Les mélanges, plutôt avec des légumineus Les mélanges, plutôt avec des légumineuses
Associer différentes espèces, c'est favoriser une réelle synergie entre elles.
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L'association d'espèces semble faire depuis quelque temps des émules, notamment chez les agriculteurs utilisant les techniques culturales simplifiées (lire le témoignage ci-contre).
Si les mélanges associant deux espèces (souvent une légumineuse ou fabacée avec une céréale ou une crucifère) sont plus couramment choisis, ils peuvent également intégrer cinq ou plus de cultures.
Arvalis estime qu'il n'est pas nécessaire de dépasser trois espèces. En effet, certaines prennent toujours le dessus sur d'autres, et tous les bénéfices des espèces ne sont pas forcément retrouvés.
Mais pourquoi faire le choix d'implanter un mélange ? Il existerait a priori une synergie entre les espèces. La moutarde, associée à faible dose à d'autres cultures, a ainsi un développement moins exubérant et monte moins facilement à fleur.
La présence de différents systèmes racinaires serait aussi l'assurance d'améliorer la structure des sols. Il s'agirait d'une assurance contre les échecs de levées de certaines cultures, liés aux conditions climatiques ou à la préparation du lit de semences.
Les mélanges présentent, par ailleurs, des intérêts faunistiques (voir encadré ci-dessous). Arvalis estime que le premier intérêt des mélanges est d'associer des familles avec des comportements différents vis-à-vis de l'azote, comme des légumineuses et des non-légumineuses.
De 2004 à 2010, l'institut a réalisé des essais sur les mélanges avec ou sans fabacées. Il en ressort que les mélanges avec légumineuses et les non-légumineuses seules affichent une biomasse plus importante que les légumineuses seules, avec respectivement 2,1 t/ha, 1,8 t/ha et 1,5 t/ha.
Quant à l'absorption d'azote, Arvalis a observé une synergie, puisque les mélanges avec légumineuses récupèrent en moyenne 46,9 kg d'azote/ha, les non-légumineuses seules 29,2 kg et les légumineuses seules 59,7 kg.
Un meilleur C/N
Les légumineuses, qui en plus de capter l'azote du sol comme les autres plantes, fixent celui de l'air, ont aussi l'avantage de restituer cet élément plus rapidement. Cela s'explique par le rapport C/N (équilibre entre la matière carbonée et azotée dans le végétal) plus faible que pour d'autres espèces.
Le trèfle blanc et la minette affichent en moyenne un rapport faible, autour de 14, alors que ceux de la moutarde, la phacélie ou d'un ray-grass sont plutôt supérieurs à 20.
Or, une espèce présentant un rapport C/N compris entre 10 et 15, minéralise entre 30 et 45 % de son azote pour la culture suivante. Le reste, contenu dans la matière organique, sera minéralisable à moyen ou long terme.
En zone vulnérable, il faut prendre en compte la réglementation. En effet, tous les départements n'ont pas forcément autorisé l'implantation de légumineuses. Lorsque c'est le cas, leur proportion ne dépasse pas 50 % d'un mélange.
La moutarde seule a peu d'intérêt pour la faune
Le choix des espèces de cultures intermédiaires peut contribuer à favoriser le développement du petit gibier et des insectes. C'est ce qu'ont démontré les essais entrepris par le groupe technique national Agrifaune (regroupant agriculteurs et chasseurs) qui travaille sur les couverts.
Ce groupe s'est attaché à trouver des cultures intermédiaires qui soient à la fois intéressantes sur le plan agronomique et faunistique. Concernant ce dernier point, les Cipan doivent être capables de protéger les perdrix, faisans et lièvres contre les prédateurs ou les intempéries, et de les nourrir.
Les couverts offrent aussi des fleurs aux insectes pollinisateurs, par exemple du sarrasin ou de la phacélie, à une époque où habituellement il n'y a pas ou peu de plantes en floraison.
Si la moutarde seule à un effet très limité sur la faune, elle peut en revanche être associée à d'autres espèces. Elle présente un intérêt à de jeunes stades, car la faune peut la consommer, mais aussi parce qu'elle lève plus rapidement que d'autres espèces et assure ainsi leur protection.
Les travaux d'Agrifaune ont ainsi démontré que les mélanges associant crucifères à d'autres types de cultures étaient plus appropriés. « Des associations telles que radis-vesce-sarrasin ou moutarde-avoine ou phacélie-vesce sont équilibrées, ajoute Solène de Pontbriand, responsable du projet Agrifaune. Nous souhaitons aussi être cohérents d'un point de vue économique. Les coûts sont de 30 à 45 euros par hectare au maximum, alors que la moutarde seule affiche jusqu'à 25 €/ha. »
Un travail a été mené avec les coopératives et les semenciers pour proposer une gamme de couverts labellisés « Agrifaune ». Il existe déjà quelques mélanges disponibles à la vente.Le groupe de travail milite également pour un itinéraire technique plus adapté à la faune.
Pour cela, il recommande de semer les mélanges suffisamment tôt, pour fournir rapidement un abri aux animaux, et souhaite une destruction tardive, plutôt avec l'action du gel. « Un couvert, même grillé par le gel, permet de protéger les bêtes des intempéries et des prédateurs », affirme-t-il.
Témoin : PATRICK HARVEAU, exploitant à Corbeilles-en-Gâtinais (Loiret)
« Une association pour restituer l'azote à la culture qui suit »
« Avec un collègue, nous avons adapté un semoir à céréales sur un décompacteur, ce qui permet d'économiser un passage. »
« Cela fait une dizaine d'années que je ne laboure plus. A la sortie de l'été, après deux déchaumages, je passe le décompacteur. Avec des sols qui comportent plus de 50 % d'argile par endroits, les couverts ont un effet structurant et me permettent d'implanter sans problème les cultures de printemps : la betterave, l'orge brassicole et les semences d'orge sous contrat avec Caproga la Meunière.
Un tiers de la surface des couverts est conduit avec de la moutarde. J'ai choisi Sito, une variété antinématodes. Un autre tiers est implanté avec de la phacélie, placée préférentiellement avant l'orge de printemps. C'est une espèce plus facile à détruire que la moutarde, qui permet une meilleure préparation des sols pour les semis d'orge.Toutes les cultures intermédiaires mises en place améliorent la structure de mes sols, mais je tente également d'avoir un effet azote.La dernière partie est donc semée avec un mélange, avant l'orge ou la betterave. Composé d'avoine fourragère diploïde et de vesce commune, il est certes un peu plus cher (environ 55 e/ha) que les espèces pures (entre 15 et 25 e/ha), mais grâce à la synergie qui existe entre les plantes, l'azote du sol qu'il capte est mieux restitué aux cultures suivantes. Il favorise aussi la vie du sol.Cependant, opter pour trois types de Cipan, c'est également diminuer les risques, car on n'est jamais certain du climat à l'implantation ou en cours de cycle. La moutarde seule peut se développer trop, notamment quand elle est semée trop tôt, et l'avoine présente dans le mélange, gélive, peut, certaines années, rester en place à cause d'un hiver trop doux.J'ai tenté d'implanter d'autres espèces, qui se sont parfois mal développées, comme le niger qui n'a pas bien germé. Et si je me considère encore comme un apprenti sur le sujet, une chose est certaine, ce qui m'importe, ce n'est pas l'aspect réglementaire. Il faut que ces cultures intermédiaires m'apportent quelque chose en retour. »
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