« Quand un éleveur ne connaît pas le prix du lait de janvier alors que cela fait vingt jours qu’il le livre, quelle visibilité a-t-il ? » s’insurge Yohann Barbe, trésorier de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) lors d’une conférence de presse à Paris le 23 janvier 2024.
La branche laitière du syndicalisme majoritaire a fait un tour d’horizon de l’actualité, à l’heure où les négociations commerciales entre industriels laitiers et distributeurs sont sur le point d’être conclues. L’occasion pour Thierry Roquefeuil, président de la FNPL, de dénoncer le manque de mise en application de la loi Egalim : « Cette loi, pourtant votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale, n’est pas appliquée avec rigueur. Elle stipule que le prix de la matière première agricole (MPA) est non négociable. »
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Soutien aux organisations de producteurs
Or, une majorité des industriels — qui négocient déjà avec leurs distributeurs — n’ont pas encore trouvé d’accord sur le prix du lait avec leurs organisations de producteurs (OP). « Va-t-on encore donner aux producteurs les miettes des négociations commerciales au lieu du juste prix en fonction de leurs charges ? interroge le président du syndicat. Lactalis et Savencia sont en conflit avec leurs OP et n’ont toujours pas trouvé d’accord sur le prix du mois de janvier », observe Thierry Roquefeuil.
Selon les chiffres de l'interprofession laitère (Cniel), le prix de revient du lait a augmenté de 6 % en 2023. Dans le même temps, le prix du lait payé aux producteurs poursuit sa baisse. Dans ce contexte, Thierry Roquefeuil affirme le soutien de la FNPL aux OP dans le processus des négociations. Et de déplorer que « c’est le règne des anciennes méthodes malgré Egalim ». De leur côté, « les grandes et moyennes surfaces (GMS) veulent protéger le pouvoir d’achat des Français. On nous fait croire que l’alimentation a un poids phénoménal dans la balance », estime-t-il.
Plus de transparence
La FNPL dénonce les mécanismes à l’œuvre dans les négociations. En plus des prix payés aux producteurs non déterminés en amont des négociations avec la distribution, les industriels « surfent sur un vide juridique de la loi Egalim », avance Yohann Barbe. En effet, ces derniers doivent indiquer quel pourcentage du prix réclamé à la distribution pour leurs produits correspond à celui de la matière première agricole. Le but ? Sanctuariser le prix des produits agricoles comme précisé dans la loi Egalim.
Cependant, les transformateurs n'ont pas l'obligation de rendre public ce chiffre. Un tiers indépendant (commissaire aux comptes) est alors chargé d’attester quelle part du prix demandé est liée à l’évolution du prix d’achat des matières premières agricoles. Malgré tout, cette certification intervient en aval des négociations avec la distribution, « ce qui jette un flou. Il faudrait que ce document soit transféré en amont des négociations pour certifier que le prix de la matière première agricole n’est pas rogné dans les négociations avec la distribution », remarque le trésorier de la FNPL.