Les voix s’élèvent de plusieurs bords pour s’insurger face aux scènes difficiles qui s’opèrent dans plusieurs élevages des deux Savoies. « Nous refusons de fermer les yeux sur les drames intolérables qui se jouent dans les fermes », s’insurge la Confédération paysanne dans un communiqué de presse du 22 juillet 2025. En écho, la Coordination rurale dénonce des abattages de troupeaux « humainement insupportables » en conférence de presse le 23 juillet.
Le Modef abonde dans le même sens, qualifiant le dépeuplement de « bouleversement professionnel » mais surtout de « perte irrémédiable » lors d’une conférence de presse, le 22 juillet. Selon la Confédération paysanne, plus de 1 000 bovins auraient déjà été abattus en Savoie et Haute-Savoie au 23 juillet.
Le 16 juillet dernier, la Ministre de l’agriculture Annie Genevard obtenait du Cnopsav (1), réuni en urgence, la validation de la décision d’abattage total des foyers de dermatose nodulaire contagieuse (DNC). Pour l’état, le dépeuplement répond aux obligations réglementaires européennes. La FNSEA annonçait dans un communiqué le 17 juillet avoir « acté ce choix, pour la protection et la pérennité de l’élevage français » et être conscient « des difficultés humaines engendrées par de telles décisions ».
« Abattage total et euthanasie ciblée ont le même impact »
Confédération paysanne, Modef et Coordination rurale plaident en faveur d’un abattage partiel. « Contrairement à ce que prétend la ministre, les avis scientifiques confirment la possibilité de changer de stratégie. Dans son étude de 2016 réalisée suite à l’apparition de la DNC dans les Balkans, l’Efsa (2) estimait que, sur un territoire où une campagne de vaccination large était menée, l’abattage total des troupeaux et l’euthanasie ciblée des animaux ont le même impact sur la lutte contre l’épidémie », rapporte la Confédération paysanne dans son communiqué.
La légalité même de l’abattage total est remise en cause par la Coordination rurale. Un avocat du syndicat, Maître Coadou, parle de « violation assez grossière des droits du Gaec Duchêne », cette ferme devenue symbole de résistance pour les opposants au dépeuplement, qui a finalement vu son troupeau euthanasié le 22 juillet.
« L’arrêté préfectoral demandant l’abattage immédiat du troupeau Duchêne pose problème car il ne respecte pas un certain nombre de dispositions légales. Le code des relations entre le public et l’administré spécifie que le Gaec doit connaître les raisons de la décision. Or, il n’y a aucune donnée scientifique qui vient justifier l’abattage complet de son cheptel alors même qu’il a procédé aux mesures de confinement, de test et d’abattage des bêtes porteuses ». Le conseil d’État a été saisi, mais l’abattage ayant déjà eu lieu, « le Gaec a perdu toute possibilité de faire valoir ses droits », déplore l’avocat.
Pour se faire entendre, la Confédération paysanne organise une mobilisation devant la préfecture de Chambéry jeudi 24 juillet à 8 h, alors que la ministre de l’agriculture se rend au même endroit pour signer une « charte d’accompagnement des éleveurs » visant un soutien psychologique et financier des personnes concernées.
(1) Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale.
(2) Autorité Européenne de Sécurité des Aliments.