En 2022, alors qu’elles avaient gagné du terrain pendant plusieurs années, les surfaces de fruits cultivés en agriculture biologique ont amorcé un repli : elles atteignaient 30 269 hectares, pour représenter 27 % de la SAU fruitière française, contre 31 460 hectares en 2021. Même tendance pour les surfaces en conversion : 9 464 hectares en 2022 contre 12 385 hectares en 2021, selon les chiffres de l’Agence bio présentés le 9 novembre 2023 par Paulin Matchon, responsable du comité bio d’Interfel (l’interprofession des fruits et légumes).
Une année « particulièrement difficile »
« L’année a été particulièrement difficile pour la bio dans son entièreté et les perspectives restent assez négatives, avec un marché qui devrait encore se dégrader », a exposé l’expert. Les achats de fruits bio ont reculé de 12 % en volume et de 11 % en valeur par rapport à 2021. « La légère hausse de 2 % des prix en magasin n’a pas permis de compenser la perte de volumes », analyse-t-il.
D’après une enquête menée auprès des metteurs sur le marché, 44 % d’entre eux avaient déclassé en conventionnel au moins une partie de leur marchandise (fruits et légumes confondus) en 2021. Ils étaient 16 % en 2018. Quant au taux moyen de déclassement, il atteignait 11,2 % en 2021 contre 1 % en 2018. « Sur 2022 et 2023, on devrait avoir des valeurs un peu plus importantes encore, qui pourraient atteindre 30 % ou plus, a estimé Paulin Matchon. On note toutefois un ralentissement sur un certain nombre d’indicateurs comme l’inflation, qui devrait refluer à l'horizon de 2025 et ainsi redonner du pouvoir d’achat aux consommateurs. »
L’origine France en a encore sous la pédale
Sur les quelque 225 000 tonnes de fruits frais bio mis sur le marché en 2021, 76 % étaient d’origine française. « Une part qui n’a cessé de croître ces dernières années, et qui devrait continuer d’après les retours que nous avons des acteurs de la filière », a assuré Paulin Matchon. À noter que les importations sont principalement constituées d’agrumes. Ceux-ci représentent 19 % des volumes de fruits frais bio mis sur le marché, et se placent derrière la pomme qui en représente 55 %. Les tonnages mis sur le marché en 2021 avaient légèrement repris du terrain après deux années de baisse, alors que la filière est en attente des chiffres de 2022.
Quant aux canaux de distribution, la vente directe se défend bien, même si elle reste minoritaire derrière la GMS (grandes et moyennes surfaces) et les magasins spécialisés dans la bio. « Entre 2022 et 2023, on note une progression des ventes via la vente directe, passant de 8 à 10 % des volumes de fruits frais bio commercialisés », constatait Paulin Matchon.
Face aux autres labels et mentions
La filière compte sur plusieurs leviers pour sortir de la crise. Le renforcement de la communication, d’abord, permettra de clarifier les garanties du cahier des charges de la bio vis-à-vis des autres labels et mentions pour le consommateur. « On voit d’après des enquêtes qu’un consommateur sur deux ne sait plus clairement ce que c’est de la bio », regrettait l’expert. À ce sujet, le ministère de l’Agriculture avait annoncé à l’occasion du salon Tech & Bio rallonger de 15 millions d’euros le budget destiné à la communication déjà engagé dans le plan de sauvegarde de la bio présenté en mai dernier. La RHD (restauration hors domicile) apparaît, quant à elle, comme un relais de croissance, « mais elle ne pourra pas répondre à toutes les attentes », a nuancé Paulin Matchon.