S'organiser pour répondre à la demande S'organiser pour répondre à la demande
Avec près de 10 millions de repas servis en France chaque jour, la restauration collective offre aux producteurs un potentiel de débouchés stables et rémunérateurs.
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Ce secteur, qui se caractérisait jusque-là par un approvisionnement national de produits prêts à l'emploi avec de gros volumes et des prix bas, fait désormais la part belle aux produits locaux et de qualité.
Afin que le monde agricole tire profit de ce nouveau courant encouragé par les politiques, il lui faut répondre aux exigences des gestionnaires de cantine.
Les cuisines, qui fonctionnent en flux tendu, avec des commandes à la semaine, sont confrontées à l'offre atomisée de la production agricole de proximité. Selon une étude de la Driaaf de l'Ile-de-France (1) sur la caractérisation de la demande en produits de proximité, outre une qualité constante des produits, les responsables de la restauration collective recherchent la sécurité de l'approvisionnement en volume et en régularité.
La capacité de transport du fournisseur est ainsi l'un des points clés, souligne l'étude. « Il est très difficile d'arriver à avoir une livraison en direct », confirme Jean-Luc Landais, cuisinier au collège du petit village de Perthes (Seine-et-Marne). Ce dernier, qui a fait le choix de travailler en direct avec « le plus possible » de producteurs voisins, avoue consacrer « beaucoup de temps et d'efforts » à l'organisation.
Ce qui est envisageable dans de petites structures rurales apparaît vite inapplicable dans de grosses collectivités urbaines. « Sans logistique, le business est impossible, assure Arnaud de Roquefeuil, directeur du développement chez l'opérateur de restauration collective Elior. Il est nécessaire de structurer les démarches pour qu'elles deviennent durables et qu'il ne s'agisse pas simplement de belles histoires ici ou là... »
Pour répondre à ce besoin d'organisation de l'offre, de nombreuses plates-formes d'approvisionnement sont actuellement expérimentées partout en France, la plupart à l'initiative des chambres d'agriculture.
Leur rôle : fédérer les producteurs, organiser les livraisons et garantir assez de volume pour leur permettre de répondre aux appels d'offres des collectivités. Le défi étant de trouver l'équilibre entre un retour de la valeur ajoutée aux producteurs et le budget parfois serré des cantines.
La démarche fait ses preuves mais elle n'est pas forcément la solution idéale pour tous. Certains préfèrent s'associer à des structures existantes ayant déjà un savoir-faire. C'est le cas d'agriculteurs de l'Ille-et-Vilaine, qui travaillent avec des Esat (établissement ou service d'aide par le travail), ou dans le Rhône-Alpes, où ils s'appuient sur la marque de producteurs « Saveurs du coin ».
Les grossistes veulent aussi jouer un rôle dans l'organisation de ces nouveaux marchés. « Contrairement aux producteurs, nous avons les moyens de répondre à l'urgence en cas de défaillance, défend Selda Celik, responsable de la qualité et du développement durable du groupe AFL (All Fresh logistique). C'est à nous de faire le lien ! »
En d'autres termes, à chacun son métier. La force des grossistes est qu'ils connaissent les exigences et contraintes des deux bouts de la chaîne. Mais gare à ce que la multiplication d'intermédiaires ne se fasse pas au détriment des producteurs !
Pour l'heure, la filière se cherche encore et les données manquent pour comparer les coûts. Aux organisations de producteurs de prouver qu'elles ont toutes leur place sur le marché.
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(1) Direction régionale et interdépartementale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt. Etude présentée lors du colloque sur la restauration collective du 2 février 2012, à Paris, et disponible sur www.draf.ile-de-france.agriculture.gouv.fr/alimentation.
Expert : JEAN-JACQUES HAZAN, directeur de la Caisse des écoles de Paris XIIe
« Un nouvel état d'esprit à construire »
Le recours à des produits frais complique-t-il le travail des cantines scolaires ? On reconnaît une vraie cuisine à la présence de produits frais. Quitte à ce qu'il y ait de la manutention, autant travailler à partir de salades entières, d'oignons, d'échalotes ou d'ail. Les cuisiniers valorisent davantage leurs métiers qu'en ayant recours à des ingrédients en poudre...
Ça leur ouvre des possibilités. La viande fraîche, par exemple, se travaille plus facilement que le surgelé. On peut la faire mariner la veille pour en faire un boeuf bourguignon le lendemain. Mais ça demande aussi un minimum de formation. Et en termes d'approvisionnement ?
Trouver des fournisseurs est difficile, surtout à Paris ! Je travaille avec des producteurs de la Picardie, de l'Yonne ou du Loiret. Nous devons nous adapter à leurs contraintes, notamment pour les livraisons. Avec 9.400 repas à préparer chaque jour, je n'assure pas la logistique tout seul : j'ai recours à des commerciaux qui se sont adaptés à mes exigences. Les grossistes doivent nous aider à trouver les produits qui nous correspondent le mieux. Faut-il inventer une nouvelle filière ?
C'est surtout un nouvel état d'esprit à construire. On peut imaginer des centrales d'achat ou bien des plates-formes de distribution, mais attention à ne pas multiplier les intermédiaires ! Il faut privilégier le relationnel et les gestionnaires de cantines doivent avant tout faire plus attention à ce qu'ils achètent. En ne perdant pas de vue un objectif : que le maximum d'argent aille dans le produit et à celui qui le fabrique. Il est temps d'en finir avec la recherche de prix toujours plus bas !
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