEUX
- Le Gaec père-fille élève aussi quinze blondes d'Aquitaine. Une seconde production essentielle pour ces fermes aux faibles surfaces : « Les vaches valorisent les ressources laissées par les brebis, comme les fougères pour les litières. C'est aussi une entrée d'argent sûre », témoigne Peio. Le système, cohérent du point de vue de l'environnement, de l'économie comme du territoire (les aliments achetés à l'extérieur viennent de la vallée) est remis en cause par la réforme de la Pac. L'aide au bovin allaitant (ABA), qui remplace la PMTVA, impose un nouveau seuil d'éligibilité de dix vaches (les génisses ne sont plus éligibles). Peio n'a que six mères. Dans le département, ils sont environ 1 600 à être écartés de l'ABA (dont 600 déjà exclus de la PMTVA). Avec cinq génisses qui doivent vêler d'ici à la fin de l'année, il espère bénéficier en 2016 d'une dotation de droits par la réserve. Mais ce sera toujours une année d'aides perdue.
- L'éleveur perd aussi des surfaces éligibles aux aides découplées. Deux hectares de pâturage sont « déclassés » malgré leur fonction agricole (landes à fougères fauchées, châtaigneraies et chênaies...).
Autre règle couperet : les surfaces recouvertes en ligneux sont retenues à condition d'être comestibles et accessibles aux animaux. Un « prorata » est appliqué pour retirer de manière forfaitaire les surfaces non admissibles diffuses (0, 35, 60, 80 ou 100 % de surfaces admissibles). Dans certains départements, les exploitations perdent en moyenne 20 % de surface (lire page 58) ! Peio n'a pas encore fait ses calculs mais le bilan risque d'être lourd pour une exploitation de 94 000 € de chiffre d'affaires annuel, dont 80 % des pâturages sont en sous-bois. D'autant que la part des aides à l'investissement diminue aussi dans le nouveau programme de développement rural aquitain. « Pour le matériel, elle passe de 40 à 25 %, souligne l'éleveur. A puissance égale, nos matériels coûtent 30 à 40 % plus cher que des engins classiques. »
- Au-delà de ses convictions, l'agrandissement n'est pas une option : l'expérience montre que les terres trop éloignées du siège d'exploitation sont abandonnées. Trop pentues, elles sont difficiles d'entretien. « Pour faucher 1 ha de fougères, il faut l'aide d'une dizaine de voisins pendant deux jours », explique Peio. Au Pays basque à l'instar des autres montagnes, la main-d'oeuvre familiale et l'entraide sont primordiales et les salariés permanents rares (1,28 UTA en moyenne).
- A côté des aides, la vente directe permet au moins à Peio de valoriser ses produits. Le fromage est commercialisé à la ferme et aux restaurants locaux. Les agneaux et les veaux sont vendus en circuits longs.
(1) Ils sont engagés dans la charte fermière de qualité Idoki « pour une agriculture paysanne sincère et citoyenne ».
[summary id = "10022"]
Pour accéder à l'ensembles nos offres :