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Développer l'atelier : oui, mais avec de Développer l'atelier : oui, mais avec de la visibilité

Emmanuel Bernard est partant pour engraisser davantage en contrepartie d'une assurance contre les aléas du marché de la viande.

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«Je suis d'accord avec l'idée d'engraisser des broutards avec mes céréales, plutôt que de les exporter et de voir les abattoirs tourner au ralenti, assure Emmanuel Bernard, naisseur-engraisseur à Cercy-la-Tour (Nièvre). Mais l'engraissement est un atelier gourmand en capitaux. Dans la mesure où je prends des risques, j'ai besoin d'outils pour sécuriser mes prix de vente. » Autrement dit, Emmanuel attend de sa coopérative un signe fort pour se mettre à l'abri de la volatilité des cours des jeunes bovins.

« Mon objectif est d'être au maximum autonome pour l'alimentation de mes animaux, poursuit-il. Et de travailler sur les opportunités d'achats de protéines au meilleur prix. » Tout cela dans le but de maîtriser son coût alimentaire. Mais ce qui intéresse encore plus Emmanuel, c'est de s'assurer qu'il peut bénéficier d'un système qui couvre, au moins en partie, les aléas conjoncturels du marché de la viande, quand il sème son maïs ensilage, achète du tourteau ou des broutards. « Car pour un maïs semé en mai, je ne commercialiserai le jeune bovin que l'année suivante, décrit-il. J'ai besoin de visibilité. »

C'est chose faite, puisque bientôt aboutira le projet FAC, mis en place par Feder, l'union de coopératives dont il est adhérent (lire ci-contre). « Les deux parties s'engagent, reprend Emmanuel. Un peu comme les contrats sur les céréales, sauf que nous n'avons pas de marché à terme et que nous ne pouvons pas stocker nos animaux. Disons que sur 50 mâles vendus, une vingtaine pourrait faire l'objet d'un engagement mutuel : par exemple, la coopérative prend en compte mes coûts de production et je respecte un cahier des charges concernant l'âge, le poids ou la période de sortie des animaux. En sécurisant une partie de mes ventes, il est plus facile de supporter les fluctuations du marché pour le reste des animaux. »

Mais Emmanuel est catégorique : il ne veut pas d'une contractualisation systématique. Il lui semble important de garder un pied dans le marché. Côté aval, il a un avis bien tranché : c'est à l'abatteur de trouver son débouché. « Nous avons tort de toujours vouloir intégrer un distributeur aux contrats, affirmet- il. Quand un agriculteur passe un contrat sur du blé, il ne cherche pas à savoir à qui il sera vendu. Il y a un industriel au bout. A ce dernier de trouver à qui vendre sa marchandise. Et sachant que la majorité de nos animaux part vers l'Italie, la Grèce, la Turquie…, pourquoi négocier avec des distributeurs français ? »

FAIRE TOURNER LES ABATTOIRS

Depuis 2007, Emmanuel augmente ses achats de mâles et de femelles à engraisser. Il vend aujourd'hui près de 250 animaux finis par an. C'est un moyen de financer la construction du nouveau bâtiment destiné à loger son cheptel de 100 mères charolaises. Mais Emmanuel voit surtout en l'engraissement un avenir. Avec une réserve : « Ce ne sont pas les débouchés qui manquent mais les outils de pilotage dans les exploitations, estime-t-il. Près de 80 % des mâles du Centre sont expédiés sur le pourtour méditerranéen. C'est la même chose pour les céréales. L'export engendre pourtant des risques de non-paiement de plus en plus marqués en ces périodes de crise, notamment en Grèce et en Italie. La France paye malheureusement une partie de l'engraissement des animaux en Italie, alors pourquoi ne pas plutôt investir dans nos outils, s'étonne-t-il. Soutenir la finition des animaux dans nos élevages est une mine pour les salariés des abattoirs. » La production d'Emmanuel est diversifiée : des babys, des babynettes, des génisses de moins de 30 mois et des vaches peuvent intéresser différents opérateurs. « Quand je contractualise avec mon organisation de producteurs, je ne connais pas forcément son client abatteur, poursuit-il. Mais grâce à cette démarche, la coopérative a davantage de visibilité sur les animaux mis en place par les éleveurs. Ce travail en amont lui permet d'orienter plus facilement la marchandise selon les besoins de ses clients abatteurs. »

Il y a toutefois une limite au développement de l'engraissement : l'autonomie alimentaire. « L'augmentation du cheptel engraissé n'est pas adaptée aux zones herbagères, reconnaît Emmanuel. S'il faut acheter du concentré, ça ne vaut pas le coût. L'objectif est de trouver une complémentarité dans les exploitations de type polyculture-élevage. Après, en termes d'alimentation, l'augmentation du nombre d'animaux ne nécessite pas d'investissements. Si j'ai déjà un bol pour nourrir soixante animaux, je n'ai pas besoin d'investir à nouveau pour en nourrir cent vingt. Le véritable défireste l'organisation des places dans les bâtiments. »

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