Astreinte Libérer du temps avec une mélangeuse en commun
De la Bretagne à la Lorraine, un nombre croissant d'éleveurs laitiers sous-traitent la distribution de la ration. Louis Belair a opté pour un entrepreneur tandis que Jean-Michel Burteaux confie le travail à sa Cuma. Avec les mêmes bénéfices, mais des contraintes différentes.
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QUALITÉ DE LA RATION. Louis Belair (à droite) et GaëtanChemin apprécient la qualité du mélange réalisé par l'automotrice. Elle leur permet d'incorporer des produits peu appétents dans la ration.
Il est 8h45 à Luitré, dans l'Ille-et-Vilaine. Louis Belair achève la traite de ses cent laitières tandis qu'au même moment la mélangeuse automotrice s'active autour du tas d'ensilage. Derrière le volant, ce n'est pas Gaëtan Chemin, son associé, mais le chauffeur de l'entreprise qui réalise la distribution de la ration pour le Gaec. Car, depuis près de dix ans, Louis Belair s'est libéré de cette astreinte en la confiant à l'ETA Taligot. «En 1996, nous avons commencé à réfléchir à la possibilité de mettre une mélangeuse en commun avec des éleveurs du secteur. Louis Taligot est venu vers nous et nous a proposé ses services. Depuis, je ne le regrette pas.» A l'origine, Louis Belair menait seul son troupeau et le temps était compté. La sous-traitance de l'alimentation était donc un véritable bol d'air. Et malgré l'installation de son neveu Gaëtan et l'arrivée de Françoise Feuvrier en juillet dernier, il n'est plus question de revenir en arrière.
Qualité du mélange
«Notre priorité est d'alléger la charge de travail, insiste Gaëtan Chemin, mais il faut reconnaître que nous sommes aussi satisfaits de la qualité de la ration réalisée avec la machine.» Le troupeau de normandes, prim'holsteins et simmentals reçoit un mélange d'ensilage de maïs, de paille, de tourteaux de soja et de colza. «L'appétence du colza et de la paille n'est pas bonne, remarque Gaëtan. Aussi est-il important qu'ils soient bien mélangés à l'ensilage pour être totalement consommés.» Son oncle apprécie également le système de pesée qui permet d'ajuster correctement la ration. «Avant, je ne connaissais pas les quantités précises, ce qui entraînait un déséquilibre quotidien au niveau du correcteur azoté», se rappelle Louis Belair.
Pas de temps morts
L'entrepreneur facture sa prestation au temps, il est donc impératif d'ajuster le parcours de la mélangeuse dans la cour de la ferme. Le silo est situé à l'entrée de l'exploitation, la mélangeuse peut donc commencer à se servir dès son arrivée. Louis et Gaëtan ont pris soin de déposer au préalable la paille et les tourteaux au pied du silo afin qu'il n'y ait qu'un seul point de chargement. Un petit panneau disposé au sommet du silo indique au chauffeur la quantité à distribuer. «Trois chauffeurs se relaient sur la machine, mais tous sont formés et connaissent l'exploitation, explique Louis Belair. Le panneau permet d'éviter les erreurs.» Une fois chargée, l'automotrice prend le chemin de la stabulation libre et réalise la distribution.
En moyenne, elle passe douze minutes sur la ferme. «Elle reste plus longtemps l'hiver car nous séparons les vaches en deux lots avec des rations distinctes», commente Gaëtan Chemin. En 2004, la prestation de la mélangeuse est revenue à 3.500 euros pour les quatre-vingts laitières que comptait alors l'élevage. «Il n'y a pas d'inconvénients à ce système, se félicite Louis Belair. Nous n'avons pas à nous soucier de l'organisation avec les six autres éleveurs de la tournée puisque c'est l'ETA qui gère tout. Notre seule contrainte est de conserver une petite distributrice pour pouvoir travailler en cas de panne de l'automotrice.»
2 centimes par litre de lait en Cuma
Des centaines de kilomètres plus à l'Est, aux environs de Moulins-Saint-Hubert, dans la Meuse, la tournée d'une autre mélangeuse automotrice rythme le travail quotidien de la Cuma de la Moulinette. S'inspirant de l'organisation des Cuma de l'Ouest, Jean-Michel Burteaux et quatre éleveurs laitiers de son entourage se sont jetés à l'eau en 1996. Un nouveau mode de distribution pour résoudre les problèmes de main-d'oeuvre et simplifier le travail quotidien. «Le service rendu nous a tout de suite convaincus. Nos animaux sont soignés quoi qu'il se passe sur l'exploitation. Une préoccupation de moins, avoue Jean-Michel Burteaux. Pour ceux d'entre nous qui sont seuls sur l'exploitation, c'est vraiment l'idéal. En revanche, nous avons été rapidement déçus par le coût de fonctionnement. Depuis, nous nous sommes organisés pour le réduire en facilitant l'accès au silo, en réalisant le prémélange des concentrés, en prédécoupant notre fourrage enrubanné… Nous avons ainsi diminué de plus de deux heures la durée de la tournée. Cela a payé puisque le prix de revient est de moins de 2 centimes d'euro par litre de lait, main-d'oeuvre comprise.»
TROUVER LE BON CHAUFFEUR. En organisant le service d'alimentation de la Cuma, Jean-Michel Burteaux s'est rendu compte que le choix du chauffeur était important car ce mode de fonctionnement repose sur la confiance mutuelle de tous les participants.
Distribution tous les jours
L'organisation de la Cuma est assez simple, car la distribution a lieu 365 jours par an. A 6h30, le chauffeur démarre la mélangeuse. Il assure ensuite le chargement et l'affouragement des animaux sur chaque exploitation, sur les 28 km du circuit. A 9h30, la tournée se termine. L'entretien, les déplacements et les temps morts représentent 45% des heures effectuées par les chauffeurs, contre 55% pour le chargement et la distribution. La création d'un groupement d'employeurs et l'embauche de deux chauffeurs ont facilité la gestion des week-ends et des vacances. Les consignes sont passées oralement aux deux salariés, ce qui nécessite de la rigueur. Il est arrivé que le tarissement soit reporté par manque d'anticipation de l'éleveur! «Il a fallu trouver des chauffeurs en qui nous avions une confiance totale, insiste Jean-Michel Burteaux. C'est indispensable pour déléguer le soin des animaux en toute sérénité. Nous n'avons pas de ration commune, il faut donc respecter les impératifs de chacun. La plupart des adhérents ont toutefois simplifié la distribution en supprimant les lots. Le complément reste du domaine de l'éleveur. La technicité de notre mélangeuse et la précision des chauffeurs contribuent à la qualité de nos rations.»
«Nous ne sommes plus seuls»
Les pannes? Chacun les accepte et les assume. A la facturation, un tiers du coût est en fonction du quota laitier tandis que les deux autres tiers dépendent du temps passé dans la cour de la ferme. Pour Jean-Michel Burteaux, le service de distribution revient à 10.000 euros par an pour 620.000 litres de quota. «Au-delà de toute considération économique, nous nous sommes enrichis des relations créées entre les collègues, soutient Jean-Michel Burteaux. Nous ne sommes plus isolés au sein de nos exploitations. Après la distribution, les deux chauffeurs embauchés sont sollicités pour d'autres travaux. Faire partie d'un groupement d'employeurs s'est révélé essentiel. Car les salariés ont apporté autant que la machine!»
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Pas de distribution le dimanche
Les chauffeurs de l'ETA ne travaillent pas le dimanche. Le troupeau du Gaec Belair-Chemin reçoit donc de 130 à 140% de sa ration le vendredi et environ de 160 à 170% le samedi après-midi. La distribution suivante n'a lieu que le lundi matin. Les trois associés interrompent également la distribution pendant un mois en pleine période de pousse de l'herbe.
Fini le gaspillage!«La première année où nous avons utilisé la mélangeuse, nous nous sommes tous retrouvés avec des stocks fourragers excédentaires pour nourrir un même troupeau, se souvient Jean-Michel Burteaux. Pertes à l'auge ou au silo: c'est un mystère que nous n'avons pas résolu, mais l'avantage économique est conséquent.» L'échange de fourrage est également devenu fréquent au sein de la Cuma. Deux des adhérents ont d'ailleurs opté pour l'ouverture d'un silo d'ensilage en commun, sous la responsabilité du chauffeur. |
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