« Jusqu’en 2021, le bio n’a connu que la croissance en Europe », rappelle Burkhard Schaer, analyste chez Ecozept, un cabinet d’expertise-conseil en marchés agroalimentaires à l’occasion du salon Natexpo, le 24 octobre 2023. Si la consommation en produits bio a connu un net ralentissement depuis 2021, elle semble aujourd’hui connaître une reprise partielle.
Pas de « plafond du bio »
Alors peut-on parler de « plafond du bio » ? Non, selon Burkhard Schaer : « La logique du bio n’est pas celle d’un produit ou d’une marque qui connaîtrait un plafond, estime-t-il. En France, le bio représente 6,5 % de la consommation des ménages (en valeur) contre 12 % en Autriche. Au Danemark, 42 % du lait consommé est en bio. Alors pourquoi le marché français s’arrêterait ? »
D’autres pays ont également connu des reculs de la consommation bio. En Allemagne, deuxième plus gros marché bio mondial, la consommation a bondi de 20 % en 2020 avant de reculer fortement au deuxième semestre de 2022, entraînant une baisse de 20 % du chiffre d’affaires des magasins spécialisés. Sur cette même période, seuls les magasins discount, comme Aldi ou Lidl, ont vu leur consommation en produits bio croître.
Solutions allemandes
Mais en septembre 2023, pour le troisième mois consécutif, le chiffre d’affaires du bio présente un solde positif. « La distribution spécialisée retrouve sa croissance, mais le discount reste la locomotive », indique Burkhard Schaer.
Pour enrayer la baisse de la consommation, l’Allemagne s’est dotée de soutiens politiques forts à l’échelle nationale et régionale. « La forte coopération entre les agriculteurs et les commerces de détail a joué le rôle de stabilisateur de crise, rapporte aussi Ecozept. Les exploitants agricoles se sont engagés sur des volumes en contractualisant pour ne pas sortir leurs produits de la filière bio en cas de crise. »
« Le bio est considéré comme positif dans les médias, poursuit Burkhard Schaer. Il y a peu de bio-bashing. […] Il y a une bonne communication sur les externalités positives et sur l’efficacité climatique de la bio. »
D’autres crises mondiales
Les États-Unis, qui représentent le premier marché mondial de bio, connaissent quant à eux une croissance lente mais continue de la consommation. « Alors qu’il est de tradition de ne pas subventionner l’agriculture, un soutien exceptionnel de 300 millions de dollars a été alloué au secteur de l’agriculture biologique », rapporte Burkhard Schaer.
Le marché du bio suédois a quant à lui souffert en 2018 de la publication d’un article expliquant l’inefficacité du bio face au changement climatique. Les achats se sont réduits tandis que l’offre en rayon s’est vue diminuée. Mais depuis 2022, le marché du bio suédois retrouve une croissance.
« Depuis 2010, les crises structurelles et conjoncturelles dans le marché du bio ont toutes été surmontées, mais elles ont affaibli le bio, analyse Burkhard Schaer. La réaction du secteur n’a pas été assez efficace pour engager un vrai débat. La pandémie a ensuite masqué toutes les faiblesses de l’agriculture biologique. » Le cabinet dresse quelques recommandations pour parvenir à stabiliser et relancer la consommation : procéder à une contractualisation obligeante auprès de la grande distribution, diversifier l’offre bio, notamment sur l’entrée de gamme, communiquer et disposer d’outils d’observation fine du marché.