Dès février 1946, La France agricole (FA) consacre un premier reportage à un village picard, Le Bosquet, dévasté durant la Seconde Guerre mondiale, où reconstruction et remembrement sont menés de concert. À l’époque, François Tanguy-Prigent, ministre de l’Agriculture, reprend dans ses grandes lignes la loi de réorganisation foncière promulguée sous Vichy, mais qui n’avait pu être appliquée.
Un progression modeste au départ
Les débuts sont compliqués, les oppositions tenaces. René Massot, membre du Conseil supérieur de l’Agriculture, note dans la FA du 30 mars 1951 une progression modeste du remembrement, qu’il considère comme une affaire sérieuse qui prend l’allure d’une opération chirurgicale : « Elle doit être conduite avec prudence, méthode mais aussi résolution, et ceux qui la dirigent ne doivent pas se laisser arrêter par quelques oppositions. »
Sur le terrain, les oppositions perdurent. Mais la FA préfère voir le verre à moitié plein. Ainsi, elle témoigne (le 1er octobre 1959) de la démarche exemplaire de l’ingénieur du génie rural de l’Orne qui, malgré les fortes oppositions, a réussi à convaincre les plus réticents. Et, en 1961, Pierre Flandin s’intéresse aux exemples de « remembrements sans histoires qui ne font pas parler d’eux ».
« l’un des remèdes à la crise agricole »
Au début des années 1960, le Premier ministre, Michel Debré, qui considère le remembrement comme « l’un des remèdes à la crise agricole », sera à l’origine du projet de loi sur l’organisation foncière qui prévoit 500 000 à 600 000 hectares remembrés par an. Par la suite, le remembrement s’intègrera dans des projets plus vastes de restructuration foncière. Ce dont témoignent, dans les années 1960, des reportages sur les défrichements de la Champagne pouilleuse, de la Gascogne et des Landes.
Au milieu des années 1970, certains effets pervers se font sentir. La FA traite du dossier noir du remembrement en pays vosgien (9 novembre 1973), puis plusieurs mois plus tard (21 juin 1975) titre en couverture « Le remembrement et ses problèmes », évoquant les expériences malheureuses de la Combe de Savoie. Constatant les erreurs commises, alors que les opérations de remembrement sont à leur apogée, une loi sur l’aménagement foncier de 1975 intègre la sauvegarde des équilibres naturels.
L’année suivante, la loi sur la protection de la nature impose des études d’impact, que renforcera, en 1993, la loi sur les paysages. Dans son numéro du 10 décembre 2023, constatant que, depuis 1950, 70 % des haies ont disparu, la FA publie un article intitulé « Haies, tout ce qu’il faut savoir sur leur exploitation ».