Le juge avait manqué le contrôle des structures
Lorsqu’il est saisi par le preneur d’une demande de renouvellement de son bail, le juge doit rechercher, de son propre chef, si celui-ci est en règle avec le contrôle des structures.
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L’HISTOIRE. L’application combinée des dispositions du statut du fermage et de la réglementation sur le contrôle des structures ne va pas sans difficultés. Surtout depuis que le législateur a décidé de soumettre l’exploitant à un régime d’autorisation administrative rigoureux destiné à maîtriser et à orienter la politique foncière. Les parties présentes ont pu en juger. Un GFA, propriétaire d’un des plus beaux domaines des grands crus classés de l’appellation Pessac-Léognan, l’avait donné à bail à la société des Hauts Coteaux. À la suite de différends d’ordre financier, le GFA avait donné congé à la société en vue d’une reprise à son profit. Cette dernière l’avait contesté en demandant le renouvellement du bail.
LE CONTENTIEUX. Devant le tribunal paritaire des baux ruraux, le GFA avait fait valoir que la demande de renouvellement était nulle, car la société ne disposait pas d’une autorisation d’exploiter. Il est vrai que le preneur qui sollicite le renouvellement de son bail doit réunir les mêmes conditions d’exploitation et d’habitation que celles exigées du bénéficiaire du droit de reprise en fin de bail. Parmi ces exigences figure, à l’article L. 411-59 du code rural, le respect de la législation sur le contrôle des structures. Tel était précisément la prétention du GFA. En l’espèce, la société des Hauts Coteaux avait agrandi la superficie du domaine au-delà du seuil départemental, ce qui l’obligeait à solliciter une autorisation d’exploiter. Autorisation qu’elle n’avait pas sollicitée.
En réponse, la société locataire disposait d’un argument juridique pertinent. Selon elle, le statut du fermage prévoyant que le motif allégué dans le congé est « intangible », l’acte ne peut être validé pour un autre motif. L’avocat de la société avait d’ailleurs produit une récente jurisprudence précisant que l’appréciation des conditions de la reprise s’effectue par rapport au congé tel qu’il a été donné et au vu des mentions qui y figurent.
Or, en la cause, le seul motif figurant dans le congé était tiré de la reprise pour exploitation au profit du GFA. Aussi, faute de faire état de la question de l’autorisation d’exploiter, le congé devait être annulé et le renouvellement du bail validé. Les juges avaient été convaincus.
Pour accueillir la demande de renouvellement du bail, ils avaient relevé que le congé ne visait pas le défaut d’autorisation administrative d’exploiter. Mais la Cour de cassation, saisie par le GFA, a refusé d’entrer dans cette voie. La législation sur le contrôle des structures est d’ordre public et son respect s’impose au juge, quelles que soient les conditions dans lesquelles elle est susceptible d’être mise en œuvre. Aussi a-t-elle censuré la cour d’appel car il lui incombait de rechercher, « au besoin d’office », c’est-à-dire de son propre chef, si la société était en règle avec le contrôle des structures.
L’ÉPILOGUE. Devant la cour de renvoi, le GFA n’aura pas de peine à obtenir la validation du congé délivré à la société des Hauts Coteaux, car en l’absence d’autorisation d’exploiter, le renouvellement contreviendrait aux dispositions régissant le contrôle des structures.
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