« Qu’est-ce donc cette science dont on parle de plus en plus ? » s’interroge le chroniqueur de La France Agricole le 28 mars 1947, ajoutant que la France est très en retard dans ce domaine. Dans le même numéro, un journaliste est allé à la rencontre des inséminateurs du centre de La Loupe, en Normandie, là où a eu lieu, un an plus tôt, la première insémination artificielle sur une vache en France. Une révolution, souligne le journaliste, qui va permettre de lutter efficacement contre la propagation des maladies infectieuses, fléau de l’époque.

Dans les années qui vont suivre, l’insémination artificielle passera d’environ 5 000 inséminations en 1946 à plus de 7 millions en 1972. Entre-temps, la loi sur l’élevage, qui pose les fondations du dispositif génétique, a été promulguée en 1966. Une loi conçue par Jacques Poly, alors conseiller d’Edgar Faure, et qui deviendra par la suite le PDG de l’Inra, et votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Situation qui suscite l’ironie de l’éditorialiste de La France Agricole le 1er décembre 1966 : « Unanimité touchante et remarquable : les grands problèmes politiques ou économiques divisent les groupes parlementaires. La vache les rapproche », avant de s’interroger : « cette satisfaction est-elle justifiée ? », et de conclure qu’on ne pourra juger de son bien-fondé que dans ses prolongements pratiques.

Premières transplantations embryonnaires

Par la suite, le succès est confirmé. La génétique couplée avec le développement de l’informatique et de l’insémination artificielle accélérera la mise en place des premiers programmes d’amélioration génétique, avec, au milieu des années 1970, les premières transplantations embryonnaires. Un reportage dans l'édition du 25 avril 1975 explore cette technique consistant à prélever des ovules fécondés sur une vache de très haute qualité et à implanter chacun de ces ovules dans l’utérus d’une vache à moindre potentiel.

Dans les années 1980-1990, nouvelle révolution avec le développement de la génomique, marquée aussi en 1997 par la naissance de Dolly, une brebis conçue par clonage cellulaire. « Ce clonage ouvre un champ d’applications intéressant pour les animaux exceptionnels », écrit Cécile Blanchard dans La France Agricole le 1er mars 1997.

Mais cette évolution pose question, sur fond de maladie de la vache folle. « Le progrès technique qu’a connu l’agriculture depuis la fin de la dernière guerre a de beaux jours devant lui, écrivent Cécile Blanchard et Éric Roussel dans un dossier titré « Jusqu’où ira la sélection animale ? » paru le 25 février 2000. Mais il doit s’adapter pour satisfaire la société de plus en plus sensible à ses dérives. » Avec notamment l’introduction de nouveaux critères comme le bien-être animal, l’éthique, la santé, l’environnement…