Les débats sur la loi d’orientation et d’avenir agricoles vont bientôt prendre fin et c’est le moment choisi par le conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) pour faire connaître ses propositions sur le volet transmission. Dans ce dossier, le portage du foncier est un élément majeur que l’organisme souhaite voir évoluer à travers 7 recommandations. « Des mesures concrètes indissociables, les unes constituant la contrepartie des autres », est-il écrit dans le rapport.
Rendre le bail attractif
Parmi les mesures phares du dossier, le CGAAER souhaite voir la durée des nouveaux baux ruraux passer à 15 ans au minimum. L’objectif, donner de la visibilité dans le temps pour le fermier mais pas seulement. Le propriétaire bailleur pourra tout de même faire évoluer le montant du fermage sur la période. De l’autre côté, les baux de carrière nouvellement signés seront ramenés à 20 ans, contre 25 ans actuellement.
Toujours dans un souci d’inciter les propriétaires bailleurs à s’engager sur le long terme, le CGAAER souhaite voir la fiscalité accompagner le mouvement. Les exonérations existant pour les baux long terme seront ainsi toujours en vigueur pour le nouveau bail de 15 ans. Dans le rapport, il est précisé que cet ajustement de la durée des baux a été pensé pour s’adapter à des installations « plus tardives et hors cadre familial ».
La fiscalité adaptée
Dans le même esprit, le CGAAER veut également rendre la propriété de terres agricoles plus intéressante alors qu’il estime qu’il s’agit d’un actif qui peut être risqué. « Depuis plus de 40 ans, la taxation des terres agricoles augmentant plus rapidement que le revenu des fermages, le revenu net pour le propriétaire bailleur s’est dégradé progressivement pour aboutir presque imperceptiblement à un rendement négatif en moyenne », constate le CGAAER.
C’est donc le levier fiscal qu’il est suggéré d’employer avec notamment le passage de 20 à 30 % de l’exonération communale et intercommunale de la taxe foncière sur le foncier non bâti. Est envisagée également, la sortie des terres à « vocation alimentaire ou énergétique » de l’impôt sur la fortune immobilière et une nouvelle réduction des droits de cession. Attention toutefois, là encore ces propositions ne concerneraient que les terres louées via des baux à long terme.
Le statut du fermage sur la table
Le CGAAER fait un constat critique du statut du fermage. Pour l’organisme, les situations conflictuelles induites par son manque de formalisme « génèrent une appréhension indéniable de la part de propriétaires fonciers », écrit-il. Parmi les propositions pour y remédier, la suppression des baux oraux pour des surfaces de plus de 5 ha, l’obligation d’un état des lieux initial ou l’établissement des modalités d’autorisation de travaux, contractuellement entre les parties. Le rapport espère aussi une clarification dans le cas des baux cessibles, notamment en ce qui concerne les indemnités d’évictions.
Dans l’objectif de mieux accueillir les hors-cadre familiaux vers l’installation, le rapport suggère d’agir sur le droit de préemption du preneur dans le cas d’une vente par le propriétaire. Concrètement, il s’agirait de rendre possible la cession de ce droit hors du cadre familial tout en permettant une réévaluation du fermage par le propriétaire bailleur. « Fixer le prix sur la base d’un bien libre pourrait constituer une contrepartie pour le propriétaire bailleur à la cessibilité, hors cadre familial, du droit de préemption du preneur », justifie le CGAAER.
Un nouveau GFA comme outil
Le CGAAER loue les bénéfices du GFA pour faciliter la transmission. Mais il pointe également ses limites concernant la présence d’investisseurs non familiaux. Pour pallier ce problème, le rapport préconise la création d’un GFA d’investissement sur le modèle des groupements forestiers d’investissements qui, eux, permettent « l’appel public à l’épargne ».
Les rédacteurs proposent en outre une multitude d’ajustements pour les GFA comme la possibilité d’intégrer une personne morale, pousser à anticiper le calcul de la valorisation des parts et la suppression de l’accord unanime pour prévoir la sortie éventuelle d’un associé.
Sécuriser les financements
Le CGAAER propose enfin d’agir sur l’un des freins les plus notables à l’installation : le financement. Dans ce domaine, une proposition émerge. La création d’un fonds de garantie afin d’accompagner les nouveaux projets car « les opérateurs de portage sont confrontés, d’une part, à la couverture du risque des premières opérations et, d’autre part, au besoin de fonds institutionnels pour accompagner leur développement », analyse le CGAAER. Ce fonds serait géré par une banque publique d’investissement, BPI France.
Le rapport du CGAAER met enfin le doigt sur le manque de données statistiques autour du foncier agricole. Les rédacteurs regrettent, par exemple, le manque de détails sur son usage ou sa transmission, centralisés au niveau national. La création d’un observatoire pourrait corriger cette difficulté, selon le rapport. « L’adaptation et la mise en œuvre des politiques publiques nécessitent de mieux caractériser la problématique du portage du foncier agricole, y compris le fermage traditionnel, et de détecter les évolutions émergentes », estime le CGAAER.