Jambon végétal, saucisse végane, bacon végétarien, etc. : ces dénominations de produits alimentaires qui ressemblent à de la viande, mais qui sont fabriqués à partir de végétaux étaient au cœur d’une bataille judiciaire depuis des mois. Une étape vient d’être franchie avec la publication d’un nouveau décret au Journal officiel du 27 février 2024, qui s’appliquera dans trois mois.

Prévu par la loi Egalim2, un précédent décret du 29 juin 2022 avait fait l’objet d’un recours en justice qui s’était conclu par sa suspension en référé par le Conseil d’État. Pour se prononcer sur le fond de l’affaire, les conseillers ont déclaré attendre l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, saisie par Protéines France, une association de fabricants de substituts de viande à base de végétaux. Ce nouveau décret était attendu par les professionnels pour essayer d’y voir clair.

Deux listes

Le nouveau texte détaille notamment, en deux listes, les termes réservés aux produits d’origine animale ou ne contenant que très peu de protéines végétales. Parmi les termes dont l’utilisation est interdite pour la désignation de denrées alimentaires comportant des protéines végétales se trouvent : filet, faux-filet, rumsteck, escalope, bifteck, escalope, jambon, flanchet ou paleron. Sont également interdits pour commercialiser ou promouvoir un produit contenant des protéines végétales, les termes faisant référence aux noms des espèces et groupes d’espèces animales, à la morphologie ou à l’anatomie animale.

Certains termes pourront être utilisés pour des denrées alimentaires d’origine animale pouvant contenir des protéines végétales, sous condition de respecter une part maximale — en pourcentage — de végétal. Il s’agit de produits où les ingrédients végétaux ne se substituent pas aux denrées d’origine animale mais sont ajoutés en complément de ces dernières dans le cadre de ces assemblages. On y trouve des appellations comme andouille, bacon, chorizo, cordon-bleu, jambonneau, lardons, pastrami, pâté ou encore terrines, rosette et saucisse (à cuire, à frire, à griller, lorraine, de Toulouse, d’Alsace, de Lyon…).

Arômes

La teneur maximale en protéines végétales va de 0,1 % pour l’œuf entier liquide à 6 % pour une paupiette ou 5 % pour un saucisson. Une merguez pourra contenir jusqu’à 2 % de protéines végétales. Reste également autorisée l’utilisation de termes du règne animal pour les arômes.

Les produits légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un pays tiers restent autorisés, précise le gouvernement dans le texte. Le décret prévoit des amendes maximales de 1500 euros pour une personne physique et de 7500 euros pour une entreprise ainsi qu’une période de transition d’un an pour écouler les stocks existants.

Happyvore, un des fabricants français importants de substituts végétaux, estime que ce décrêt entraine de fortes distorsions de concurrence puisqu'il ne s'applique pas aux produits étrangers mais s'applique aux fabricants français qui exportent à l'étranger. « Ce décret va à l'encontre des agriculteurs français qui vendent aux industriels français leur récolte », résument Guillaume Dubois et Cédric Meston, cofondateurs de Happyvore.