3. « Les éleveurs sont les premiers juge 3. « Les éleveurs sont les premiers juges de l'efficacité des traitements »

Parfois controversée, l'homéopathie trouve néanmoins sa place dans les trousses à pharmacie des vétérinaires. Le Dr Christine Filliat, vétérinaire à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), l'utilise là où on ne l'attend pas forcément : dans les systèmes d'élevages intensifs. L'effet placebo tombe de fait.

Dans quels types d'élevages appliquez-vous l'homéopathie ?

« Cela fait vingt ans que je prescris de l'homéopathie dans des systèmes avicoles intensifs, et bien sûr, en élevage bio. Les animaux sont presque des clones. Ils naissent en même temps et sont issus de souches fixées. Je ne raisonne donc pas en individu, le patient devient l'élevage. J'ai commencé sur des maladies chroniques qui ne trouvaient pas de solutions avec la médecine conventionnelle. Aujourd'hui, je suis des élevages de 200 000 pondeuses soignées sans antibiotiques. »

Comment constatez vous l'efficacité de l'homéopathie ?

« D'une exploitation à l'autre, les systèmes sont sensiblement les mêmes. Les produits sont généralement distribués dans l'eau de boisson, stockée dans une cuve derrière une cloison. L'animal ne sait pas qu'il est médicalisé. D'autant plus que l'homéopathie a moins d'odeur que les antibiotiques. Les résultats peuvent être contestés, puisqu'ils n'ont pas lieu sur une ferme expérimentale. Mais de facto, il y a des effets significatifs de retour à la santé de performance. C'est le mode d'action du médicament homéopathique qui reste encore à découvrir. Les recherches fondamentales sont en cours. Tout ce que je constate, c'est que, dans mes élevages, ça marche. »

Les résultats sont-ils meilleurs que ceux obtenus avec des antibiotiques ?

« L'objectif n'est pas de faire mieux mais aussi bien. Si dans deux lots homogènes, j'obtiens la même mortalité avec l'un ou l'autre des produits, c'est gagné. J'ai face à moi des éleveurs économistes, ce sont eux les premiers juges, et surtout les premiers à sanctionner. Lorsque l'un d'entre eux vient spontanément me réclamer un produit que j'ai prescrit chez lui, j'ai là ma plus belle preuve de l'efficacité du protocole. »

L'homéopathie peut-elle se substituer aux antibiotiques ?

« Non, les antibiotiques sont des médicaments précieux. Nous devons les préserver, pour qu'ils restent efficace en cas de gros souci sanitaire. Les éleveurs en ont de plus en plus conscience, et l'antibiorésistance inquiète. Toutefois, l'homéopathie répond parfois à des pathologies que la chimie ne sait pas guérir. Par exemple, elle permet de maîtriser les comportements anormaux développés par les volailles qui, de par leur système d'élevage intensif, sont parfois débordées par le stress. Beaucoup d'éleveurs m'appellent par anticipation. L'homéopathie ne sert pas qu'à guérir, elle améliore aussi les performances. »

Comment les médecines non conventionnelles sont-elles reconnues dans le monde vétérinaire ?

« Le corps vétérinaire n'a pas validé officiellement ces pratiques, qui par conséquent sont mal régentées. Elles n'intègrent pas les programmes en école vétérinaire. Or, il ne fallait pas les laisser en dehors de la profession. Aujourd'hui, elles nous échappent. En tant que praticiens, on ne contrôle plus rien. Des produits dont on ne connaît pas toujours la composition se retrouvent en vente libre sur internet et sont utilisés à tort et à travers. »

Cette situation représente-t-elle un risque pour l'élevage ?

« Si les plantes existent depuis la nuit des temps, elles sont aussi les premiers poisons. Leur utilisation paraît anodine mais elle est loin de l'être. Le diagnostic est primordial et reste le rôle du praticien. Les effets secondaires existent. Dans la vie d'un homme, le corps évacuera une erreur de dosage avec le temps. Mais à l'échelle d'une volaille, dont l'espérance de vie est courte, c'est irréversible. »

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