Repérez les profils d'animaux à risques Repérez les profils d'animaux à risques
L'étude Nec+Repro, menée dans le Rhône-Alpes, confirme le lien entre l'état corporel des animaux, leur cyclicité et les résultats de reproduction.
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A l'heure où produire constitue une priorité, reproduire présente dans certains élevages, holsteins en particulier, une source de difficultés. « Les performances des animaux ont progressé, les techniques d'alimentation se sont améliorées, mais la fertilité s'est dégradée depuis une vingtaine d'années », rappelle ainsi Guy Charbonnier, de l'Union des coopératives d'élevage Alpes Rhône (UCEAR), membre du groupe Ferti Rhône-Alpes. Ce constat, partagé par les contrôleurs laitiers et les inséminateurs de la région, a suscité une étude destinée à mieux saisir les relations entre la note d'état corporel, la cyclicité et les performances de reproduction. Les travaux précédents, conduits en race holstein, avaient été réalisés en station et sur une période assez courte autour du vêlage. L'étude rhône-alpine, elle, a été menée en conditions réelles dans dix élevages de l'Ain, de l'Isère et du Rhône. Pour la première fois, les notes d'état corporel et les dosages de progestérone permettant de mesurer la cyclicité ont été mises en relation. Effectuée en 2004 et 2005, en collaboration avec l'UNCEIA, l'école nationale vétérinaire de Lyon et les GDS, cette étude a permis de suivre statistiquement 246 femelles, du tarissement à 180 jours après vêlage. Des profils types d'animaux au regard de la cyclicité, de l'état corporel, de la production laitière, de l'expression des chaleurs, ont été définis, puis croisés entre eux.
L'état corporel au vêlage primordial
« D'un niveau moyen de 9 400 kg de lait avec cinquante-cinq vaches présentes, les troupeaux avaient globalement de bons résultats de reproduction, précise Patrick Dubois, du Contrôle laitier du Rhône (Spel). En choisissant volontairement des animaux à forte production, nous sommes allés chercher les vaches les plus à risques en termes de fertilité. Toutefois, les profils d'animaux dégagés dans l'étude sont applicables dans n'importe quel type d'élevage de race prim'holstein. »
Outre une grande variabilité dans les pratiques d'élevage, les conclusions de cette étude ont confirmé que l'évolution de l'état corporel des animaux autour du vêlage influe sur leur cyclicité et sur les performances de reproduction. « Les prim'holsteins de l'étude maigrissent en moyenne jusqu'à quatre-vingts jours après le vêlage, note Patrice Dubois. Leur note d'état corporel diminue de 3,2 (plus ou moins 0,7) à1,9 (plus ou moins 0,6). Les animaux ont un profil moyen d'un demi-point en deçà des recommandations de l'Institut de l'élevage des années quatre-vingt, ce qui montre la proportion élevée de vaches maigres dans ces élevages. »
Les pertes d'état corporel de zéro à soixante jours post-partum , supérieures ou égales à 1,5 point, ont été associées à un retard d'apparition de la première chaleur après le vêlage et à l'allongement de l'intervalle "vêlage-IAP". Un impact sur la longévité a également été observé: la proportion de femelles réformées est plus élevée. « L'étude, souligne Patrice Dubois, a fait ressortir les profils de notes d'état à risques induisant des critères de mise à la reproduction défavorables. Trois critères individuels et un indicateur de troupeau ont été retenus: les femelles trop maigres ou trop grasses au vêlage, une perte d'état marquée de zéro à trente jours, une reprise trop tardive, 25% du cheptel noté à moins de 2. »
L'intérêt de l'éleveur est donc d'amener le maximum d'animaux au vêlage dans une dynamique d'état favorable.Une vache pas trop grasse (3,3) limitera sa perte d'état post-partum en dessous de 1,5 entre le vêlage et soixante jours, et connaîtra une reprise rapide d'état corporel avant le tarissement (de 2,8 à 210 jours). Cette femelle peu sollicitée aura ainsi toutes les chances de s'inscrire l'année suivante à nouveau en reprise rapide. Le TP minimal, qui reflète la perte d'état corporel en début de lactation, constitue un bon outil de suivi des animaux. Dans l'étude, 24% des prim'holsteins avaient un TP minimal inférieur à 26 g/kg, alors que l'objectif est qu'il soit supérieur à 28 sur les second et troisième contrôles laitiers.
Anoestrus pour les plus maigres, à TP/TB inversés
L'étude des profils de cyclicité et sa mise en relation avec l'expression des chaleurs est également très instructive. Alors que 73% des vaches étudiées étaient cyclées normalement entre trente et quatre-vingts jours après le vêlage, 30% seulement étaient cyclées et vues en chaleur régulièrement par l'éleveur. Les femelles présentant de l'anoestrus correspondent aux vaches les plus maigres avec des rapports TP/TB fréquemment diminués (une vache sur quatre présente un rapport inférieur à 0,7, trente jours après le vêlage). «La vache qui perd beaucoup d'état a autre chose à faire que de semettre en cyclicité, commente Guy Charbonnier. Elle se met en silence radio et exprime moins bien ses chaleurs. La problématique est donc double. Il faut détecter le plus précocement possible les anomalies de cyclicité (pathologie post-partum), tout en travaillant sur l'expression et l'observation des chaleurs des femelles cyclées.»
Dans l'enquête en élevages, 35% des appels à l'inséminateur ont eu lieu la première année, sur un seul signe des chaleurs, non spécifique (glaire, nervosité...). 80% des vaches inséminées au mauvais moment figuraient dans ce groupe. L'année suivante, les éleveurs se sont davantage arrêtés sur l'acceptation du chevauchement pour valider la première chaleur. Pour les aider à repérer les profils de femelles à risques le plus tôt possible, une check-list a été établie à la suite de l'étude. Une vache trop maigre ou trop grasse, un vêlage avec intervention, une non-délivrance, une métrite, un amaigrissement important, une boiterie, des taux anormaux, une forte production (plus de 40 kg par jour), des chaleurs discrètes, constituent autant de facteurs aggravants dont l'éleveur doit tenir compte avant de décider d'inséminer l'animal.
«La période de zéro à soixante jours après le vêlage est déterminante pour obtenir une bonne fertilité, souligne Guy Charbonnier, de l'UCEAR. Tous les facteurs qui influenceront lamise à la reproduction se jouent à ce moment-là: lactation, santé, cycle hormonal, etc. Or, elle est trop souvent considérée par l'éleveur comme une phase où il ne se passe rien.»
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*Le groupe Ferti RA, créé sous l'impulsion du PEP Rhône-Alpes (plate-forme d'expérimentation et de progrès), associe des compétences régionales issues de différents corps de métiers: contrôle laitier, insémination, vétérinaires, GDS, enseignement et recherche).
** L'étude complète Nec+Repro est téléchargeable sur le site www.gds38.asso.fr (rechercher «état corporel»).
Des préconisations adaptées aux laitières d'aujourd'huiDestinée à aider les éleveurs à repérer le plus précocement possible les profils d'animaux à risques, une grille d'investigation a été mise au point à la suite de l'étude Nec+Repro. Pour faciliter son utilisation en élevage, elle pourrait être intégrée dans des supports existants: dos des bulletins d'insémination artificielle, feuille d'accompagnement des plannings de reproduction, calendrier type trois semaines, outils informatiques. «Plutôt que d'appliquer le dogme qui dit qu'il faut inséminer autour de quatre-vingts jours, il s'agit de redonner du sens à la mise à la reproduction», souligne Guy Charbonnier. Des adaptations de la grille aux autres races sont en cours. En montbéliarde, un seuil de 29,5 se substituerait ainsi au 28 de TP, pertinent pour les prim'holsteins. Dans cette race, un écart de 12 points entre TP et TB sur les deuxième et troisième contrôles pourrait être interprété comme un signe d'acétonémie (contre 14 points en holstein), un écart de trois points comme un signe d'acidose. |
LES QUATRE POINTS CLÉS POUR ÉVITER LES SOUCIS1. L'éleveur doit veiller à ce que la femelle ne soit ni trop grasse ni trop maigre au moment du vêlage. La perte d'état doit être limitée à 1,5 point, et la reprise doit être rapide (si possible dès soixante jours, au plus tard à cent). 2. Prévenir et repérer les pathologies est indispensable. Attention aux métrites, sources d'infécondité. Pour identifier une métrite chronique ou se rassurer sur l'absence de problèmes, le vaginoscope est un outil très intéressant, à la portée de tout éleveur. 3. Détecter et noter la première chaleur, puis les suivantes, permet de distinguer rapidement les cycles normaux et anormaux. Il faut prendre soin de repérer toutes les expressions d'une chaleur, et ne pas s'arrêter à un seul signe. 4. Le TP minimal constitue un bon baromètre de l'état corporel de l'animal en début de lactation. Pour une vache prim'holstein, il ne doit pas descendre en dessous de 28 au cours des deuxième et troisième contrôles (29,5 en montbéliarde). |
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