Login

Fiche 2 – Magasin de producteurs Fiche 2 – Magasin de producteurs

Discuter à plusieurs, décider seul.  

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

De quoi parle-t-on

• Pas d'intermédiaire. Un point de vente collectif est un magasin alimentaire tenu et géré par des producteurs fermiers, qui vendent directement, sans intermédiaire, les produits de leurs exploitations aux consommateurs. Pour établir cette fiche, nous avons interviewé Carine Montet, coordinatrice de Terre d'envie, réseau qui fédère trente-quatre magasins de producteurs, situés surtout dans le Rhône-Alpes.

Interdit de l'écrire

• Pas de prix dans le règlement intérieur. « Selon le code du commerce (article L410-2), chaque producteur est libre de fixer le prix de vente de ses produits. Dans les points de vente, les règlements intérieurs ne doivent pas comporter d'article sur les prix de type : le prix du produit doit être cohérent avec les autres débouchés de vente et ne pas varier au-delà de 10 % du prix pratiqué en magasin.

C'est considéré, par la Répression des fraudes, comme un prix minimum imposé et une entrave à la concurrence. Avec le risque d'une amende allant jusqu'à 15.000 euros. Cependant, le prix fait partie des discussions entre des producteurs, sinon de leurs écrits. Ils essaient d'avoir une politique en cohérence entre eux, avec la zone de chalandise et avec les prix que chacun pratique sur ses différents circuits. »

Assumer ses prix

• Pas de discount. « Il y a deux ans, une émission télévisée analysait les prix discount. Dans cette enquête, un reportage sur un magasin de producteurs avait été glissé entre ceux sur les magasins de lunettes à prix cassés et les magasins d'usines. Ce supermarché fermier, dixit le reportage était à tous les coups moins cher. Même si c'était un bon coup de pub, c'était aussi réducteur.

En magasin, les producteurs peuvent communiquer sur leurs prix sans être dans la promotion. C'est plus sur le conditionnement qu'ils agissent : trois achetés, le quatrième moins cher ou gratuit. Dans certains magasins, chaque producteur peut faire deux à trois opérations de promotion par an, limitées dans le temps, pour éviter les dérives. »

L'image du point de vente

• Face aux « dépots-vendeurs ». « En point de vente, les producteurs qui font du dépôt-vente règlent un taux de prélèvement d'environ 25 %. S'ils appliquent entièrement ce prélèvement à leurs prix, ils en vendront peu et finiront par nuire à tout le point de vente, le faisant passer pour un magasin de prix élevés. Pour certains produits, les confitures extra, par exemple, cela peut passer. Mais attention à ne pas faire fuir la clientèle modeste ! Il y a un prix psychologique a ne pas dépasser. »

Le temps de la commercialisation

• Pourquoi se déplace-t-on ? « Les prix de nos magasins ne tenaient pas franchement compte du temps de travail nécessaire. Ils sous-estimaient, en particulier, le temps de la commercialisation et les frais de transport. Dans le coût de commercialisation il y a l'emballage, le transport, le temps consacré aux circuits courts (préparation, emballage, livraison, mise en rayon, permanences de vente, réunion mensuelle, animations commerciales), le coût de l'accès à ce circuit (12 à 20% du prix de vente en magasin de producteur) et, enfin, le coût de la communication (publicité, relance téléphonique, site internet). A la fin du calcul, il faut pouvoir répondre à la question : pourquoi je me déplace ? La mise en place d'un tableau des coûts demande du temps. Mais ensuite, l'arbitrage est facilité. »

 

Témoignage : BLANDINE GALLOT, élevage laitier et tranformation à Sorbiers (Loire)

 

« Les prix, c'est aussi l'image du magasin »

« Je travaille avec mon mari. Notre troupeau, en reconversion bio, compte 40 vaches. Nous avons transformé jusqu'à 500.000 litres de lait, mais après le départ de notre salarié, le volume à été réduit à 250.000 litres. Nous avons conservé uniquement le magasin de producteurs de Sorbiers, situé en zone périurbaine, et nous avons supprimé le marché, où allaient déjà mes beaux-parents.

Au final, le revenu dégagé est le même. J'ai abandonné le traditionnel fromage blanc. Je me concentre sur le yaourt, où il y a moins de concurrence. C'est un produit de consommation quotidienne, qui s'adresse à une clientèle familiale. Je réalise 1 euro de marge par litre de lait transformé. Les yaourts sont vendus par six, à 2,75 €. A 45 centimes le yaourt, j'équilibre mes coûts, mais pas ma main-d'oeuvre.

Nous sommes dix producteurs associés dans le magasin et nous accueillons une trentaine de « dépôts vendeurs ». Nous payons 11 % pour la gestion du magasin et les « dépôts vendeurs », 25 %. Chacun a son libre arbitre pour fixer ses tarifs, mais cela n'empêche pas la discussion. Nous devons pouvoir expliquer les prix à nos clients : l'investissement nécessaire pour produire et vendre, le temps passé.

Quand il y a une augmentation significative chez un de nos associés, nous nous demandons toujours si le produit se vendra à ce prix-là, si cela ne nuit pas à l'image du magasin. Dans le contexte de crise actuel, nous sommes encore plus vigilants. Et nous restons peu enclins aux promotions, qui encouragent le gaspillage et nuisent à la clarté de notre politique de prix. Nous allons développer les relevés de prix dans notre zone de chalandise. »

 

Témoignage : GISÈLE MOREAU, production de confitures extra à Rontalon (Rhône)

 

« L'intérêt du magasin, c'est la vie collective, les échanges sur la politique de vente »

« Après une première vie professionnelle, consacrée aux handicapés et personnes âgées, j'ai repris une trentaine d'hectares à mes parents. Au terme d'une formation au CFPPA (1) de Florac, mon activité a commencé par la cueillette de fruits rouges de plein champ et la production de céréales. Je brassais de l'argent, mais sans dégager de revenu. Finalement, je n'ai gardé que 3,5 hectares et j'ai cédé les autres terres à ma famille. J'ai décidé de travailler sans salarié, en transformant mes fruits en confitures.

Aujourd'hui, ma gamme de produits est large : plus de vingt parfums de confiture, des coulis, des pâtes de fruits, des sorbets, des coulis de tomates, des chutneys…Tout est fait avec mes produits, avec du sucre bio. Mes parents commercialisaient déjà des cerises, en plus de leur activité laitière. Leur étable est devenue mon laboratoire et mon magasin de stockage. Ils me donnent un sérieux coup de main. Ma marque et mon logo ont été déposés dès 2003. Je suis producteur associé dans deux magasins : La Ronde paysanne et Coeur de ferme, qui prélèvent 14 % pour leur fonctionnement. Les producteurs associés assurent une présence, parfois importante, vu mon chiffre d'affaires.

Là où je suis en simple « dépôt vendeur », le prélèvement va de 25 % à 30 %. Suivant le lieu, j'adapte ma gamme, mais pas les prix. Ils sont identiques partout : le pot de 260 grammes de confiture extra est vendu 3,90 euros. Je dépense par pot : 60 centimes pour une verrine originale, 5 centimes pour la capsule et 15 centimes par étiquette. Un kilo de fruits me revient, en moyenne, à 4,50 euros et le sucre, à 1,30 euros. Je prépare mes confitures avec 1 kg de fruits pour 750 grammes de sucre. Et un kilo de fruits donne six pots de confiture. Enfin, la dépense par pot, entre gaz, congélation de fruits à la cueillette et l'électricité, avoisine 1 euro. Il me reste une marge de 1,10 euro par pot pour couvrir le temps passé. J'ai réalisé un chiffre d'affaires de 53 000 euros en 2013 et j'aspire à monter à 65.000 euros. Parfois, je fais une offre de quatre pots pour le prix de trois. Mais jamais là où le magasin retient 30 % du prix de mes ventes. Je participe à quelques salons, mais c'est pour rappeler ma présence dans les magasins. »

_____

(1) Centre de formation professionnelle et de promotion agricoles.

[summary id = "10022"]

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement