La coopérative Laitnaa a repris la colle La coopérative Laitnaa a repris la collecte du lait en main
Confrontés au désengagement de Nestlé, des producteurs ont créé une coopérative pour démarcher de nouveaux débouchés.
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1. Unité. «En reprenant la collecte d'une usine Nestlé en avril 2008, nous avons maintenu une zone de production importante et structurée, assure Maurice-Henri Gobaille, président de Laitnaa. Nous avons aussi appris à écouter nos clients pour leur apporter le service demandé. C'est là qu'il y a de la marge à faire.»
2. Parc de froid. En juin 2006, Laitnaa a investi 3 millions d'euros pour reprendre et moderniser le parc de matériel abandonné par Nestlé. L'enjeu: augmenter la capacité des tanks à six traites au lieu de quatre, pour stocker le lait 72 heures au lieu de 48 heures.
«Les industriels ne doivent pas avoir peur de voir les producteurs s'organiser. Ils ne prennent aucun risque à travailler avec des éleveurs qui leur livrent un lait qui répond à leur demande.» Tel est le message délivré par Maurice-Henri Gobaille, président de la Société coopérative agricole laitière Nord-Aisne-Ardennes (Laitnaa).
Cette jeune entreprise a repris, en avril 2008, l'activité de collecte du lait, assurée auparavant par Nestlé pour approvisionner son usine de Boué, dans l'Aisne. Le transformateur avait déboussolé ses fournisseurs en 2006, en annonçant son intention de réduire ses approvisionnements. Il estimait ne plus avoir besoin que de 60 millions de litres (Ml) sur les 165 Ml qu'il achetait jusque-là.
Nestlé est un opérateur historique dans la région. Il s'y installe puis se développe en même temps que le marché à l'exportation de la poudre de lait. Au plus fort de l'activité, l'usine de Boué transforme jusqu'à 300 Ml. Lorsque Bruxelles se désengage financièrement du commerce international des produits industriels laitiers, Nestlé suit le mouvement. «Les groupements de producteurs laitiers de la région se sont étoffés au fur et à mesure de la croissance de Nestlé, se souvient Maurice-Henri Gobaille. Nous contractualisions collectivement notre production avec cette entreprise pour des durées de deux à quatre ans.»
En 2003, à l'occasion d'une renégociation de ces contrats, la multinationale suisse annonce vouloir se désengager de la gestion du froid à la ferme. «Nous nous sommes interrogés sur l'opportunité de reprendre collectivement le parc de froid à la ferme plutôt que de laisser chaque éleveur se débrouiller», poursuit-il.
Plus de 90% des producteurs adhèrent au projet. C'est ainsi que naît Laitnaa, le 12 juin 2006. Elle rassemble 438 producteurs pour un volume d'environ 165 Ml collectés et un acheteur unique, Nestlé. Mais ce premier désengagement n'est finalement qu'un galop d'essai. Nestlé décide de spécialiser le site de Boué pour la production de poudre infantile. Et en 2006, elle annonce des besoins en baisse: 60 Ml.
La deuxième brique
L'industriel entend aussi faire évoluer sa façon de s'approvisionner. L'abandon de la collecte se profile à l'horizon. «Nous avons repris nos réflexions au sein de Laitnaa pour voir comment reprendre les choses en main, poursuit Maurice-Henri Gobaille. Nous avions prévu dans les statuts l'achat et la vente de lait.» Commence alors la recherche de clients intéressés par du lait rendu usine.
Le 1er avril 2008, Laitnaa ajoute une brique à son édifice en créant l'activité de collecte et vente. Elle reprend les contrats des transporteurs avec lesquels Nestlé sous-traitait. Aujourd'hui, 348 producteurs y adhèrent, pour un quota de 120 Ml.
«Avant de nous lancer devant les adhérents, nous avons attendu d'avoir du concret à leur présenter. Nous aurions pu laisser tomber Nestlé, mais les producteurs ont souhaité, dans leur grande majorité, conserver une relation économique avec lui. Nous vendons aussi du lait à Novandie et cinq autres clients moins gros de la région. Tous les producteurs sont payés au même prix. Nous assurons la péréquation à l'intérieur de la coopérative.» Tirant les leçons du passé, Laitnaa a saucissonné ses contrats, y compris ceux de Nestlé. Leur durée varie de trois à dix ans.
En tant que président, Maurice-Henri Gobaille se charge de négocier les contrats avec les transformateurs. «C'est un nouveau métier et une charge de travail importante. J'essaie de ne rien faire seul. Il me semble important d'impliquer les membres du conseil d'administration et d'avoir une continuité en cas de besoin. Nous essayons d'avoir la même polyvalence avec nos quatre collaborateurs.»
Service contre marge
Le président de Laitnaa tire le bilan de l'expérience. «Se structurer est intéressant pour les producteurs. Cela doit aussi l'être pour les industriels. Chacun doit y trouver son compte. Nous avons de vrais clients, avec des besoins spécifiques concernant la qualité du produit acheté ou sa saisonnalité. A nous d'y répondre et de leur apporter un service. C'est là qu'il y a de la marge à faire.»
Collecte, gestion des paies, des quotas... Laitnaa connaît maintenant ces métiers et peut les expliquer à d'autres producteurs. «Cela demande de la rigueur et du professionnalisme, mais c'est faisable, insiste Maurice-Henri Gobaille. Il ne faut pas avoir peur de se lancer! Nous voulons aussi laisser la porte ouverte à d'autres producteurs. Mais nous devons d'abord ouvrir celles des industriels et décrocher de nouveaux contrats.»
Renforcer le réseau de commercialisation«C'est à l'acte de vente que se crée la valeur ajoutée, insiste Patrick Ramet, membre du bureau de la Sica Fermiers savoyards et administrateur de la Société laitière des Hauts de Savoie (SLHS). Seulement, nous ne pouvions pas à la fois rationaliser nos outils industriels et développer notre réseau commercial. Nous avons choisi la voie du partenariat.» La Sica Fermiers savoyards est née dans les années soixante-dix pour collecter et transformer le lait des fruitières sans débouchés de Savoie et de Haute-Savoie. Au fil du temps, elle se restructure et développe son réseau commercial. «Dans les années quatre-vingt, nous sommes devenus trop gros pour le seul marché des crémiers, mais pas assez pour celui de la grande distribution. C'est là que nous avons conclu notre premier partenariat avec Entremont et Pochat, un affineur. La Sica conserve la collecte et ses outils industriels, et crée avec ses associés la SLHS, chargée de la transformation et de la commercialisation. Nous conservons une minorité de blocage au sein de la SLHS.» Le partenariat prend la forme d'un contrat signé pour dix à douze ans selon les cas. Dix ans plus tard, Entremont se retire. Pochat reprend ses parts et la Sica conserve sa minorité de blocage. Il y a cinq ans, c'est Pochat qui est à vendre. «Nous avons choisi de ne pas le racheter mais de poursuivre dans la voie du partenariat avec Lactalis.» L'industriel collecte et transforme déjà du lait dans la région. Le contrat qui lie les deux parties est à mi-parcours et en cours de rediscussion. «Nous souhaitons renforcer ce partenariat gagant-gagnant en mettant en commun nos outils industriels et la commercialisation, tout en harmonisant la gestion de l'amont. Nous pourrons nous recentrer sur notre métier d'organisation de la production. Gérer le partenariat est compliqué. Mais cela nous a permis de pérenniser une zone de collecte tout en modernisant nos outils de transformation. Les industriels ont participé financièrement par le biais des allocations.» |
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