« On n’est pas sur un équilibre de marché », regrettait Yves Sauvaget, président commission bio de l’interprofession laitière (Cniel) le 13 octobre 2025 à Saint James (Manche). Il intervenait à l’occasion du colloque national consacré au lait bio et organisé par la Confédération paysanne. Yves Sauvaget a notamment déploré la lenteur pour atteindre les objectifs de la loi Egalim selon lesquels la restauration collective doit proposer 50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques.

Le rebond des achats se fait encore attendre dans la grande distribution traditionnelle

Agroéconomiste au Cniel, Corentin Puvilland note que la crise de consommation n’appartient pas encore au passé dans tous les réseaux de distribution. Les grandes et moyennes surfaces représentaient 59 % des achats de produits laitiers biologiques par les ménages en 2024. « On est revenu au niveau de 2017, soit 30 % sous le niveau de 2019 », constate-t-il.

La stabilisation des achats est effective pour l’ultra-frais et la crème, mais elle se fait encore attendre pour le beurre, les fromages et le lait liquide. Corentin Puvilland mentionne toutefois une évolution positive : « la baisse du nombre de références qui avait accentué la déconsommation se ralentit depuis début 2024. La demande par référence est aujourd’hui en hausse sur plusieurs catégories. »

Yves Sauvaget, président commission bio (à gaiche), et Corentin Puvilland, agroéconomiste du Cniel, restent prudents concernant l’équilibre du marché des produits laitiers bio. (© Claire Guyon Maite)

Représentant 22 % des achats de produits laitiers par les ménages en 2024, les circuits de distribution spécialisés en bio confirment en 2025 le rebond des ventes observé en 2024. « Le consommateur va aujourd’hui chercher les références qui ne sont plus en GMS d’autant qu’une convergence des prix est observée », indique Corentin Puvilland.

La restauration collective ne remplit pas les objectifs d’Egalim

Du côté de la restauration collective, l’agroéconomiste précise « le bio représentait 8 % des achats en 2023, et 10 % en 2024. À ce rythme la loi Egalim sera respectée en 2034. » Surtout, 100 millions de litres de lait supplémentaires seraient absorbés annuellement si les 20 % étaient atteints. Cela représente un manque à gagner de chiffre d'affaires de 20 millions d’euros par an pour la filière.

Corentin Puvilland observe « cette situation impacte les prix avec un rapprochement des prix du lait bio et du lait conventionnel soit 42 € d’écart sur les 12 derniers mois ». Ce différentiel devrait toutefois s’accentuer prochainement avec une réduction des déclassements et une tendance baissière du prix en conventionnel.

Corentin Puvilland souligne enfin une exception française avec une consommation de lait bio qui a augmenté de 30 % en Allemagne depuis 2019 alors qu’elle reculait d’autant en France. De même les différentiels de prix payés aux producteurs sont plus avantageux outre-Rhin.