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Diversifier ses cultures pour échelonner Diversifier ses cultures pour échelonner l'irrigation

Didier Auriault, agriculteur irrigant dans le nord de la Vienne, a choisi, depuis la sécheresse de 2005, de diversifier ses productions afin de répartir ses prélèvements d'eau sur une saison plus longue.

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« A la fin de juin 2005, du jour au lendemain, coupure d'eau: les niveaux des nappes et rivières étaient trop bas, nous ne pouvions plus irriguer. Nous avons laissé mourir nos maïs...

 

Dès les mois de janvier et février, nous savions que l'eau manquait et nous avions souscrit une assurance récolte, mais on ne travaille pas pour l'assurance, se souvient Didier Auriault, agriculteur à Champigny-le-Sec, dans la Vienne.

Pour contrer la peur de la coupure, il nous fallait une garantie de revenu en diversifiant nos cultures irriguées pour échelonner les prélèvements. »

En 2004, Didier Auriault, qui travaille avec son cousin, produisait environ 120 ha de cultures irriguées: maïs, blé tendre, pois. « Après la leçon de 2005, lorsque nous n'avons pu arroser le maïs, nous en avons moins semé, mais nous avons irrigué 110 ha de blé tendre, dont 40 en production de semences, 35 ha de tournesol, 20 ha de melon et du colza pour favoriser la levée si besoin. »

La consommation d'eau totale est quasi identique qu'auparavant, autour de 170.000 m3, mais l'irrigation est échelonnée dans le temps, ce qui diminue les risques de pénurie car la nappe est très réactive. « Et surtout, la diversification des agriculteurs du nord du département de la Vienne permet aux irrigants du sud de continuer à cultiver du maïs. Nous travaillons sur de la groie, du bon calcaire mais, au sud, le taux d'argile est trop important pour cultiver aisément une autre production que le maïs. »

Pour aider les agriculteurs du Sud, la solidarité départementale a donc joué, ainsi que la construction de réserves d'eau par les associations syndicales autorisées (ASA). Dans le nord du département, ce sont les forages qui se développent depuis trente-cinq ans.

Didier Auriault irrigue à partir de deux forages de 80 et 60 m3/h de débit, avec trois enrouleurs équipés de compteurs d'eau et de régulateurs de vitesse et un système de goutte-à-goutte pour le melon (ferti-irrigation). Grâce à un système d'acheminement de l'eau enterré et un parcellaire regroupé, Didier Auriault arrose aujourd'hui près de 200 ha.

Répondre aux besoins créés par l'eau

 

Pour la culture du melon, il dispose de 1.000 m3/ha mais, cette année, moins de la moitié devrait suffire. « Selon la météorologie, j'apporte par goutte-à-goutte 15 mm par semaine du 15 juin au 1er août », précise Didier Auriault.

 

Jusqu'à la fin de juin, pour favoriser le développement, la culture est sous tunnel, si bien que la plante a besoin d'eau quelles que soient les conditions météorologiques. « En tournesol, j'apporte 25 mm par tour d'eau, avec un à trois tours. Selon l'accès à l'irrigation, le rendement peut passer de 20 à 35 q/ha.

Cette année, je n'ai pas encore irrigué, mais peut-être qu'en fin de floraison, un risque de sécheresse se fera sentir. On pourra presque atteindre 35 q/ha sans apport d'eau! » Mais en choisissant d'arroser, il faut rentabiliser l'investissement du matériel et du temps passé: il faut aussi répondre aux besoins créés par l'eau. L'agriculteur doit optimiser le rendement en protégeant bien la culture.

« Un fongicide et un insecticide de plus sont nécessaires, et l'apport d'azote sera raisonné en fonction des tours d'eau en tournesol comme en blé tendre, insiste Didier Auriault. Ainsi, chaque produit phytosanitaire ou amendement sera valorisé par l'eau d'irrigation, ce qui n'est pas toujours le cas si la culture connaît un stress hydrique. »

Les variétés aussi ont été modifiées. Par rapport à Caphorn utilisée avant que Didier Auriault n'irrigue son blé tendre, par exemple, il privilégie maintenant Cézanne et Aubusson, qui sont plus résistantes aux maladies et plus courtes en taille. Pour le colza, il s'agit surtout d'une irrigation d'appoint pour favoriser la levée afin d'atteindre un objectif de rendement moyen de 30 q/ha.

« C'est un système d'assurance, je ne me demande plus pendant plusieurs jours si mon colza va bien lever, ce qui me permet d'être dans les temps pour les désherbages », précise l'agriculteur.

 

 

Système adaptable

Cette diversification des cultures irriguées a aussi un effet positif dans la rotation. Le melon nécessite de ne pas revenir sur la même parcelle avant sept ans, cette solution reste donc temporaire. Mais cela ne gène pas Didier Auriault car, l'année prochaine, il envisage d'augmenter la surface de maïs irrigué au détriment du colza, du blé tendre et du tournesol.

Changement possible car la nappe est très réactive par rapport aux précipitations et son niveau est actuellement élevé. « La petite rivière près de la ferme, qui était à sec depuis cinq ans, s'écoule à nouveau, et la marge d'une culture de maïs est beaucoup plus intéressante que le blé tendre. A titre d'exemple, avec des frais et un prix à peu près équivalents, je peux atteindre un rendement de 120 q/ha de maïs, contre 85 q/ha en blé tendre.

Le calcul est vite fait. Mais cela ne reste qu'un projet car si les niveaux d'eau se révèlent bas l'année prochaine, je peux modifier mes prévisions de semis au printemps en mettant du tournesol à la place du maïs notamment. »

 

Les points forts Les points faibles

• Semis (tournesol/maïs) adaptables selon le niveau de la nappe.

• Diversification des cultures favorables à la rotation

• Ne demande pas de gros investissements.

• La marge du maïs irrigué reste supérieure.

• Système transitoire (le melon nécessite une rotation de sept ans).

 

Un suivi des niveaux d'eau hebdomadaire

 

 L'Association des irrigants de la Vienne (Adiv) transmet par fax aux agriculteurs un avertissement irrigation tous les lundis, du début de juin à la fin de septembre. Sont mentionnés les données météorologique de la semaine passée et les niveaux des rivières et des nappes, les seuils d'alerte et de coupure.

 

Chaque agriculteur connaît sa nappe ou sa rivière de référence et peut suivre l'évolution des niveaux. Si le seuil d'alerte est atteint, une restriction de 50% du volume attribué selon les cultures et la capacité d'irrigation sera mise en place. Concernant les cultures spécialisées (melon, tabac), il existe des dérogations en décalant les niveaux d'alerte: si le seuil d'alerte est atteint, il n'y aura pas de restriction et si le seuil de coupure est atteint, il y aura réduction de 50% des apports d'eau hebdomadaires.

Chaque irrigant doit aussi relever ses compteurs d'eau toutes les semaines pour les envoyer en fin de campagne à la DDA. Ce système permet aux agriculteurs de connaître et de suivre exactement leur consommation d'eau et ainsi de mieux gérer l'irrigation.

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