Le vendredi 4 octobre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu son avis sur les dénominations animales des spécialités végétales. En clair, l’enjeu était de savoir si on avait le droit d’appeler « steak végétal » une galette de pois et de pommes de terre. C’est aussi le cas des « lardons végétaux » ou des « saucisses végétales ». Les noms des laits végétaux avaient déjà été interdits, sauf quelques exceptions (lait d’amande ou de coco).
Décrets
La France avait pris deux décrets interdisant ces appellations. Le premier en juin 2022 venait appliquer la loi sur l’étiquetage de 2020. Le second en février 2024 avait été une réponse du gouvernement Attal aux manifestations agricoles de l’hiver 2024. Leurs rédactions étaient assez similaires.
Saisi par des fabricants de substituts végétaux à la viande, le Conseil d’État avait suspendu les deux décrets en référé, c’est-à-dire en urgence sans se prononcer sur le fond, en juillet 2023 puis en avril 2024. La juridiction administrative avait, à chaque fois, renvoyé à l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne pour connaître la conformité de ces décrets au regard du droit européen.
Revers
C’est désormais chose faite. Et c’est un revers de plus pour la rédaction de ces décrets français. Pour la Cour, à défaut d’avoir adopté une dénomination légale spécifique à une denrée, un État ne peut interdire l’utilisation de termes « usuels » visant à désigner un produit.
« Un État membre ne saurait empêcher, par une interdiction générale et abstraite, les producteurs de denrées alimentaires à base de protéines végétales » d’utiliser des « noms usuels ou (des) noms descriptifs », souligne l’arrêt. Désormais, la prochaine étape est de recevoir l’avis définitif du Conseil d’État quant au fond. La date de cet avis n’est pas encore programmée.
Les réactions
Du côté de la profession agricole, on regrette cette position de la Cour de justice européenne. « Les professionnels de la filière de l'élevage et de la viande déplorent que cette décision valide l’usurpation des codes d’un produit naturel et sans additif pour commercialiser des produits ultratransformés », a réagi Interbev, l’association interprofessionnelle du bétail et des viandes.
L’interprofession espère que le dossier sera porté à l’avenir au niveau européen : « La filière ne s’oppose pas à la commercialisation de ces produits mais s’oppose fermement à ce qu’ils copient les codes de la viande à des fins de marketing. Elle insiste pour que protéines végétales transformées et viande soient bien deux catégories de produits différentes tant en matière de composition, d’apports nutritionnels, de naturalité, de qualité gustative, etc. »
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En revanche, du côté des fabricants des steaks végétaux, la satisfaction s’affiche en grand. « C’est une victoire tant attendue », réagit Nicolas Schweitzer, le directeur général de La Vie. Pour Guillaume Hannotin, l’avocat de l’association des fabricants Protéines France, « le steak végétal est une appellation d’usage qui existe depuis plus de quarante ans ». Pour lui, accoler à « steak » l’adjectif « végétal » a le mérite de la clarté.