Écophyto 2018 : « peut mieux faire » Écophyto 2018 : « peut mieux faire »
Si l'expérimentation du Certiphyto, le réseau d'épidémiosurveillance et les fermes de référence sont en place, la réduction des phytos est en deçà de ce que le ministère voulait.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Il ne reste que sept ans pour atteindre l'objectif de réduire de 50 % l'utilisation des pesticides au niveau national. Les trois années qui sont déjà passées constituent une bonne base de référence et permettent d'établir un premier bilan... en demi-teinte. Bruno Le Maire l'a reconnu lors du troisième Comité d'orientation du plan Ecophyto 2018 le 26 octobre : « On peut mieux faire ! » Le Nodu (nombre de doses unités) pour les usages agricoles et non agricoles, hors traitement de semences, est en augmentation de 2,6 % entre 2008 et 2010, essentiellement liée aux herbicides. Pour les traitements de semences, la hausse est de 7 % pour la même période. « Je ne suis pas satisfait de ces résultats, a lâché le ministre de l'Agriculture. Il faut mettre la pression nécessaire pour que les résultats progressent. L'effort ne doit pas porter seulement sur les agriculteurs, mais il doit être collectif. » L'association environnementale Générations futures va plus loin en proposant des « mesures beaucoup plus incitatives, comme une forte taxation des pesticides ». France nature environnement a aussi demandé d'« activer, dès à présent, les leviers efficaces » et rappelle que « les agriculteurs ne sont pas les seuls concernés » par cet effort.
En revanche, Bruno Le Maire a noté « une vraie satisfaction concernant la baisse des ventes de substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de 87 % sur la période 2008- 2010 ». Un progrès surtout dû à la décision du ministère de l'Agriculture de retirer les autorisations de mise sur le marché des préparations contenant trente substances « préoccupantes » en 2008 et celles en contenant neuf autres en 2011. La classification des substances a aussi évolué « dans le sens d'une meilleure protection de l'environnement ».
Un basculement des pratiques vers des méthodes alternatives est également observé, avec une hausse de 68 % du Nodu biocontrôle entre 2008 et 2010 (micro-organismes, phéromones et virus). Des chiffres concernant les macro-organismes tels que les coccinelles, seront disponibles en 2012.
Néanmoins, la tendance donnée par ces chiffres doit être relativisée par la forte influence des conditions climatiques sur les pratiques des agriculteurs. Par ailleurs, outre les quantités, l'impact est aussi à mesurer et à suivre car il peut être modifié par les conditions d'application et les caractéristiques du milieu. D'ici à fin 2012, le ministère prévoit donc la mise en place d'indicateurs de risque et d'impact concernant l'environnement (eau, air, sol), la biodiversité, les résistances et la santé humaine. Sur ce dernier point, un neuvième axe du plan Ecophyto a été spécialement créé.
Parmi les autres axes du plan, il y a aussi la mise en place d'un réseau d'épidémiosurveillance. En 2011, 8 000 parcelles ont été observées par plus de 2 700 personnes qui permettent de publier gratuitement 3 000 bulletins de santé du végétal sur les sites internet des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf).
Les réseaux de fermes Dephy se sont aussi développés en 2011. Il s'agit d'exploitations pilotes qui se sont engagées dans une démarche de réduction de pesticides et qui expérimentent des systèmes de culture économes. Ce réseau compte 1 200 fermes de démonstration (il y en avait 180 en 2010) et quarante-cinq exploitations d'enseignement agricole qui représentent toutes les filières : grandes cultures, polyculture- élevage, arboriculture, viticulture et productions légumières.
CERTIPHYTO : GRATUIT ET VALABLE DIX ANS
Enfin, et c'est l'un des plus gros chantiers jamais lancés en agriculture : 800 000 personnes devront être formées afin d'obtenir le nouveau sésame pour acheter des phytos : le certificat individuel (ou Certiphyto).L'expérimentation de ce dispositif, entre l'automne 2009 et le 31 juillet 2011, a permis de former 120 000 agriculteurs. Les textes officiels réglementant le cadre général du Certiphyto attendus à la suite de cette phase expérimentale sont finalement sortis au Journal officiel les 20 et 22 octobre. Les 160 000 agriculteurs et salariés qu'il reste à former ont donc jusqu'au 1er octobre 2014 pour obtenir le Certiphyto. Pour les organismes de vente et de conseil, l'échéance, plus proche, est fixée au 1er octobre 2013, pour une validité du Certiphyto de cinq ans. Pour les agriculteurs, la durée de validité reste à dix ans, comme pendant la phase expérimentale. La gratuité reste aussi de mise grâce aux financements de Vivea (le fonds pour la formation des entrepreneurs du vivant), de FranceAgriMer et du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural). En 2012, le budget pour la formation au Certiphyto sera de 10 millions d'euros (contre 20 M€ en 2011 et 16 M€ en 2010) et sera reconduit en 2013 et 2014.
Désormais, quatre voies sont donc possibles pour obtenir le certificat individuel :
- à la suite d'une formation de deux jours sur la réglementation, la prévention des risques pour la santé, pour l'environnement et les stratégies visant à limiter le recours aux produits phyto ;
- à la suite d'une formation d'une journée et d'un test de quinze questions (45 minutes). Le candidat qui ne valide pas dix questions sur quinze suivra une journée de formation ;
- à la suite d'un test de vingt questions (1 heure). Si le candidat ne valide pas treize questions sur les vingt, il ne pourra plus s'y réinscrire et devra suivre la formation de deux jours citée en premier ;
- sur diplôme ou titre obtenu au cours des cinq années précédant la date de la demande. La liste est fixée par arrêté et disponible sur le site internet de La France agricole.
Les organismes de formation doivent être habilités par le ministère de l'Agriculture et la Draaf assure la délivrance du certificat.
Selon une enquête BVA réalisée fin 2011 auprès de 610 agriculteurs formés à l'automne 2010, quatre enseignements sont majeurs : la prévention vis-à-vis des risques pour la santé, « traiter mieux » (selon les conditions météo, d'après des observations ou des outils d'aide à la décision...), la sensibilité accrue à la préservation de l'environnement, la prise de conscience de l'enjeu général de réduction de l'utilisation des produits phyto.
Mais si 71 % des stagiaires interviewés pensent avoir des solutions, après cette formation, pour limiter l'usage des phytos, 59 % estiment tout de même qu'il n'est pas possible d'en réduire encore davantage la proportion.
[summary id = "10022"]
Pour accéder à l'ensembles nos offres :