Rouille jaune à surveiller de près
L'arrivée en 2011 d'une nouvelle race, particulièrement virulente, de rouille jaune sur céréales invite à être vigilant vis-à-vis des variétés les plus sensibles.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Depuis deux ans, les épidémies de rouille jaune marquent les esprits à la fois par leur intensité et par leur précocité. En 2012, la maladie s'est déclarée dès le mois de février et était présente dans toute la France. Y compris dans les régions du Sud, ce qui est assez rare étant donné la préférence du champignon pour les températures fraîches.
Autre fait inhabituel, la rouille jaune était présente sur triticales, blés durs et escourgeons, d'habitude très peu touchés. Ces épidémies sont dues à l'arrivée d'une nouvelle race de rouille jaune, appelée Warrior.
Quasi absente sur notre territoire en 2010, elle est apparue massivement en 2011, pour représenter 95 % des populations de rouilles jaunes en 2012. Géographiquement, le pathotype est apparu simultanément en Espagne, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Scandinavie.
L'hypothèse d'un transport longue distance à partir d'une source éloignée a donc été avancée, les spores des rouilles pouvant parcourir plusieurs milliers de kilomètres grâce aux courants aériens.
Outre son arrivée massive, c'est le profil de virulence de cette race qui la différencie des anciennes, puisqu'avec l'apparition de deux nouveaux gènes de virulence, elle détourne tous les gènes majeurs de résistance connus sur le blé tendre.
Résultat, certaines variétés résistantes à la rouille jaune ont évolué significativement, jusqu'à devenir sensibles en l'espace d'une campagne.
Recherche de résistances
Selon les résultats d'Arvalis, la variété Allez-y, malgré sa note de 8 à l'inscription (résistant), s'est avérée moyennement sensible en 2012. Les sensibilités de Faiplay (note de 4) et Laurier (note de 6) se sont fortement aggravées.
Enfin, les variétés comme Alixan, Trapez, Ephoros ou Hysun se sont montrées très sensibles. Si ces variétés doivent être surveillées de près en 2013, la majorité des variétés de blé tendre semblent, heureusement, garder un bon niveau de résistance partielle.
Les variétés possèdent en effet deux niveaux de résistance : celle qui s'exprime dès le stade de plantule et qui est contrôlée par des gènes spécifiques, puis celle qui s'exprime à des stades plus tardifs et qui implique plusieurs secteurs chromosomiques, appelés QTL (Quantitative trait loci ou Locus de caractères quantitatifs).
Une variété peut donc être sensible en début de saison, ses gènes de résistance spécifique étant contournés, mais résistante en fin de saison, lorsque la résistance adulte est installée.
Certaines variétés comme Apache, Renan, Camp-Rémy ou Soissons sont restées résistantes à la rouille jaune depuis leurs premières utilisations, il y a plus de dix ans. Les gènes et QTL conférant à ces cultivars une résistance durable ont pu être cartographiés par des chercheurs de l'Inra.
L'objectif est désormais de mettre à profit ces résistances dans différents fonds génétiques et de repérer les combinaisons de QTL les plus performantes pour obtenir une résistance durable.
Le GIE Club 5 (1) et l'Inra se sont ainsi rassemblés autour de plusieurs programmes soutenus par le Fsov (2) pour tester les résistances des variétés inscrites ou des lignées en sélection.
En 2008, un premier projet avait permis de mettre en évidence quelques lignées totalement résistantes au champ. Cependant, les essais avaient eu lieu avant l'arrivée de la Warrior. Le nouveau projet, initié en 2012, prendra donc en compte les caractéristiques de cette nouvelle race.
_____
(1) Syngenta, RAGT, Florimond Desprez, Limagrain Europe, Agri-obtentions.
(2) Fonds de soutien à l'obtention variétale du blé tendre.
Observations de la BSV
Quasi aucun foyer de rouille jaune n'a encore été observé, contrairement à l'an dernier à cette même période. Dans les prochaines semaines, l'indice de risque prévu par le modèle Yello d'Arvalis viendra compléter les BSV.
Un phénotype particulier
Le nouveau pathotype Warrior manifeste un comportement biologique particulier. Le champignon produit en effet rapidement de nombreux téleutosores (pustules noires qui se superposent aux stries jaunes), qui sont à l'origine de la reproduction sexuée du champignon. Or, habituellement, les races connues de rouille jaune n'en produisaient que peu, et plus tard.
De plus, alors qu'on ne connaissait pas d'hôte alternatif permettant à la rouille jaune d'effectuer sa reproduction sexuée, cette nouvelle race pourrait accomplir son cycle sexuel sur l'épine-vinette. Le comportement du champignon sera donc à surveiller de près. Sa caractérisation et la recherche de son origine sont toujours en cours par l'Inra et les équipes européennes.
[summary id = "10022"]
Pour accéder à l'ensembles nos offres :